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Logement - L'Assemblée réagit vivement à la remise en cause par Bruxelles des aides françaises à l'investissement locatif

La réaction n'a pas été longue. Alors que la Commission européenne vient d'adresser au gouvernement un "avis motivé" remettant en cause le dispositif français des aides fiscales à l'investissement locatif (voir notre article ci-contre du 17 février 2011), l'Assemblée nationale a réagi d'une façon inaccoutumée. Sur proposition de son président, le député des Yvelines Pierre Lequiller, la commission des affaires européennes - commission non permanente chargée d'une mission d'information et de contrôle de l'activité européenne - a adopté, le 4 mars, une proposition de résolution, qui remet en cause l'avis motivé de la Commission européenne. Cette vive réaction constitue également une première juridique. Ainsi que le souligne l'Assemblée, c'est en effet "la première fois qu'une proposition de résolution est adoptée sur un avis motivé de la Commission européenne dans le cadre d'une procédure précontentieuse à l'encontre de la France".

Une première juridique


Cette prise de position de la commission des affaires européennes s'appuie sur trois arguments. Tout d'abord, elle estime que la demande de la Commission européenne sur la révision du système français d'aide à l'investissement locatif est contraire au principe de subsidiarité, dans la mesure où la politique du logement relève de la compétence exclusive des Etats membres. Elle la juge également contraire au principe de proportionnalité et rappelle que "les règles régissant l'impôt sur le revenu relèvent, en l'état, des Etats membres". Enfin, la commission des affaires européennes rappelle "que les accords visant à éviter la double imposition conclus par la France avec les Etats membres de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen réservent le droit exclusif d'imposer les revenus immobiliers à l'Etat dans lequel le bien est situé". Or Bruxelles conteste le fait que les dispositifs français d'aide à l'investissement locatif réservent le bénéfice de ces aides aux investissements locatifs réalisés sur le territoire français. Dans ces conditions, la commission des affaires européennes de l'Assemblée considère, dans une conclusion particulièrement sèche, "qu'aucun des arguments juridiques avancés par la Commission européenne n'est de nature à justifier une remise en cause des aides fiscales à l'investissement locatif".
La proposition de résolution doit maintenant être transmise à la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée. Celle-ci devrait adopter la même position que la commission des affaires européennes, prélude à l'adoption probable de la résolution par l'Assemblée. Le gouvernement ne devrait pas chercher à s'y opposer, puisqu'il a lui même fait connaître son irritation vis-à-vis de la prise de position de Bruxelles, s'étonnant en outre que celle-ci ne vise que la France, alors que d'autres pays européens disposent de dispositifs similaires d'incitation à l'investissement locatif (voir notre article ci-contre du 17 février 2011).

Jean-Noël Escudié / PCA