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Enfance - Le Haut Conseil de la famille exécute la PreParE et propose de revoir entièrement le congé parental

Un volumineux rapport du HCFEA évalue les "voies de réforme des congés parentaux dans une stratégie globale d'accueil de la petite enfance". Pour le Haut Conseil, la "prestation partagée d'éducation de l'enfant" est un échec. Parmi les propositions : verser la PreParE au-delà des deux ans de l'enfant, jusqu'à l'entrée en maternelle, si les parents n'ont pas trouvé de mode de garde.

Le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) publie un rapport sur le congé parental, qui complète ses travaux sur les modes de garde publiés il y a quelques mois (voir notre article ci-dessous du 16 avril 2018). Intitulé "Voies de réforme des congés parentaux dans une stratégie globale d'accueil de la petite enfance", ce document, adopté par le Conseil de la famille le 13 février, procède à une exécution en règle de la "prestation partagée d'éducation de l'enfant" (PreParE). Mise en place en 2015 - remplacement du complément de libre choix d'activité (CLCA) par la PrePare -, cette réforme apparaît en effet, aux yeux du HCFEA, comme un échec complet.

Une réforme "indispensable"

Il est vrai que les chiffres sont plutôt accablants. Le recours à la PreParE a fortement reculé dès sa mise en place (-32% entre 2016 et 2017), "ce qui montre une forte inadaptation de cette prestation aux besoins des familles, liée en partie à la faiblesse de son montant, à ses conditions d'attribution et à la réduction de sa durée". La réforme n'a pas eu non plus les effets annoncés en matière d'égalité des sexes (le nombre de pères partageant un congé parental a au contraire reculé), ni d'impact sur le retour au travail des mères après le congé parental : "En pratique, la réforme s'est traduite par une baisse du nombre des mères se déclarant en congé parental et une augmentation de celles se déclarant au chômage". La seule réussite de la PreParE réside dans l'économie budgétaire de près d'un milliard d'euros réalisée par la Cnaf, ce qui était au demeurant l'objectif principal, à peine dissimulé, de la réforme.

Conclusion du HCFEA : "De cet ensemble de constats, on peut déduire qu'une réforme des congés parentaux pris pour s'occuper d'un jeune enfant et de leurs modalités d'indemnisation est indispensable, les dispositions actuelles au travers de la PreParE apparaissant inadaptées". Une prise de position qui donne satisfaction à l'Unaf (Union nationale des associations familiales), qui a toujours été vent debout contre la PreParE. Dans un communiqué du 26 février, l'association se félicite ainsi de ce que "le HCFEA dresse un constat d'échec total".

Mobiliser plusieurs leviers d'action

Après diverses considérations, déjà bien documentées, sur l'impact de l'arrivée d'un enfant sur les modes de vie et sur les aspirations des parents, ainsi qu'un rappel des dispositifs actuels en matière d'accueil de la petite enfance, le rapport du HCFEA propose six orientations pour la réforme des congés parentaux. Il s'agit ainsi de mieux répondre à la demande des parents (pas de modèle unique), d'éviter un éloignement complet et durable du marché du travail pour les mères (faciliter le temps partiel, plutôt à 80%, et encourager les congés courts en cas d'arrêt complet) et d'aller vers davantage d'égalité entre les mères et les pères dans la prise des congés. Il s'agit également de travailler la complémentarité et les transitions avec les autres modes d'accueil, de proposer des solutions allant jusqu'à l'entrée à l'école maternelle et, enfin, de mieux prendre en compte les difficultés des parents éloignés de l'emploi (et tout particulièrement la situation des familles monoparentales).

Cette approche globale suppose de "mobiliser conjointement" plusieurs "leviers d'action" : les modes d'accueil de la petite enfance (objet d'un précédent rapport du HCFEA), le maintien ou l'insertion professionnelle des parents de jeunes enfants, le congé parental et son indemnisation, ainsi qu'un meilleur partage des temps parentaux pour lutter contre les inégalités femmes-hommes.

Un versement de la PreParE jusqu'à l'entrée en maternelle

Sur le volet spécifique de la réforme du congé parental, le rapport propose une approche en deux volets. Le premier consiste à agir sur le congé parental actuel et sur son indemnisation. Pour cela, le HCFEA propose de verser la PreParE au-delà des deux ans de l'enfant, jusqu'à l'entrée en maternelle, si les parents n'ont pas trouvé de mode de garde. Il recommande également d'inciter au temps partiel partagé entre les parents (en supprimant le plafonnement et en bonifiant le temps partiel partagé) et d'"endiguer la dégradation du niveau de la prestation". Depuis sa création en 1994, le montant de la prestation (APE, puis CLCA, puis PreParE) s'est en effet dévalorisé de 38% par rapport aux salaires, "ce qui est une des raisons de sa faible attractivité". Parmi les mesures proposées figurent aussi le développement de l'information des ménages sur la prestation, une révision des conditions d'activité antérieure pour y accéder (notamment pour les jeunes parents qui peinent souvent à obtenir un emploi stable) et une meilleure prise en compte des aspects liés au droit du travail (possibilité de fractionnement du congé et possibilité d'un congé parental supplémentaire, non rémunéré, entre le 3e et le 18e anniversaire de l'enfant).

La seconde piste avancée par le HCFEA est celle d'"'une réforme plus ambitieuse du congé parental". Elle passerait par la mise en place d'un congé court mais mieux rémunéré (en fonction des revenus antérieurs) et par le maintien de la PreParE (aménagée selon les propositions supra) pour ceux qui préfèrent un congé long.

Sur l'amélioration du partage des temps parentaux et la lutte contre les inégalités femmes-hommes, le HCFEA propose notamment d'allonger le congé paternité (jusqu'à un mois), de favoriser le temps partiel (et en particulier le temps partiel partagé entre les parents), et d'encourager les aménagements horaires pour les familles. Seul bémol à ce rapport très complet (230 pages sans les annexes...) et aux propositions du HCFEA : l'absence de toute évaluation, même sommaire, de l'impact budgétaire de ces mesures.