Culture - La tension monte chez les acteurs culturels
Après une période d'accalmie, le spectacle vivant pourrait bien devenir à nouveau un dossier sensible. Coup sur coup, deux organisations qui comptent dans le secteur viennent en effet de faire connaître leur mécontentement, sur deux sujets différents. La Cofac (Coordination des fédérations des associations de culture et de communication), tout d'abord, publie un communiqué sur la baisse des crédits consacrés à l'accès à la culture dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2010. Regroupant 21 fédérations et près de 30.000 associations à caractère culturel, la Cofac relève qu'"à la lecture du projet de loi de finances 2010, nous constatons pour la troisième année consécutive une baisse significative des crédits consacrés aux actions en faveur de l'accès à la culture (programme transmission des savoirs et démocratisation de la culture)". Ceux-ci passent en effet de 59,7 millions d'euros à 49,4 millions d'euro. Certes, comme le reconnaît d'ailleurs la Cofac, l'arrivée à terme du projet de Cité de l'immigration explique une bonne part de ce recul. Mais 4 millions d'euros correspondent en revanche à un recul net des financements, sous l'effet notamment "la quasi-disparition des crédits réservés aux pratiques amateurs". La Cofac estime aussi que "la montée en puissance des collectivités territoriales sur ces questions ne peut décharger l'Etat de ses responsabilités dans ce domaine régalien, [...] d'autant plus que le rôle et le financement des collectivités territoriales est actuellement redéfini".
C'est précisément sur ce terrain qu'a choisi de se situer le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac). Abandonnant un instant sa lutte contre le Conseil pour la création artistique (qui se fait au demeurant très discret), le Syndeac publie en effet dans plusieurs titres nationaux un encart intitulé "Les régions et les départements privés de culture ?". Il vise la réforme de l'organisation territoriale - curieusement qualifiée de "contre-réforme" - et plus particulièrement la possible introduction de la clause de compétence générale pour les régions et les départements. Le Syndeac estime que "si cette 'contre-réforme' était votée, les régions et les départements - et, par effet domino, les villes - seraient contraints de diminuer de manière catastrophique leurs aides à l'art et à la culture". S'ensuit un tableau apocalyptique, avec fermetures de théâtre de musées et de bibliothèques, disparition de compagnies et de festivals et démantèlement du réseau culturel extérieur français (qui n'est pourtant pas vraiment concerné par la réforme l'organisation territoriale). Avec, au bout du compte, la certitude que "la France va perdre une grande part de sa créativité et de son rayonnement". Le Syndeac formule par conséquent un ensemble de propositions, dont la mise en oeuvre d'un "vaste plan de relance et de développement pour l'art et la culture".
Si la forme est quelque peu hyperbolique, les inquiétudes exprimées par les acteurs culturels ne toutefois pas sans quelque fondement. Les difficultés viennent toutefois moins de l'Etat - les crédits du PLF 2010 affectés au spectacle vivant progressent de 0,4% - que des collectivités territoriales. Interrogé par l'AFP, le directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles du ministère de la Culture, a même affirmé : "Quant au gel de précaution, il existe pour tout le monde, mais le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand s'emploie à ce qu'il puisse être levé". Le secteur du spectacle vivant vit cependant assez mal le peu d'intérêt manifesté par le ministre de la Culture aux suites des entretiens de Valois, lancés par son prédecesseur. Pour leur part, les collectivités, confrontées à une sévère contraction de leurs recettes, ont incontestablement tendance à rogner sur leurs subventions. Les départements notamment, qui peinent à boucler leurs budgets, ne devraient pas se montrer très généreux en 2010.
Jean-Noël Escudié / PCA