Fibre optique - L'Avicca en faveur d'une taxe pour le financement du fonds d'aménagement numérique

"L'utilisation d'un milliard du grand emprunt permet d'amorcer le fonds d'aménagement numérique du territoire (Fant), ce qui est très positif, mais couvre moins d'un dixième des besoins globaux. L'alimentation pérenne du fonds est indispensable pour limiter la nouvelle fracture numérique qui commence, celle du très haut débit", défend Yves Rome, le président de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca). Dans sa contribution à la mission du sénateur Maurey, mise en ligne ce 28 juin, l'Avicca propose donc une taxe sur le secteur des communications électroniques, comme celle finançant l'audiovisuel public. "Le secteur est dynamique, et la part des dépenses afférentes dans le budget des ménages et des entreprises ne cesse d'augmenter. Il serait possible que la taxe figure explicitement sur les factures, pour participer à la nécessaire pédagogie sur ce prélèvement. Il est de l'intérêt commun, y compris pour un habitant dans une zone dense fibrée, de pouvoir communiquer avec un contact en n'importe quel point du territoire", justifie l'association qui regroupe 196 adhérents : 50 villes, 55 communautés urbaines ou d'agglomérations, 20 syndicats de communes, 52 structures départementales et 19 régionales. Cette taxe pourrait être perçue sur le fixe comme sur le mobile. "En effet, les réseaux mobiles ont des coûts de déploiement relativement faibles et des recettes élevées, ce qui permet de répartir la charge. De plus, les réseaux mobiles ont besoin des réseaux fixes, car d'une part ils seraient incapables d'absorber les volumes de trafic permis par le fixe, et d'autre part les réseaux fixes en FTTH joueront sans doute un rôle pour évacuer les trafics mobiles", détaille l'Avicca dans sa contribution écrite.

 

Dans l'attente d'un tarif social pour le triple play

La position du bras technique des associations de collectivités (AMF, ADF, ARF) rejoint justement celle exposée pour la première fois en public par Hervé Maurey lui-même, à l'occasion des 4es Assises du très haut débit, le 16 juin dernier. Le sénateur de l'Eure, chargé par le gouvernement d'une mission sur le financement du Fant début mars, y avait rappelé la hauteur des enjeux du déploiement de la fibre optique en France : 30 milliards d'euros d'investissement dont 8 à 10 milliards de fonds publics sur 15 ans. "Attention, l'Etat ne sera pas le seul à participer. L'Europe pourrait apporter 100 millions d'euros par an. Et les collectivités - qui se sont déjà mobilisées à hauteur de 300 à 400 millions par an pour le haut débit - devront y contribuer même si des incertitudes pèsent sur leurs capacités d'investissement dans le contexte économique actuel. Mais à l'exemple de la Savoie, les conseils généraux pourraient mettre moins d'argent sur les routes et plus sur les autoroutes de l'information !", avait prévenu l'élu local de Bernay. "La taxe sur l'audiovisuelle de 0,9% devrait rapporter environ 300 millions d'euros par an. Pour la fibre, il faudrait trouver environ 500 millions par an : ce qui reste modeste compte tenu des enjeux. Si nous augmentons le coût de l'abonnement de 2 euros par mois, sur 25 millions d'abonnés, nous récolterons 600 millions par an. C'est ce qui a été fait avec le fonds d'amortissement des charges d'électrification (Facé)", avait ensuite chiffré Hervé Maurey. Certains, notamment parmi les opérateurs ou les représentants des consommateurs, ont d'ailleurs bien vu dans la lettre de mission du gouvernement la chronique d'une taxe annoncée : "Forcément la réponse à la pérennisation du Fant est dans la question !" Hervé Maurey avait par ailleurs indiqué "réfléchir à la question controversée d'inclure le haut débit dans le service universelle du téléphone, comme le permet désormais le droit européen". Tandis que la secrétaire d'Etat au numérique a déjà annoncé, à plusieurs reprises, préparer "un tarif social, autour de 20 euros, pour une offre triple play (internet, téléphone, télévision) probablement à la rentrée". Peut-être, une façon d'inciter les fournisseurs d'accès à internet à rester raisonnables dans la répercussion de cette nouvelle taxe ou probablement pour ne pas se mettre à dos les associations de consommateurs et celles qui oeuvrent en faveur de la réduction de le fracture numérique sociale ? "Ces deux euros sont donnés à titre illustratif. Les conclusions ne sont pas rendues et je ne les ai pas encore !", a précisé le sénateur. La remise de son rapport était prévue, a priori, pour fin juillet. Mais ses propositions pourraient bien passer l'été au chaud dans l'attente d'arbitrage politique en septembre.

 

Luc Derriano / EVS