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Social - La précarité s'aggrave, les CCAS doivent s'adapter

L'Union nationale des centres communaux d'action sociale (Unccas) est réunie ces 27 et 28 septembre à Paris pour son 64e congrès avec, à l'attention des élus locaux et décideurs de l'action sociale locale, un intitulé volontairement large : "Des territoires innovants pour un développement social durable". Une vision chère, par exemple, à Véronique Fayet, deuxième vice-présidente de l'Unccas, vice-présidente du CCAS de Bordeaux : "La crise va nous obliger à innover et à revoir tous nos fonctionnements. Nous devons, par exemple, revoir la fonction de l'aide alimentaire, pour en faire un outil autre qu'un simple outil d'assistance." Ou comment "passer du bureau d'aide sociale à une politique de développement durable"... Et comment rappeler que l'un des trois piliers du développement durable, c'est bien le social. Les thématiques des forums thématiques qui se succèdent pendant ces deux jours au Palais des congrès témoignent de ce souci : les Agendas 21 et le rôle que peuvent y jouer les CCAS, les économies d'énergie et la précarité énergétique, l'accès à l'emploi, l'accès aux droits…
Une vaste enquête présentée en mai dernier par l'Unccas avait déjà confirmé que les CCAS et CIAS affichent aujourd'hui des champs d'intervention toujours plus étendus… et parfois inattendus, avec l'émergence de pratiques nouvelles en matière, par exemple, de santé, de soutien à la gestion budgétaire des ménages, d'accès à la culture ou de lutte contre l'illettrisme (voir ci-contre notre article du 23 mai, "CCAS : vous faites quoi dans la vie ?"). Une nouvelle enquête qui vient d'être rendue publique à l'occasion du congrès, réalisée avec la Gazette Santé-Social – la troisième édition d'un "baromètre" devant permettre de suivre les choses dans le temps – le dit elle aussi : 42% des CCAS/CIAS disent avoir fait évoluer leurs pratiques pour s'adapter à de nouveaux besoins, notamment en matière de modalités d'attribution de leurs aides. Ceci pour faire face à l'apparition de nouveaux publics et à un accroissement des demandes.

"Difficultés à faire face aux dépenses quotidiennes"

Titré "L'impact de la crise sur les demandes d'aide adressées aux CCAS/CIAS", ce baromètre témoigne en effet d'une forte augmentation des demandes : 83% des CCAS en font état, soit 8% de plus que l'an dernier. Autre constat : pour la première fois, les aides financières passent au premier rang des demandes d'aide qui augmentent, devant les demandes d'aide alimentaire (lesquelles continuent toutefois d'augmenter). Et si certaines demandes augmentent plus faiblement, ce n'est pas nécessairement parce que les besoins se tassent : ainsi, les demandes liées à des dispositifs tels que le Fonds solidarité logement (FSL) sont moins citées que l'an dernier, mais on peut y voir le "signe probable d'un épuisement de ces dispositifs ou d'un renoncement des ménages à les solliciter", explique l'étude.
Globalement, ce sont bien "les difficultés à faire face aux dépenses quotidiennes" qui incitent les usagers à se tourner vers le CCAS : 88% des répondants y voient le premier élément déclencheur des nouvelles demandes d'aide, soit 21% de plus que l'an dernier. Il s'agit en premier lieu des difficultés à payer ses factures d'électricité et son loyer, ou bien encore à payer les services municipaux comme la cantine ou le centre de loisirs. Les CCAS évoquent aussi tous ces cas où les usagers sont contraints de renoncer aux soins, n'arrivent pas à rembourser leurs crédits ou doivent rogner sur leurs dépenses d'alimentation. Bref, la crise a très clairement un impact en termes de précarisation.
Le baromètre met en outre l'accent sur une "dégradation de la situation des publics déjà fragilisés" par leur situation familiale, sociale ou générationnelle : familles monoparentales, personnes isolées, retraités, jeunes de 18-25 ans…
D'où, pour les CCAS, une nouvelle "offre" à mettre en place, de nouveaux partenariats à nouer, y compris sous forme de conventions – avec les fournisseurs d'énergie, avec les banques, avec les bailleurs sociaux, avec les médecins…

Des projets de réforme qui "menacent"

"Ce contexte de crise invite chacun, au niveau communal et intercommunal, à prendre ses responsabilités, notamment grâce à l'action quotidienne des CCAS et des CIAS", déclare l'Unccas... qui juge que le moment est donc plutôt mal choisi pour "menacer" la pérennité des CCAS. C'est en effet ainsi que l'Unccas - qui compte alerter les élus sur ce risque -, perçoit l'article 18 de la proposition de loi Doligé (la proposition de loi relative à la simplification des normes applicables aux collectivités) tendant à rendre facultative l'existence d'un CCAS (voir ci-contre notre article du 29 août). S'exprimant le 27 septembre devant la presse, Patrick Kanner, président de l'Unccas, a évoqué cette proposition de loi Doligé, mais aussi d'autres dossiers d'actualité. Des dossiers qui ne manquent pas. La dépendance d'abord, avec l'abandon de la réforme (pour Patrick Kanner, les acteurs qui s'étaient impliqués dans ce chantier estiment avoir "été traités avec mépris"). L'aide à domicile aussi avec, d'une part, un satisfecit quant à l'accord signé entre l'Assemblée des départements de France et les organismes gestionnaires, dont l'Unccas (voir ci-contre notre article du 22 septembre) et, d'autre part, peu d'enthousiasme quant à l'annonce gouvernementale du déblocage d'un fonds de 50 millions d'euros en faveur du secteur. "50 millions pour l'aide à domicile pour toute la France… Pour mon seul département du Nord, le manque à gagner sur le remboursement de l'APA par l'Etat est de 100 millions d'euros…", a relevé Patrick Kanner.
Autre sujet de préoccupation pour l'Unccas : la réforme de la tarification des soins infirmiers à domicile (SSIAD) censée entrer en vigueur en 2012. Son conseil d'administration a adopté, le 26 septembre à l'unanimité, une motion demandant le report de cette réforme. "Nous voulons une réforme, mais pas celle-là", a résumé Patrick Kanner. Car pour le conseil d'administration, "les CCAS/CIAS gestionnaires de SSIAD figurent parmi les plus grands perdants du projet de réforme".

C.M.

le Prix de l'innovation sociale locale a été décerné à QUATRE cCAS

Organisé pour la huitième année avec le soutien de La Banque Postale, le Prix de l'innovation sociale locale a été décerné, le 26 septembre, à quatre centres communaux d'action sociale (CCAS), lors d'une cérémonie organisée au Conseil économique, social et environnemental. 

Le CCAS de Blanquefot (33) obtient le 1er prix, d'un montant de 10.000 euros, pour son " atelier de cuisine nomade".
L'atelier de cuisine nomade est né sous l'impulsion combinée du chef étoilé, Thierry Marx, et du maire de Blanquefort, Vincent Feltesse, Le CCAS, porteur de la démarche, joue un rôle de coordination. Une formation, rémunérée et qualifiante, aux métiers de la cuisine de rue est ainsi proposée à des personnes orientées par Pôle emploi ou la mission locale. Le but est de les accompagner vers la création d'entreprise, tout en développant une cuisine saine, de qualité, et favorisant des circuits courts d'approvisionnement.
Le CCAS de Saint-Pierre de la Réunion (97) obtient le 2e prix, d'un montant de 7.000 euros pour son initiative " Nout péi, nout soley".
Le CCAS et l'Agence régionale de l'énergie (ARER) se sont rapprochés pour cette action de la lutte contre l'habitat insalubre et contre la précarité énergétique. Le CCAS coordonne les interventions financières et techniques des opérateurs et des partenaires pour l'amélioration de l'habitat (CAF, Fondation Abbé-Pierre). L'ARER réalise l'accompagnement technique sur le diagnostic énergétique personnalisé des foyers, la sensibilisation et l'information des familles et le suivi de la maîtrise des consommations d'eau et d'énergie. 10 familles ont expérimenté l'action au premier semestre 2011 et une trentaine d'autres sont concernées en ce second semestre. L'initiative s'inscrit dans le contexte énergétique particulier de la Réunion, où 67 % de la production électrique vient des énergies fossiles, et où l'approvisionnement électrique en continu de certains secteurs reste problématique.
Le CCAS de Grenoble (38) obtient le 3e prix, d'un montant de 5.000 euros pour ses " paniers solidaires".
D'abord expérimentée sur un quartier avant d'être étendue, l'action consiste en une distribution hebdomadaire de paniers de 3,5 kg de fruits et de légumes par l'intermédiaire des sept centres sociaux du CCAS. L'initiative vise tous les grenoblois et le prix du panier est déterminé selon le quotient familial du foyer bénéficiaire. L'expérience a été récompensée par la qualité de sa construction et de l'approche, avec à la fois un travail sur l'équilibre et l'éducation alimentaire, une tarification sociale bien construite, la prise en compte des circuits courts, la participation des usagers, l'appui sur les centres sociaux et la mixité sociale.
Le CCAS de Râches (59) reçoit le prix spécial communes de moins de 5.000 habitants, d'un montant de 4.000 euros, pour son dispositif d'échange équitable et solidaire
Dans le cadre de son dispositif d'aide alimentaire, le CCAS de Râches (2.800 habitants) récoltait auprès d'une grande surface, avec l'aide de bénévoles, des denrées rapidement périssables. De nombreux fruits ne pouvaient être redistribués car ils s'abîmaient durant le transport et devaient être jetés. L'idée du CCAS a été de fabriquer, avec la participation des bénéficiaires, des confitures avec les fruits ainsi récoltés et de proposer à la population de les échanger contre des denrées non périssables (café, pâtes, riz…) dans la galerie marchande d'une grande surface, où le CCAS tient un stand une fois par mois. Ce sont les bénéficiaires qui tiennent ce stand. Dès qu'une famille devient bénéficiaire d'un colis alimentaire, elle est invitée à venir faire quelques heures de bénévolat. Grace aux dons de particuliers désireux de faire profiter le CCAS de leur récolte personnelle ou des jardins fruitiers entretenus par le chantier d'insertion du CCAS, la palette de fruits utilisés permet parfois de confectionner jusqu'à 50 parfums différents de confiture.

C.F.