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Emploi aidé - Le CAE-passerelle, le nouveau contrat jeune pour les collectivités

Au cours d'une cérémonie à laquelle il avait invité quinze maires, le secrétaire d'Etat chargé de l'emploi a donné un coup d'accélérateur au CAE-passerelle, le nouveau contrat aidé destiné aux jeunes. Le gouvernement en attend 30.000 d'ici la fin de l'année. Les premières collectivités se montrent intéressées, mais prennent le temps de peaufiner leurs dossiers. Enquête.

La mairie de Marcq-en-Baroeul vient de recruter trois jeunes en contrat d'accompagnement vers l'emploi (CAE) dit "passerelle", un nouveau dispositif que le secrétaire d'Etat chargé de l'emploi, Laurent Wauquiez, a inauguré fin juin dans la commune située dans l'agglomération lilloise. "Les services techniques avaient l'habitude de prendre des contrats aidés", explique-t-on au service formation. "Ils n'ont donc pas hésité à accueillir ces jeunes" qui travailleront 24 heures par semaine pendant un an sous la responsabilité d'un tuteur, respectivement au service de la voirie, à la menuiserie et au bureau d'études. A terme, la municipalité compte recruter une douzaine de jeunes par cette voie.
La mairie de Villefranche-sur-Saône - ville où le premier CAE-passerelle a été signé - compte quant à elle embaucher cinq jeunes sous ce dispositif. Ceux-ci auront des missions dans des domaines variés, comme les espaces verts, l'administration générale, la communication, ou la bureautique, souligne-t-on au cabinet du maire.
Dernier né des contrats aidés, le CAE-passerelle fait partie des mesures du plan pour l'emploi des jeunes présenté en avril. Au cours du second semestre 2009, le gouvernement veut créer 30.000 contrats de ce type au bénéfice des 16-25 ans, tous niveaux de diplômes confondus (et donc y compris de jeunes diplômés). Ceci, alors que le CAE classique est destiné à toutes les tranches d'âge mais vise en revanche avant tout des personnes sans diplôme ou qualification.
Les jeunes qui ont du mal à obtenir une situation professionnelle stable seront embauchés en priorité dans les collectivités locales pour "développer ou consolider des compétences transférables" vers le privé. C'est l'une des clés du dispositif, le distingue en principe là encore des CAE classiques dont la philosophie est de "répondre à des besoins collectifs non satisfaits" mais qui ont révélé leurs limites. "Lorsqu'on a constitué la police municipale, témoigne Jean-Pierre Door, député-maire de Montargis, on a embauché des CAE, dont un certain nombre ont été titularisés. Mais beaucoup d'autres n'ont pas pu être embauchés et ont dû partir eux-mêmes à la recherche d'un emploi." Plus sophistiquée, la nouvelle génération de CAE est beaucoup plus centrée sur les besoins du secteur privé et doit garantir aux jeunes un emploi à la sortie.

"Carte de visite"

De ce fait, les collectivités doivent, en amont des recrutements, définir le mieux possible les tâches qu'elles vont confier aux jeunes. Non seulement en fonction de leurs besoins, mais aussi en prenant en compte les besoins des entreprises locales avec l'aide de Pôle emploi et parfois de la mission locale.
Natacha Bouchart, maire de Calais, pense y être parvenue : "Nous allons proposer des postes enrichissants, qui vont permettre aux jeunes de réellement valider une année d'expérience professionnelle qui correspond à leur diplôme et à leur souhait de carrière", se félicite-t-elle. "On a choisi de leur confier les métiers les plus porteurs pour pouvoir leur donner une chance de postuler dans le privé", poursuit l'élue. La mairie de Calais va ainsi d'ici septembre recruter 30 jeunes en CAE-passerelle : des agents d'accueil, des assistants pour plusieurs services administratifs, un technicien en informatique. D'autres jeunes vont intégrer le service petite enfance et d'autres auront des missions en lien avec le développement durable. "On a mis en place les conditions d'un vrai recrutement en définissant la mission globale, le profil, les contraintes, etc.", explique Natacha Bouchart.
"On avait de réels besoins", déclare de son côté la directrice des ressources humaines de Montargis, ville du Loiret qui, d'ici quelques jours, aura recruté trois jeunes en CAE-passerelles. L'un d'eux a une formation d'électricien, mais n'a pas encore d'expérience professionnelle. Son poste, "c'est du sérieux" : après le départ d'un électricien, la mairie en avait "besoin d'un autre". Un jeune va aussi avoir pour mission de servir des repas aux 150 pensionnaires d'un foyer. "C'est un poste réel", souligne encore la DRH. Le but est qu'à la fin de leur contrat, les jeunes s'orientent vers le secteur marchand avec "une vraie carte de visite" en poche, commente le député-maire, Jean-Pierre Door, qui se trouvait le 15 juillet à Paris autour de Laurent Wauquiez avec quatorze autres maires pour promouvoir le CAE-passerelle.

"Un sas"

Si les collectivités s'emploient à proposer de vrais postes aux jeunes en insertion, elles ne sauraient cependant pourvoir ainsi des postes vacants. Les CAE "ne prennent la place de personne", affirme-t-on d'ailleurs clairement dans toutes les collectivités. "Il n'y avait pas de projet de recrutement sur les emplois CAE", explique le maire de Calais. "Ce n'est pas un recrutement caché", affirme pour sa part Sophie Rocher, assistante parlementaire du député-maire de Marcq-en-Baroeul.
Le but est qu'à la fin du contrat, d'une durée d'un an, le bénéficiaire trouve un emploi dans le secteur marchand. "Quand on recrute les gens, on leur dit clairement dès le début qu'on ne les recrutera pas chez nous", commente Sophie Rocher. D'ailleurs, le CAE peut être interrompu à tout moment si le jeune a trouvé un emploi stable dans le secteur privé avant la fin de son contrat. Car alors, l'objectif a été atteint. Pour accroître leurs chances de décrocher un emploi, les jeunes devront d'ailleurs effectuer régulièrement au cours de leur contrat des stages d'immersion en entreprise, comme dans le cadre des CAE classiques. Les entreprises qui accueillent les jeunes ont été choisies "parce qu'elles sont susceptibles d'embaucher", précise Jacqueline Kopp, directrice de l'antenne Pôle emploi de Saint-Avold, en Moselle.
Entreprises, Etat, collectivités : tous les acteurs sont engagés dans le dispositif. La collectivité exerce en particulier un "devoir civique" essentiel en cette période difficile, résume le cabinet du maire de Villefranche-sur-Saône. La collectivité offre à un jeune un "sas intelligent", commente de son côté Sophie Rocher.
Si la démarche est "gagnante" pour le bénéficiaire, elle l'est aussi pour la collectivité, qui n'est pas totalement désintéressée. En finançant le salaire du jeune à 90%, l'Etat offre l'opportunité de renforcer les équipes locales à peu de frais. "Sans l'embauche d'un CAE, on n'irait pas aussi vite dans la refonte du site internet", reconnaît le directeur général des services de la ville de Saverne.

Thomas Beurey / Projets publics