Fonds européens - Le FSE doit servir à lutter contre la pauvreté, suggère un rapport
31% du PIB. C'est ce que représentent, en France, les dépenses sociales. Elles ont "augmenté de manière sensiblement plus marquée" que la moyenne des pays de l'OCDE, selon un rapport débattu depuis mardi 31 janvier à l'Assemblée nationale.
Alors que la crise budgétaire et économique pose de manière toujours plus accrue la question du maintien du modèle social français, les députés Michel Heinrich (UMP) et Régis Juanico (SRC) ont été chargés, en 2010, par le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de rédiger un rapport sur l'évaluation des performances des politiques sociales en Europe.
Faiblesse du taux d'emploi
Le dynamisme démographique de la France, l'espérance de vie à la naissance, la durée de vie à la retraite ou encore l'efficacité redistributive du système fiscalo-social dans son ensemble, sont des "points forts" de notre modèle national, rappelle le document. Il souligne néanmoins "la faiblesse du taux d'emploi et les progrès possibles dans le domaine de la santé, de la lutte contre les inégalités, la coordination des soins et la réduction des frais administratifs".
Le texte mentionne également "une tendance à l'aggravation des inégalités et de l'exclusion en France", selon les critères mis en place dans le cadre de la stratégie de l'UE pour 2020, qui vise à sortir 20 millions d'Européens de la pauvreté d'ici dix ans. Avec 18,4% des Français concernés par le risque de pauvreté et d'exclusion en 2009, la France est plus performante que la moyenne européenne mais se situe à la 9e place après la République tchèque, les Pays-Bas et la Suède, entre autres.
Redéployer le FSE
L'une des recommandations importante du rapport consiste à "redéployer le FSE quasiment exclusivement [pour atteindre les objectifs de] la stratégie Europe 2020 de lutte contre pauvreté et exclusion, explique Michel Heinrich. Lutter contre la pauvreté c'est faciliter le retour à l'emploi. Il faut donc mettre le paquet sur le chômage de longue durée".
Mais les propositions de la Commission sont plus modestes. Elles recommandent qu'au moins 20% de la dotation nationale soit dédiée à la lutte contre la pauvreté. Et un autre obstacle demeure : "Tous les organismes de l'insertion estiment que mobiliser le FSE est tellement complexe qu'ils renoncent parfois à l'utiliser. On peut largement simplifier les procédures notamment dans domaine de l'insertion et mieux informer", ajoute l'élu UMP.
A l'instar de ce que prévoit le rapport des parlementaires, l'exécutif européen veut également que le FSE soit dépensé pour "renforcer l'innovation sociale". C'est-à-dire élargir au plan européen les actions qui ont bien fonctionné dans un territoire.
Dans le domaine du logement, par exemple, la France a repris, en 2009, l'idée du "logement d'abord", selon laquelle avoir un toit est une condition préalable et nécessaire à l'insertion. Or, cette mesure s'inspire d'expériences mises en place en Finlande, au Royaume-Uni, en Norvège ou en Irlande.
Abandonner le métier unique
Le rapport consacre aussi des développements importants à l'amélioration de l'accompagnement des demandeurs d'emploi en France. Après enquête chez les Britanniques, les auteurs mettent en avant l'autonomie des conseillers au Royaume-Uni, qui peuvent, au-delà de leur travail d'aide au retour à l'emploi, délivrer des aides au logement ou au paiement des impôts locaux et décident eux-mêmes de la fréquence des contacts avec le demandeur d'emploi.
De leur côté, les conseillers allemands seraient des experts du bassin d'emploi local et proposeraient les aides qu'ils jugent les plus utiles au demandeur d'emploi, toujours selon le document. Quant aux conseillers suédois de l'équivalent de Pôle emploi, ils auraient également une grande autonomie pour définir les besoins du demandeur d'emploi, indiquent les auteurs.
C'est pourquoi les rapporteurs suggèrent notamment de "renforcer les compétences et l'autonomie" des conseillers de Pôle emploi en France. Ils proposent en particulier de renoncer au "métier unique" sur lequel la France "fait fausse route". A l'instar de ce qui est fait au Royaume-Uni, il s'agirait de proposer au demandeur d'emploi d'avoir deux contacts au lieu d'un. Un conseiller pourrait l’assister dans l'élaboration de son projet professionnel et l'autre vérifier qu'il respecte ses obligations dans sa recherche. Par ailleurs, le rapport propose de renforcer la formation initiale des conseillers et de développer leur expertise sur les bassins d'emplois.
Il faut changer le fonctionnement de Pôle emploi, notamment pour "réduire les risques psychosociaux aujourd'hui croissant", ajoute le rapport. "La mécanique administrative doit être (...) décentralisée pour donner plus de souplesse aux antennes et aux agents (...) car qui, mieux qu'eux peut (...) connaître les besoins des demandeurs", conclut le président de l'Unedic Gaby Bonnand.