Accès aux soins - Le "bouclier sanitaire" ne pourra pas être mis en oeuvre avant 2010
Raoul Briet et Bertrand Fragonard ont remis, le 27 septembre, leur rapport sur le bouclier sanitaire à Roselyne Bachelot-Narquin, la ministre de la Santé, et à Martin Hirsch, le haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté. Ce dernier est d'ailleurs à l'origine du lancement de la mission, le 10 juillet dernier, en réponse aux réticences exprimées sur le principe des franchises de remboursement. Bien que les délais très courts n'aient pas permis d'approfondir certains sujets comme les restes à charge hospitaliers, ce document offre néanmoins une vision très précise des forces et faiblesses d'un tel dispositif. Les auteurs estiment que cinq objectifs pourraient être fixés à la mise en place d'un bouclier sanitaire : une meilleure protection pour les ménages les plus modestes (souvent dépourvus de protection santé complémentaire), un ciblage "objectif et plus équitable" de la pris en charge à 100% pour les affections de longue durée (ALD), un meilleur pilotage de l'évolution des dépenses d'assurance maladie, une amélioration du suivi des malades chroniques et une simplification de la prise en charge.
Pour vérifier la pertinence du bouclier sanitaire au regard de ces objectifs, la mission a procédé à plusieurs simulations en fonction de diverses hypothèses : un bouclier "soins de ville" - modulé ou non en fonction du revenu - et un schéma de repli, avec deux taux de ticket modérateur. Sans se prononcer ouvertement pour une solution, le rapport laisse néanmoins entendre que la seconde hypothèse est la plus réaliste. La première supposerait en effet l'application d'un taux unique de ticket modérateur et donc la suppression de l'exonération totale du ticket modérateur en cas d'ALD. Une telle mesure serait évidemment mal perçue par les millions de bénéficiaires d'une prise en charge à 100%. En ce qui concerne l'articulation entre le bouclier sanitaire et les franchises de remboursement, les rapporteurs se prononcent en revanche très clairement en faveur d'une inclusion des franchises dans le bouclier. Ils passent également en revue les autres impacts possibles du bouclier sanitaire, notamment sur la consommation de soins (avec un impact "globalement faible") et sur la CMU complémentaire et l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS). Ils en concluent que la réforme n'impliquerait pas nécessairement de modifier les règles de fonctionnement de la CMU-C, mais qu'il serait en revanche envisageable de supprimer l'ACS, rendue inutile dans l'hypothèse où le plafond du bouclier sanitaire serait modulé avec le revenu et fixé à un niveau bas pour les revenus modestes.
Dès la remise du rapport, Roselyne Bachelot-Narquin et Martin Hirsch ont indiqué, dans un communiqué, que "le gouvernement se félicite de la qualité de l'expertise du rapport Briet-Fragonard". Selon les ministres, "le sujet du bouclier sanitaire trouvera toute sa place dans la concertation qu'entend mener le gouvernement, à la suite des orientations du président de la République, sur la place de la solidarité et de la responsabilité individuelle". Le communiqué rappelle toutefois que d'importants travaux préalables seraient nécessaires à la mise en place du bouclier sanitaire, qui ne pourrait intervenir, en tout état de cause, avant le 1er janvier 2010.
Jean-Noël Escudié / PCA