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Emploi - Le CEE s'interroge sur le devenir des maisons de l'emploi

Dans une note diffusée le 27 février, le Centre d'études de l'emploi (CEE) s'interroge sur le devenir des maisons de l'emploi. Au coeur des difficultés identifiées : une hésitation récurrente entre un modèle dépendant des territoires et la volonté de l'Etat d'utiliser ces structures dans un objectif national. La réforme territoriale apportera-t-elle un début de clarification ?

Les maisons de l'emploi sont-elles en passe de disparaître ou bien le projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (Notr) sera-t-il l'occasion pour elles de retrouver une légitimité ? La question est posée dans une note du Centre d'études de l'emploi (CEE) réalisée en janvier et diffusée le 27 février.
Le CEE revient sur les évolutions de ces structures depuis leur création en 2005 : trois cahiers des charges différents, allant jusqu'à limiter leurs missions à seulement deux axes, une réduction de leur nombre (de 300 maisons de l'emploi prévues initialement à 164 en 2015) et une réduction drastique des fonds qui leur sont alloués par l'Etat (de 85 à 36 millions d'euros de 2010 à 2014), trois rapports dont les conclusions sont très divergentes. L'un, celui de l'Igas publié en 2013, proposant de renforcer la place de l'Etat et de limiter le rôle des maisons de l'emploi ; l'autre, le rapport Iborra de 2013, préconisant à l'inverse de renforcer le rôle des collectivités territoriales, et le dernier, réalisé par l'ex-conseil national de l'emploi pour la DGEFP en 2014 (rapport Bouillaguet) proposant de maintenir ces structures indispensables pour la mise en oeuvre de projets territoriaux !
Au coeur des difficultés des maisons de l'emploi : leur positionnement initial, "entre un modèle dépendant des territoires, avec toute la souplesse que cela implique, et une volonté de l'Etat d'utiliser ces structures dans un objectif national." Ainsi, ces structures ont été créées par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, dite loi Borloo, pour organiser le rapprochement entre le service public de l'emploi (Etat, réseau des Assedic, ANPE) et ses partenaires à l'échelle locale (collectivités locales, missions locales). Elles étaient portées par les collectivités territoriales, qui définissaient leur architecture et leurs activités. L'idée était bien de simplifier la vie des chômeurs par un guichet unique. Mais les dés étaient pipés dès le départ, car, comme le souligne le CEE, la compétence "emploi" n'a pas été transférée aux élus locaux. Une absence de transfert qui a entretenu l'ambiguïté voire la contradiction. La fusion des Assedic avec l'ANPE donnant naissance à Pôle emploi a encore mis en difficulté les maisons de l'emploi, les privant, dans le cadre d'un deuxième cahier des charges, de la mission d'accompagnement et de placement des demandeurs d'emploi. Au même moment, il a été décidé que leurs plans d'actions devaient être validés au conseil régional de l'emploi présidé par les préfets de région... Un troisième cahier des charges, élaboré en 2013, a finalement restreint leurs missions à seulement deux axes : l'anticipation des mutations économiques et le développement local de l'emploi…

"L'Etat ne laisse pas suffisamment de latitude aux acteurs locaux"

Pour le CEE, il est compliqué pour les maisons de l'emploi de réaliser le lien entre les politiques nationales et les spécificités locales. "L'existence d'un cahier des charges décidé unilatéralement au niveau national pour penser le développement local de l'emploi, constitue, à tout le moins, un paradoxe", estime ainsi le CEE dans sa note, poursuivant : "On ne peut que souligner la contradiction qu'il y a à demander aux maisons de l'emploi qu'elles se conforment à un cahier des charges unique, tout en continuant d'invoquer le territoire comme échelle pertinente d'action pour lutter contre le chômage." Malgré la volonté initiale, le CEE constate que l'Etat ne laisse pas suffisamment de latitude aux acteurs locaux, générant des coopérations qui sont parfois fructueuses mais aussi conflictuelles entre la direction des maisons de l'emploi d'un côté, et l'Etat et Pôle emploi de l'autre. L'instabilité budgétaire et l'absence de cultures professionnelles communes entre élus et services déconcentrés de l'Etat favorisent aussi les difficultés, signale le CEE.
Se limitant à indiquer les points de blocage, sans donner de préconisations sur le positionnement des maisons de l'emploi, le CEE estime simplement qu'il faut poursuivre les évaluations pour mieux appréhender les effets de leur mise en place dans les territoires et statuer plus efficacement sur leur sort. D'après le centre, ces évaluations doivent être réalisées sur la base d'éléments qualitatifs et d'objectifs fixés par les acteurs locaux, et non exclusivement par les grands corps d'Etat, et mobiliser l'ensemble des parties prenantes, y compris les publics concernés.
Les discussions en cours sur le projet de loi Notr apporteront peut-être elles aussi leur lot d'éclaircissements. Un amendement gouvernemental a été adopté le 20 février 2015 en séance publique à l'Assemblée nationale, autorisant la possibilité, pour les régions qui le souhaitent, de se voir transférer par l'Etat la coordination des intervenants du service public de l'emploi, hors Pôle emploi, à titre expérimental pour une durée de trois ans… L'amendement mentionne bien, parmi ces intervenants, les maisons de l'emploi.

 

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