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Social - CCAS : vous faites quoi dans la vie ?

Des équipements petite enfance aux services d'aide à domicile pour personnes âgées, les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale affichent des champs d'intervention toujours plus étendus. Avec aujourd'hui une priorité : la lutte contre l'exclusion, qu'il s'agisse d'aide alimentaire ou, plus inattendu, de logement. L'Unccas vient de dresser un panorama d'autant plus bienvenu que plusieurs réformes pourraient avoir un impact sur le fonctionnement des CCAS et CIAS.

Depuis l'ère des bureaux d'aide sociale et de leurs colis alimentaires... les centres communaux d'action sociale (CCAS) et leurs homologues intercommunaux (CIAS) ont évidemment élargi leur champ d'action. Mais que recouvre ce champ précisément aujourd'hui ? Etant donné l'évidente hétérogénéité des pratiques et des moyens des uns et des autres, un état des lieux détaillé était le bienvenu. L'Union nationale des CCAS (Unccas) a ainsi présenté, lors d'une rencontre-débat organisée le 18 mai à Paris, les résultats d'un panorama des équipements et services gérés par les CCAS/CIAS. Une première.
Cette enquête, réalisée auprès de 3.299 CCAS/CIAS (sur les 3.827 établissements que l'Unccas fédère, soit un taux de réponse de 86%), confirme que les domaines d'intervention des CCAS sont étendus... et parfois inattendus. "Du fait de leur rôle de proximité, l'intervention des CCAS se construit souvent en réponse aux demandes qui leur sont faites et s'étend ainsi sur des champs qui ne sont pas forcément les leurs", explique à ce titre Marie Mallet, conseillère technique en charge de l'observation, de l'innovation et de l'expérimentation à l'Unccas.
En tout cas, les services et équipements des CCAS ou CIAS portent aujourd'hui pour principale bannière celle de "la lutte contre l'exclusion", domaine cité par 81% des répondants. Un intitulé certes large recouvrant à la fois l'aide alimentaire - laquelle est aujourd'hui encore en tête des actions menées (96%), qu'il s'agisse par exemple de bons alimentaires, de chèques d'accompagnement ou d'épiceries sociales – et des pratiques plus nouvelles : l'accès à la culture et aux loisirs, citée en deuxième position (ce que l'Unccas considère comme un fait marquant et presque surprenant), le soutien à la gestion budgétaire, l'insertion professionnelle, l'accès aux soins, le microcrédit ou la lutte contre l'illettrisme.
"La santé est, me semble-t-il, un domaine en train d'émerger. L'insertion professionnelle, elle, reste finalement assez peu développée", a estimé Véronique Fayet, deuxième vice-présidente de l'Unccas, vice-présidente du CCAS de Bordeaux, même si d'autres participants relevaient par exemple que certains CCAS s'impliquent dans ce domaine de l'insertion au point de "prendre la présidence de la maison de l'emploi." Concernant l'aide alimentaire, Véronique Fayet a fait savoir qu'un groupe de travail dédié a été mis en place au sein de l'Unccas, avec une enquête en cours et une journée de restitution programmée pour le 5 octobre. Parmi les enjeux identifiés : "Comment passer du bureau d'aide sociale à une politique de développement durable, sachant que l'aide alimentaire, c'est aussi prendre en compte les circuits courts, l'éducation à la santé, la lutte contre le gaspillage..."

Des "besoins détectés localement"

Autre axe d'action des CCAS sur cette large palette liée à "l'aide et l'accompagnement des ménages en difficulté" : le soutien en matière de logement et d'hébergement, que près d'un quart des CCAS/CIAS considèrent comme majeur. En sachant qu'il s'agit principalement pour eux d'apporter une réponse aux situations d'urgence. Et, souligne l'étude, d'intervenir par "une gestion de dispositifs plutôt que d'équipements" (même si certains CCAS sont propriétaires ou locataires de logements ou chambres gérés sous le régime de la convention allocation de logement temporaire). "L'importance de votre action dans le domaine du logement fait partie des surprises de cette étude", a d'ailleurs commenté Fabienne Debaux, venue le 18 mai représenter la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS, sous-direction des professions sociales, de l'emploi et des territoires), y voyant même "un élément à prendre en compte par la DGCS dans la refondation actuelle de la politique du logement".
Le deuxième grand champ traditionnel pour les CCAS est évidemment l'aide à domicile, qui reste bien un domaine privilégié, avec 52% des répondants déclarant gérer un ou plusieurs services à domicile. Le portage de repas, les services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) et les dispositifs de téléalarme (même si les CCAS ne sont généralement là qu'un partenaire parmi d'autres) sont les premiers cités, loin devant le transport adapté, l'aide aux petites travaux puis, pour environ 200 CCAS, les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Sans oublier un certain nombre d'initiatives parfois originales "menées de façon subsidiaire en fonction des besoins détectés localement" (accompagnement aux courses, portage de livres…).

Des personnes âgées à la petite enfance

Parler d'aide à domicile, c'est évidemment parler de services aux personnes âgées, dont les autres formes sont essentiellement la gestion d'établissements d'accueil et toutes les actions d'animation, de prévention et de coordination. La gestion d'établissements concerne 25% des répondants, essentiellement avec les logements-foyers, 57% des logements-foyers publics (soit 1.123 établissements) étant gérés par un CCAS ou CIAS. Mais aussi avec quelque 370 Ehpad (soit 6% des Ehpad du pays), essentiellement du côté des CCAS de territoires de moins de 10.000 habitants.
Pour les autres types d'actions en faveur des personnes âgées, on citera notamment la gestion de 719 foyers restaurants, la participation à la quasi-totalité des centres locaux d'information et de coordination (Clic). Sans oublier tout ce qui peut être fait en matière d'activités intergénérationnelles, de clubs d'aînés et autres ateliers divers et variés…
Enfin, le troisième grand terrain marquant l'activité des CCAS/CIAS est celui de la petite enfance, auquel on peut adjoindre pour certains (certes seulement 9% d'entre eux) des équipements et service enfance ou jeunesse. Côté petite enfance, on est loin de l'anecdotique : pas moins d'un établissement d'accueil de jeunes enfants sur cinq est géré par un CCAS ou CIAS, soit 1.200 établissements. Il s'agit majoritairement de structures multi-accueil, suivies par les relais assistantes maternelles. Puis par les haltes-garderies et crèches familiales. Assez logiquement, "les CIAS s'investissent proportionnellement davantage dans ce champ que les CCAS" (32% contre 14 %), relève l'Unccas.
L'Unccas s'est par ailleurs penchée sur d'autres points, tels que la participation des usagers (qui n'est apparemment pas encore vraiment rentrée dans les moeurs, avec seuls 8% des CCAS répondant disposer d'un outil en ce sens) ou la présence d'un travailleur social. Sur ce point, on saura que 35% des CCAS emploient un travailleur social – une moyenne qui cache toutefois de fortes disparités selon la taille de l'établissement, avec un taux de 100% pour les CCAS liés à un territoire de plus de 200.000 habitants. Du côté de la DGCS, Fabienne Debaux a estimé cette moyenne de 35% encore insuffisante. "Il faut professionnaliser", a-t-elle déclaré, Véronique Fayet précisant que selon elle, "la professionnalisation, ce n'est pas forcément le recrutement d'un travailleur social, car on compte par exemple des agents administratifs qui, du fait de leur expérience, sont très performants".

"Un arbitrage permanent entre proximité et moyens"

Sur bien d'autres données de l'étude, les moyennes masquent naturellement d'importantes "disparités" principalement liées à la taille – ou plus précisément à la démographie – du territoire couvert par le CCAS ou CIAS. Autrement dit, le plus souvent, le nombre de services disponibles croît avec le nombre d'habitants, "même si les petits territoires font aussi un effort de diversification", souligne Marie Mallet, évoquant "un arbitrage permanent entre proximité et moyens" et mettant en avant le rôle clef de l'intercommunalité sociale : "De façon fort logique, les CIAS sont surtout sur les plus petits territoires et sont surreprésentés parmi les établissements offrant à la fois des services à domicile et des équipements pour la petite enfance, ce qui confirme qu'ils permettent la mise en place d'équipements qui auraient été trop lourds sans l'intercommunalité."
Alors que "62% des intercommunalités disent faire du social", pour les petites intercommunalités, "il s'agit surtout de gestion d'équipements, notamment en matière de petite enfance, tandis que pour les plus grandes, on évoque surtout le logement", a précisé pour sa part Françoise Gatel, présidente de la communauté de communes du pays de Châteaugiron, venue représenter l'ADCF - l'ADCF qui publiait en septembre dernier avec l'Unccas une importante étude sur "les enjeux, les réalités et les perspectives d'évolution" de l'action sociale intercommunale.
La réforme en cours de la carte intercommunale ne pouvait qu'être évoquée ce 18 mai. Dans les départements où le nombre d'EPCI pourrait diminuer de moitié, "pour le CIAS, la question est de savoir comment grossir tout en maintenant la proximité", a ainsi résumé un participant.

"La DDCS, personne ne sait ce que c'est"

Les CCAS et CIAS sont également confrontés aujourd'hui à une autre réforme : la réorganisation de l'Etat en région. Avec, d'une part, les nouvelles ARS et, d'autre part, les nouvelles DRCS et DDCS, "le paysage territorial a beaucoup changé", a reconnu Fabienne Debaux, en tentant de résumer qui seront désormais les interlocuteurs des CCAS selon qu'il s'agisse de médicosocial ou de cohésion sociale, de champ ministériel ou interministériel, de prérogative départementale ou régionale... "Parmi tous les élus avec lesquels je travaille, je peux vous dire que la direction départementale de la cohésion sociale, personne ne sait ce que c'est", lançait en tout cas le représentant d'un CCAS. "Il est normal que l'on manque encore de visibilité", a convenu la représentante de la DGCS, précisant entre autres que la loi HPST "a prévu un référent social au sein des ARS" et que "des protocoles sont en train d'être signés entre les directions de la cohésion sociale et les ARS afin d'éviter tout risque de trou noir dans l'interstice entre santé et précarité".
Un troisième sujet d'actualité a été mis en avant par Daniel Zielinski, le délégué général de l'Unccas : le dossier des SIEG et du mandatement qui, "en vertu de la réglementation européenne, risque de nous interdire de verser des subventions à une association et donc de mettre à mal le partenariat avec le monde associatif".
A l'heure où la réforme des collectivités a beaucoup interrogé la répartition des compétences entre niveaux de collectivités, on relèvera enfin, comme l'a parfaitement reconnu l'Unccas, que le panorama proposé ne suffit pas à dresser le portrait de l'action sociale locale (par exemple pour interroger son articulation avec l'action départementale, absente des échanges le 18 mai). "Il y a une certaine perméabilité entre services communaux et services des CCAS ou entre intercommunalités et CIAS. On le sait bien, ce n'est pas parce qu'un CCAS ne propose pas tel service que la ville n'est pas présente dans ce domaine. Il y a aussi des actions conjointes et une part de mutualisation des moyens", a souligné Marie Mallet. Et le directeur d'un CCAS des Yvelines d'ajouter : "Sur certains territoires, le CCAS est considéré comme le service social de la ville, est très intégré, tandis qu'ailleurs, il est très autonome." Une "porosité de l'action sociale et de ses acteurs" qui concerne également les associations : tandis que le représentant d'un CCAS de la Haute-Saône expliquait ne pas intervenir sur l'aide à domicile parce que "cette mission est assurée par les associations telles que l'ADMR", Daniel Zielinski constatait au contraire que "notamment sur l'aide à domicile, sur certains territoires, les CCAS sont totalement seuls".

 

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