Développement des territoires - La croissance des régions en berne pour 2012
En 2012, la plupart des régions vont connaître une faible croissance, mis à part la Corse et Midi-Pyrénées, et deux régions, la Lorraine et la Picardie, vont rentrer en récession. C'est ce que révèle le cabinet Asterès dans une étude sur les prévisions de croissance régionales publiée le 21 mai 2012. "Ces évolutions sont le reflet des faiblesses de la croissance française", estime le cabinet, qui table sur un scénario de croissance pour la France en 2012, à 0,3% seulement. Et même pour les régions qui vont connaître une augmentation de leur PIB, la hausse sera faible : 1% pour la Corse, +0,9% pour Midi-Pyrénées, +0,8% pour l'Aquitaine et l'Auvergne. Viennent ensuite les régions Pays-de-la-Loire et Ile-de-France (+0,5%), Bretagne, Bourgogne, Poitou-Charentes et Provence-Alpes-Côte d'Azur (+0,4%), Centre, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Alsace, Languedoc-Roussillon et Limousin (+0,2%).
Pour la Lorraine et la Picardie, c'est la récession qui est donc annoncée, avec un recul respectif de leur PIB de 0,4% et de 0,1%. Ces régions souffrent surtout du déclin de la métallurgie, de l'automobile et du textile.
Le cabinet estime par ailleurs que les écarts entre régions vont avoir tendance à s'atténuer. "Dans les années 2000, on avait une séparation très nette entre les régions qui s'en sortaient bien et qui ne souffraient pas trop de la désindustrialisation, et celles qui la subissaient de plein fouet, explique à Localtis Juliette Hubert, du cabinet Asterès, ces divergences vont maintenant se creuser moins vite, car les régions les plus dynamiques le sont de moins en moins." Les régions jusque-là gagnantes perdent en effet du terrain. En premier lieu, les secteurs sur lesquels ces régions reposaient sont très concurrencés et perdent des parts de marché, notamment les secteurs de l'industrie agroalimentaire et de la pharmacie. Par ailleurs, les zones situées principalement à l'ouest et au sud de la France fondaient leur activité sur les migrations de population, qui généraient des investissements. Pour financer les infrastructures nécessaires pour satisfaire ces nouvelles populations, ces régions ont eu tendance à s'endetter et à se nourrir de la dépense publique pour développer les emplois publics. "Cette dynamique est maintenant perturbée du fait de la crise des finances publiques", précise Juliette Hubert avec un exemple en tête, celui du Languedoc-Roussillon. Cette région était plus dynamique que la moyenne, avec une croissance de son PIB de 1,5% en 2011. "Maintenant, elle n'est plus aussi dynamique", explique Juliette Hubert. Son PIB ne devrait progresser que de 0,2% en 2012.
Reste que ces estimations n'ont rien de définitif. L'Insee n'a pas encore publié l'évolution des PIB régionaux pour l'année 2010 et les incertitudes qui entourent le scénario de croissance pour la France (+0,3%) sur lequel le cabinet s'est basé sont fortes. "Les évolutions espagnoles et grecques peuvent nous amener à revoir cette prévision à la baisse. La récession serait alors plus forte en Lorraine et en Picardie. A l'inverse, une dépréciation significative de l'euro par rapport au dollar donnerait une bouffée d'oxygène à ces deux mêmes régions ainsi qu'aux autres régions exportatrices, et notamment à Rhône-Alpes, à l'Alsace, à la Franche-Comté", explique l'étude d'Asterès.
"Le gros point faible, c'est le manque de coordination"
En revanche, le cabinet Asterès, tout en restant très prudent, voit se dessiner un ralentissement du recul des emplois industriels. "Mais il est encore trop tôt pour être sûr, détaille Juliette Hubert, les emplois industriels baissent moins vite mais ils ont beaucoup baissé en 2009, on peut estimer que sans l'effet de la crise, et l'aubaine qu'elle a représentée pour certaines entreprises en termes de licenciements, cette baisse se serait étalée sur plusieurs années…"
Globalement, "l'ensemble des régions est aujourd'hui confronté à une même nécessité, celle de rehausser, enfin, notre compétitivité", estime le cabinet, qui préconise une meilleure territorialisation des politiques de compétitivité. Dans un document réalisé pour le compte de l'Association des régions de France (ARF), le cabinet livre ses propositions pour améliorer les performances économiques de la France. Premier point : la coordination de la stratégie économique. "L'acte III de la décentralisation devrait prévoir plus de compétences et plus de budget pour les régions mais le gros point faible c'est le manque de coordination, explique ainsi Juliette Hubert, l'action économique est une compétence de la région mais tout le monde en fait et quand la région définit une politique, elle n'est pas toujours suivie." Rendre les schémas régionaux de développement économique (SRDE) prescriptifs, fait partie des revendications du cabinet. "Comme il n'est pas prescriptif, il ne sert pas à grand chose, malgré son existence, un département peut faire ce qu'il veut." Autre recommandation : éviter les doublons. Le cabinet rappelle ainsi que ce sont les préfectures de régions qui gèrent le Fonds européen de développement régional (Feder), dont les budgets sont octroyés à des entreprises et à des collectivités territoriales, et qui instruisent les dossiers d'aides attribuées au titre du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac). "Il faudrait confier ces compétences à la région", précise Juliette Hubert, qui estime ainsi que certains investissements réalisés grâce au Feder, comme la construction de stades de foot ou de parkings d'hôpitaux, ne participent pas toujours à la croissance des régions…