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Réfugiés - "Jungle" de Calais : le Conseil d'Etat rejette les recours de l'Etat et de la commune

Dans une ordonnance du 23 novembre 2015, le Conseil d'Etat rejette le recours de l'Etat (ministère de l'Intérieur) et la requête de la commune de Calais, qui demandaient notamment l'annulation d'une ordonnance du 2 novembre 2015 (référé liberté) du juge des référés du tribunal administratif de Lille ordonnant la mise en œuvre d'une série de travaux et d'aménagements en vue d'offrir des conditions de vie décentes et des conditions sanitaires minimales aux résidents de la "jungle" de Calais. Le juge des référés avait été saisi par les associations Médecins du monde et Secours Catholique-Caritas France, ainsi que par des migrants.

Un ensemble d'aménagements à mettre en œuvre immédiatement

En validant ainsi le référé du 2 novembre, le Conseil d'Etat confirme aussi les travaux ordonnés par le tribunal administratif de Lille. Celui-ci donnait ainsi 48 heures à l'Etat pour identifier les mineurs isolés étrangers (MIE) vivant sur le camp et se rapprocher du département du Pas-de-Calais en vue de leur placement. Le tribunal ordonnait aussi au préfet du Pas-de-Calais et à la commune de Calais toute une série de mesures liées à la création de points d'eau, à l'hygiène, à la collecte des ordures, au nettoyage du site, à l'accès des services d'urgence... ces différentes mesures devant "connaître un début de réalisation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte pour chacune d'elles de 100 euros par jour de retard".

Les arguments de l'Etat et de la ville de Calais écartés

Pour justifier sa requête contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille, la ville de Calais faisait valoir deux arguments. D'une part, "aucune carence dans l'exercice des compétences de la commune, constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale au droit des migrants installés sur la 'Lande' de ne pas subir des traitements inhumains et dégradants, n'est caractérisée".
D'autre part, "l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le juge des référés a reproché à la commune des carences en sa qualité de propriétaire du site de la Lande et fait ainsi abstraction du fait que cet espace est mis à la disposition de l'Etat qui, à ce titre, assume toute responsabilité liée à la gestion et à la sécurité du site". Deux arguments rejetés par le Conseil d'Etat dans son ordonnance du 23 novembre, de même que ceux avancés par l'Etat.

"Une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale"

Dans une argumentation très développée, le Conseil d'Etat rappelle notamment l'article L.345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles, prévoyant que "toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence [...]". Il estime que le non respect des obligations résultant de cette disposition "peut faire apparaître [...] une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour les personnes intéressées".
Plus largement - et même en l'absence de texte particulier -, "il appartient en tout état de cause aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine, de veiller, notamment, à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti".
L'argumentaire du Conseil d'Etat - qui procède à une description sans concession des conditions de vie au sein du camp ("odeurs nauséabondes", site "envahi par les rats", excréments des "toilettes sauvages" non évacués...) - consacre également un long développement aux projets et réalisations autour du centre Jules Ferry (voir nos articles ci-contre).

Pas d'atteinte au droit d'asile

A noter : dans son ordonnance, le Conseil d'Etat rejette également les recours par Médecins du monde et le Secours Catholique qui avaient introduit en référé de nombreuses autres demandes d'aménagement du camp et de prise en charge des réfugiés. Le Conseil considère notamment qu'aucune carence caractérisée ne peut être reprochée à l'Etat en matière d'asile, "dans la mesure où il était déjà suffisamment fait pour la prise en charge des migrants présents sur le site au titre de l'asile (information, accompagnement des demandeurs, places en centre d'accueil)". Le Conseil d'Etat relève aussi, "ce qui n'était plus guère contesté, que les mesures nécessaires pour assurer la sécurité sur le site avaient bien été prises".

Références : Conseil d'Etat, ordonnance (recours n°394540 et 394568) du 23 novembre 2015, ministère de l'Intérieur et commune de Calais.
 

 

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