Risques naturels - Le gouvernement annonce un plan de reconstruction et de renforcement des digues
Le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, a présenté ce 3 mars en Conseil des ministres une communication annonçant un "plan exceptionnel de reconstruction et de renforcement des digues et de prévention des submersions marines". Le gouvernement entend ainsi "tirer les leçons" de la tempête Xynthia qui a balayé la France les 27 et 28 février et provoqué la mort de 52 personnes selon le dernier bilan officiel. Il souhaite "engager très rapidement un plan d'action pour éviter qu'un tel drame ne se reproduise". La tempête a en effet "entraîné à la fois la submersion des digues et remblais côtiers et leur rupture en certains endroits, provoquant les inondations meurtrières", a rappelé le ministre dans sa communication.
"Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et l'Inspection générale de l'administration remettront sous dix jours un pré-rapport sur les causes de la catastrophe, y compris la rupture de certaines digues indiquant les travaux à entreprendre de toute urgence", a indiqué Jean-Louis Borloo. Sous deux mois, la mission devra faire des propositions afin de "recenser les digues et les lieux menacés, réaliser un travail fin et localisé pour déterminer les maîtres d'ouvrage et exploitants de toutes les digues dans les zones à risque, accélérer les décisions arrêtant les plans de prévention des risques (PPR), mieux faire respecter les PPR dans les décisions individuelles d'urbanisme, sanctionner plus fortement les manquements aux règles édictées, renforcer la prise en compte du risque dans les règles de constructibilité derrière les digues, améliorer le dispositif d'alerte".
"La mission devra également apporter des éléments de réponse aux questions suivantes : quelle maîtrise d'ouvrage pour ces digues ? quelle est la pertinence de la construction de digues en dehors des zones urbanisées et plus généralement, quelle stratégie de gestion du trait de côte retenir ?", poursuit la communication ministérielle. Enfin, la mission est chargée d'"établir une proposition des réfections prioritaires des digues existantes et d'un plan de financement sur cinq ans". Elle pourra en outre "proposer des dispositifs juridiques et financiers pour traiter le cas des immeubles existants pour lesquels une menace est importante".
Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, a évalué la réfection des digues à 1 million d'euros par kilomètre. Selon elle, sur 1.350 kilomètres de digues le long des côtes, - et plus de 800 communes sous le niveau de la mer - "un tiers pose des problèmes de sécurité". "C'est sur ce tiers que nous allons nous concentrer, en particulier dans les régions Pays-de-la-Loire, Poitou-Charentes et Nord-Pas-de-Calais", a-t-elle ajouté. Selon Anne-Marie Levrault, chef du service des risques naturels et hydrauliques au ministère de l'Ecologie, un tiers des digues sont actuellement gérées "par des maîtres d'ouvrage qui n'ont pas les capacités techniques ni financières de remplir toutes leurs obligations, y compris en zone urbaine". L'Etat lui-même ne gère qu'environ 1.000 km de digues fluviales, essentiellement sur la Loire.
Depuis 1995, la France a déjà durci sa réglementation. Le principe général "est de ne pas construire derrière les digues", indique-t-on au ministère de l'Ecologie. Mais de nombreuses constructions sont antérieures à la définition de PPR. Et la délivrance des permis de construire relève des communes, fait-on valoir. Un décret de décembre 2007 prévoit déjà la conduite d'études de dangers, avec un calendrier d'aménagements nécessaires. "Mais le renforcement de toutes les digues demandera sans doute plusieurs années, voire plusieurs dizaines d'années", estime Patrice Mériaux, ingénieur à l'Unité de recherche ouvrages hydrauliques et hydrologie du Cemagref d'Aix-en-Provence. En attendant, le décret de 2007 autorise l'Etat à démolir les habitations qu'il juge trop exposées. La procédure a déjà été utilisée dans le Gard et actuellement à Blois où une centaine de maisons vont être détruites le long de la Loire.
Anne Lenormand avec AFP