Emploi - La proposition de loi sur les travailleurs détachés définitivement votée
Le Parlement a définitivement adopté le 26 juin 2014 par un ultime vote à l'Assemblée nationale la proposition de loi PS visant à renforcer la responsabilité des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordre dans le cadre de la sous-traitance et à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale. Le texte est destiné à renforcer les contrôles et les sanctions contre les entreprises qui recourent de manière abusive à des travailleurs détachés.
Les députés socialistes, écologistes et radicaux de gauche et centristes ont voté pour. Gilles Savary, député SRC de Gironde, et rapporteur de la proposition de loi a notamment salué les dispositions "équilibrées" du texte. Et Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, a pour sa part noté que "la France pousse son avantage en Europe" avec la loi, face à un "dumping social inacceptable." Les députés UMP se sont quant à eux abstenus, estimant que les sanctions encourues par les entreprises étaient trop lourdes. A l'inverse, le Front de Gauche, qui s'est également abstenu, plaidait pour une directive contraignante au niveau européen. Pour Jacqueline Fraysse, députée des Hauts-de-Seine, "responsabiliser le donneur d'ordres est une bonne disposition", mais "ce qui est proposé relève du cosmétique."
Le texte transpose en droit français, par anticipation, l'accord survenu en décembre 2013 au niveau européen et destiné à renforcer la directive sur les travailleurs détachés. Cette directive, qui date de 1996, impose que les règles du pays d'accueil, en matière de salaires et de conditions de travail, soient respectées lors du détachement d'un travailleur dans un autre pays de l'Union européenne. Les cotisations sociales restent quant à elles dues dans le pays d'origine du travailleur. Mais cette directive est souvent contournée. De nombreuses fraudes sont enregistrées sur le sujet, qui créent une concurrence déloyale : défaut de déclaration, non-paiement des salaires et des heures supplémentaires, dépassement de la durée légale du travail…
Pour remédier à ces fraudes, le texte instaure une liste noire sur internet. Les entreprises ayant été condamnées pour travail illégal à une amende seront intégrées à la liste, pendant deux ans, sur décision du juge. Et le juge pourra interdire le versement d'aides publiques pendant cinq ans à une entreprise condamnée pour travail illégal. Le juge peut ainsi donner "l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus de percevoir toute aide publique attribuée par l'Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements ou leurs groupements ainsi que tout aide financière versée par une personne privée chargée d'une mission de service public."
La proposition de loi prévoit aussi une principe de responsabilité solidaire. Ce principe permettra de poursuivre un donneur d'ordres pour des fraudes relevant d'un de ses sous-traitants qui a recours à des travailleurs détachés. Il sera appliqué à tous les secteurs fortement concernés par le détachement de travailleurs, comme l'agroalimentaire ou le transport, et non seulement au BTP, ce qui n'est que facultatif dans le compromis européen.
Enfin, un dispositif unique de solidarité financière est créé. Il sera applicable au donneur d'ordres et au maître d'ouvrage en cas de non-paiement du salaire minimum à un salarié d'un sous-traitant, qu'il soit détaché ou non.