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Petite enfance : la commission des 1.000 premiers jours fait ses propositions, les décisions attendront un peu

La "commission sur les 1.000 premiers jours de l’enfant", présidée par Boris Cyrulnik, a remis son rapport à Adrien Taquet le 8 septembre. Parmi les propositions, un "parcours 1.000 jours" d'accompagnement - que le secrétaire d'Etat juge opportun -, une augmentation des moyens des PMI, l’harmonisation de l’accueil des enfants avant 3 ans... et un congé paternité de 9 semaines. Là-dessus, le gouvernement se contente d'évoquer une possible réforme du congé parental. Certaines mesures pourraient prendre place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Le 19 septembre dernier, Emmanuel Macron lançait lui-même l'élaboration du "parcours 1.000 jours", en installant la "commission sur les 1.000 premiers jours de l’enfant", présidée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik (voir notre article ci-dessous du 19 septembre 2019). Cette attention portée par le chef de l'État s'inscrit dans le prolongement de sa préoccupation vis-à-vis des "inégalités de destin". Lors de sa conférence de presse du 25 avril 2019 pour présenter les conclusions du Grand Débat national, Emmanuel Macron avait ainsi affirmé que "les 1.000 premiers jours de vie d'un citoyen français sont décisifs sur le plan affectif, sur le plan cognitif. C'est là qu'on construit parfois le pire et qu'on peut bâtir le meilleur".

La période des 1.000 jours "recèle des enjeux considérables pour la société"

Initialement, la commission présidée par Boris Cyrulnik devait remettre ses conclusions en janvier ou février 2020. Mais les retards inhérents à ce type de démarche se sont combinés avec la crise sanitaire et le confinement pour bouleverser le calendrier. Le rapport a finalement été remis à Adrien Taquet le 8 septembre, à l'occasion de la visite du secrétaire d'État chargé de l'Enfance et des Familles dans une crèche d'Athis-Mons (Essonne), qui accueille en horaires décalés les enfants des salariés travaillant sur la plateforme aéroportuaire d'Orly. En principe, le chef de l'État devait se réserver les annonces avant la fin du mois de septembre. Mais, dans un communiqué du 9 septembre consacré à la remise du rapport, Adrien Taquet explique que "ces premières pistes doivent désormais se traduire en actes" et qu'"elles seront examinées dans les prochaines semaines", ce qui semble décaler les annonces.

Le rapport, très copieux, est le résultat des travaux d'un groupe de 18 experts de la petite enfance (neuropsychiatres, gynécologues-obstétriciens, pédopsychiatres, psychologues, sages-femmes, professeurs des universités), même s'il s'appuie aussi sur des échanges avec des parents. Cette parole scientifique, qui marque profondément le document, confirme que la période des 1.000 premiers jours – entendue comme s’étendant du 4e mois de grossesse aux deux ans de l’enfant – est "une période sensible pour le développement et la sécurisation de l’enfant, qui contient les prémisses de la santé et du bien-être de l’individu tout au long de la vie". Pour cette raison, et tout en se refusant au "déterminisme", le rapport considère que "la période recèle des enjeux considérables pour la société dans son ensemble et doit intéresser les pouvoirs publics".

Parcours 1.000 jours : une réponse individualisée et adaptée aux besoins de l'enfant et des parents

Face à ce constat, la commission Cyrulnik propose un ensemble de mesures, qui s'incarnent notamment dans la mise en place d'un "parcours 1.000 jours", conçu comme "une réponse individualisée, adaptée aux fragilités et spécificités de l’enfant et de ses parents". A ce stade, il ne s'agit encore que de préconisations mais, dans son communiqué, Adrien Taquet cite plusieurs recommandations "qui ont retenu l’attention du secrétaire d’État" et ont donc de bonnes chances de figurer dans les mesures adoptées

Semble ainsi actée la création d’un parcours des 1.000 jours – au cœur du rapport –, qui "comprendrait un accompagnement personnalisé commençant dès l’entretien du 4e mois, se poursuivant en maternité et jusqu’au domicile, et qui se renforcerait en cas de fragilités (handicaps, troubles psychiques ou fragilités sociales)".

Autre mesure qui "doit désormais se traduire en actes" : la généralisation de l’entretien prénatal précoce. Proposé (mais pas obligatoire) et pris en charge intégralement par l'assurance maladie, celui-ci ne concerne aujourd’hui que 28% des grossesses. En lien avec cette mesure, le gouvernement envisage une augmentation des moyens des maternités et des PMI, "afin que chacune des 500 maternités sur le territoire bénéficie d’un lien étroit et quotidien avec la PMI pour mieux accompagner les parents".

Allongement du congé de paternité, incertitude sur le congé parental

Une mesure phare résiderait également dans l’allongement du congé paternité. Celui-ci se ferait "dans l’intérêt du développement de l’enfant, mais également pour lutter contre la solitude et l’isolement des mamans", facteur de dépression post-partum. La durée du "congé de paternité et d'accueil de l'enfant" est actuellement de 11 jours consécutifs au plus pour la naissance d'un enfant (18 jours en cas de naissances multiples) et complète le congé de naissance obligatoire de trois jours, pris en charge par l'employeur. Actuellement, environ 70% des pères prennent un congé paternité.

Adrien Taquet se garde de citer la durée de ce que pourrait être un nouveau congé paternité, mais le rapport Cyrulnik préconise un congé de 9 semaines (63 jours), ce qui représenterait alors un coût important pour une assurance maladie déjà mal en point avec la pandémie, la perte de cotisations due à la crise économique et le financement des mesures du Ségur de la santé. La mesure serait plus coûteuse encore si elle se combine avec la proposition de la commission de revaloriser le congé parental, en le portant d'un peu moins de 400 euros à un minimum de 75% du salaire. Sur ce point, Adrien Taquet s'est bien gardé d'apporter des précisions, se contentant d'indiquer que l'allongement du congé de paternité constituerait la "première étape d’une réforme ambitieuse du congé parental".

Enfin, la dernière mesure citée par le secrétaire d'État chargé de l'Enfance et des Familles concerne la généralisation et l’harmonisation du projet éducatif de l’accueil des enfants avant 3 ans. Cette première sélection n'est toutefois pas limitative et le gouvernement pourrait reprendre à son compte d'autres préconisations du groupe de travail.

Quelle place pour les collectivités ?

Même si elles sont peu présentes dans le rapport – qui méconnaît assez largement leur rôle – les collectivités territoriales – et plus particulièrement les départements – sont directement concernées par les mesures concernant la PMI. Seules deux propositions les visent spécifiquement. La première prévoit qu'elles "devraient porter des expérimentations afin de tester des solutions innovantes en conditions réelles [sur l'accueil du jeune enfant et des parents, ndlr], y compris lorsque cela nécessite une dérogation règlementaire dans le cadre d’expérimentation". La seconde envisage une labellisation "bébé plus" (ou "1.000 jours") pour des villes, des initiatives ou des lieux amis des bébés, "qui développent des propositions partant des besoins fondamentaux des jeunes enfants".

Pour l'instant, le gouvernement n'a pas fixé de date pour l'annonce des mesures retenues. Quelques-unes pourraient toutefois figurer dans le projet de loi de financement de la sécurité (PLFSS) pour 2021. Sinon dans le texte initial – qui doit être déposé avant fin septembre – mais peut-être sous forme d'amendements introduits en cours d'examen du texte.

 

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