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Environnement - Le comité permanent pour la fiscalité écologique est installé

Le thème de la fiscalité écologique a fait un retour en force ce 18 décembre avec l'installation d'un comité permanent sur le sujet, mis en place à l'initiative du ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, et de la ministre de l'Ecologie, Delphine Batho. Présidé par Christian de Perthuis, professeur à l'université Paris-Dauphine et spécialiste de l'économie du climat, ce dispositif de concertation et d'évaluation a été promis lors de la conférence environnementale de septembre 2012 pour "verdir" le système fiscal français. Plus récemment, le gouvernement a affirmé dans son "Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi" que 3 milliards d'euros de fiscalité écologique seront dégagés à l'horizon 2016 pour contribuer au financement d'un crédit d'impôt pour les entreprises. Il s'agit aujourd'hui de "tirer les leçons des échecs passés", comme l'abandon de la taxe carbone en 2010, a souligné Delphine Batho devant la presse. Cette taxe avait été défendue par le gouvernement Fillon en 2009 avant d'être reportée sine die en 2010 après une censure du Conseil constitutionnel. L'objectif est maintenant de "mettre fin à une anomalie française qui est le fait que nous sommes aujourd'hui avant-derniers en Europe en matière de fiscalité environnementale", a rappelé la minsitre de l'Ecologie.
Le nouveau comité mis en place ce 18 décembre devra donc à la fois formuler un avis sur les mesures fiscales écologiques proposées par le gouvernement et avancer ses propres propositions en la matière. "Ce n'est pas un comité d'experts mais un comité de parties prenantes", a souligné Christian de Perthuis. Composé de 40 élus et représentants de l'Etat, des associations, entreprises, salariés et collectivités – l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France, l'Assemblée des communautés de France et l'Association des maires de France y sont représentées -, il se réunira quatre fois par an, avec deux échéances importantes : en juin, pour proposer des mesures qui pourront être incluses dans le projet de loi de finances qui sera alors en préparation et en septembre, pour l'élaboration d'un rapport annuel qui sera discuté lors de la conférence environnementale. Entre les séances plénières, dont la prochaine aura lieu le 28 mars 2013, des groupes de travail se réuniront le 30 janvier prochain sur le thème de l'économie des ressources énergétiques et des écosystèmes, le 28 février sur celui de l'énergie-climat (émissions de CO2 d'origine énergétique, fluides frigorigènes fluorés) et le 14 mars sur les pollutions, la gestion de l'eau et les déchets. Les discussions sur l'énergie seront articulées avec celles du volet financement du débat national sur la transition énergétique, a assuré Delphine Batho. Le comité pourra aussi s'appuyer à tout moment sur un groupe d'experts dont feront notamment partie Jacques Weber (économiste au Cirad), Philippe Billet (professeur de droit public), et probablement Guillaume Sainteny (École polytechnique).

"Un chemin de crête assez étroit"

"Le gouvernement donne toute latitude et toute liberté" au comité, a affirmé la ministre de l'Ecologie. "Il doit être clair pour tout le monde que le travail de ce comité est assez audacieux", a admis Christian de Perthuis. "Le gouvernement nous demande d'être créatif, d'avoir un rôle de concertation et d'aiguillon", a-t-il ajouté. Le comité devra "répondre aux besoins de court terme et préparer la transition de long terme", estime l'économiste. "J'insiste sur la notion de temps et de durée. C'est un temps qui dépasse celui d'une loi de finances, d'une mandature même." Mais le président du comité reconnaît emprunter "un chemin de crête assez étroit". Il rappelle ainsi la censure, à deux reprises, d'une fiscalité carbone par le Conseil constitutionnel sous les gouvernements de Lionel Jospin et François Fillon, et le problème "non d'acceptabilité sociale mais d'adhésion sociale", qui peut être réglé par des "méthodes de compensations efficaces économiquement et justes socialement". Les réformes doivent donc être consensuelles politiquement, a insisté l'universitaire, afin de ne pas être remises en cause à chaque alternance.
Pour Christian de Perthuis, la fiscalité écologique "n'est pas une fiscalité de rendement", mais "doit changer les comportements". Elle ne doit pas être un prélèvement supplémentaire et son assiette est appelée à s'éroder, même si on peut jouer sur son taux. "L'idée est de changer un impôt qui pèse sur les facteurs de production par un impôt vert. Cet effet de substitution évite qu'il y ait un impact sur l'économie", assure-t-il.
Il ne se dit pas favorable au développement des bonus-malus qu'avait proposés François Hollande lors de la conférence environnementale : "Cela peut être efficace pour certaines choses, mais il ne faut pas en faire une règle générale. " Leur défaut est de fonctionner "en vase clos". "Il est difficile de faire une réforme fiscale avec des bonus-malus les uns à côté des autres."
A ses yeux, l'un des "grands enjeux" du comité est la problématique "climat-énergie" : une contribution comme la taxe carbone aurait une assiette suffisamment large pour atteindre les trois milliards de recettes fiscales liées à l'écologie attendues par le gouvernement à l'horizon 2016. Les autres enjeux sont l'intégration de la protection des écosystèmes – "des enjeux très importants à long terme, mais à court terme cela ne rapportera pas une somme spectaculaire" - et la fiscalité locale (déchets, urbanisme et eau).
 

 

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