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Personnes âgées et handicapées - La programmation de la réforme des tutelles fluctue au gré des annonces

Le feuilleton de la réforme des tutelles et des curatelles connaît un nouvel épisode, qui ajoute encore à la confusion sur ce dossier sensible.
Durant l'été 2006, le gouvernement indiquait avoir transmis au Conseil d'Etat le projet de loi correspondant, qui pourrait ainsi être examiné dès l'automne. Or le 14 septembre 2006, le ministre délégué aux Collectivités territoriales a affirmé devant le congrès de l'Assemblée des départements de France (ADF) qu'il faut "savoir faire une pause" dans les transferts. Brice Hortefeux indique ainsi avoir, avec Nicolas Sarkozy, "proposé et obtenu du Premier ministre que l'entrée en vigueur de cette réforme ne soit pas envisagée avant le 1er janvier 2009", tout en soulignant que "le principe de cette réforme est (...) assez largement partagé, avec évidemment les réserves d'usage en termes de compensation".
Ce nouveau report d'une réforme annoncée comme imminente depuis plusieurs années, a suscité aussitôt de vives réactions. Six associations - dont l'Union nationale des associations familiales (Unaf) et l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) - estiment qu'"un nouveau report de la réforme serait inadmissible" et font part de leur intention d'"interpeller le gouvernement sur le respect des engagements pris et sur son sens de la responsabilité".
Soucieux d'éviter une mobilisation associative - environ 700.000 personnes et leurs familles sont concernées par les diverses mesures de tutelle - le gouvernement a réagi rapidement, quitte à revenir sur les propos du ministre délégué aux Collectivités territoriales. Dans un communiqué commun, les ministres Philippe Bas et Pascal Clément viennent de confirmer que le projet de loi est actuellement soumis à l'avis du Conseil d'Etat. Ils affirment également que "conformément aux voeux du président de la République et aux engagements du gouvernement, ce projet de réforme sera présenté en Conseil des ministres cet automne et débattu avant la fin de la législature". Dans ces conditions, on imagine mal que l'application en soit différée au 1er janvier 2009. Ils précisent par ailleurs que "les situations de précarité et d'exclusion sociale, qui ne relèvent pas de la protection juridique, seront prises en charge grâce à des mesures d'aide et d'accompagnement social, mises en oeuvre par les départements et créées dans le projet de loi", ce qui laisse supposer de nouveaux épisodes.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Le CES se prononce à son tour sur la réforme des tutelles

Le Conseil économique et social (CES) a adopté ce 25 septembre un rapport et un avis sur la réforme des tutelles. Rappelant que de "nombreux rapports ont dénoncé les dysfonctionnements et les dérives de notre système de protection des majeurs vulnérables", le CES se prononce clairement en faveur d'une réforme rapide. Il estime en effet que le dispositif actuel n'offre pas de garanties procédurales suffisantes, est "insuffisamment contrôlé" et repose sur un "mode de financement de plus en plus coûteux et inégalitaire", avec une dépense évaluée à 517 millions d'euros.
Le CES souligne aussi le décalage entre la situation française et celle des principaux pays européens, qui ont tous bénéficié, depuis le début des années 90, d'une réforme de leurs systèmes de protection des majeurs. Pour le CES, la réforme doit se faire en France "en étroite concertation avec les conseils généraux".
Tout en rappelant que le principe de la compensation est inscrit dans l'article 22 du projet de loi, il juge nécessaire de "répondre aux interrogations légitimes des départements". Plus précisément, le CES "tient à souligner que le montant estimé des charges transférées, et les nouvelles compétences qu'elles nécessitent, mériteraient d'être affinés et réévalués au cours de la mise en oeuvre de la réforme, afin de tenir compte de ses effets induits qui ne peuvent faire l'objet de prévisions solides". Il suggère de charger la Commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) d'établir un bilan annuel des transferts de charges induits par la réforme.
Enfin, s'agissant des mesures d'accompagnement social qui seraient confiées aux départements, le CES propose de faire "appel à des services associatifs comme c'est déjà le cas pour la protection juridique des majeurs", considérant que "cela pourrait être de nature à limiter largement les contraintes de réorganisation induites par la réforme".