Elus locaux - Jacques Pélissard demande la réactivation de la Conférence nationale des exécutifs
"La nécessite d'instaurer entre l'Etat et les collectivités un véritable pacte de confiance." Jacques Pélissard, le président de l'Association des maires de France (AMF), s'est régulièrement exprimé en ce sens, notamment lors des derniers Congrès des maires. Le contexte actuel, qu'il juge "très particulier" (fin de la législature, annonces du chef de l'Etat, difficultés de financement des collectivités…), l'incite à réinsister aujourd'hui sur cette exigence. Et, principalement, à demander une nouvelle fois la réactivation de la Conférence nationale des exécutifs (CNE). Rappelant ce 1er février, lors d'une rencontre avec la presse, que la CNE avait été rénovée et théoriquement relancée il y a un an (voir ci-contre nos articles de janvier et février 2011) dans une configuration qui devait lui garantir une meilleure efficacité, Jacques Pélissard ne peut que constater… qu'elle ne s'est, depuis, jamais réunie ! Or selon lui, la CNE constitue bien le lieu qui permettrait "une concertation en amont", grâce à des réunions régulières sur tous les projets touchant directement les collectivités. Des projets qui, aujourd'hui, ne manquent pas. Ainsi par exemple, l'idée d'augmenter les droits à construire émise le 29 janvier par Nicolas Sarkozy n'a jamais été évoquée avec les représentants des élus locaux avant d'être lancée sur les écrans de multiples chaînes de télévision (voir aussi ci-contre notre article de ce jour sur la réaction de l'AMF et d'autres acteurs suite à cette annonce). Même chose pour l'autre idée élyséenne émise dimanche, celle de "moduler" les dotations de l'Etat en fonction de la "sagesse" des collectivités. S'il y avait eu discussion en amont, sans doute les élus locaux auraient-ils fait valoir que le rapport Carrez-Thénault de mai 2010 montrait déjà que cette "vieille lune" de la modulation des dotations était irréalisable, notamment du fait de l'impossibilité de définir ce que serait la "bonne gestion" d'une collectivité, a rappelé mercredi Jacques Pélissard.
Pour le moment donc, point de CNE en vue… mais l'annonce, le 11 janvier dernier par Nicolas Sarkozy, d'une réunion en février avec les associations d'élus locaux pour évoquer la participation des collectivités à la maîtrise des dépenses publiques et, notamment, le "problème des effectifs". A ce jour pourtant, ces associations affirment n'avoir reçu ni invitation ni confirmation de date. Et encore moins d'ordre du jour.
Remunicipalisation = hausse des effectifs
Et surtout, Jacques Pélissard tient à faire valoir, d'une part que l'on observe depuis 2009 une stabilité des effectifs du bloc local et, d'autre part, comme le font régulièrement ses homologues des autres associations d'élus, que l'accroissement du nombre d'agents résulte le plus souvent de facteurs "exogènes". Et le président de l'AMF de citer, pêle-mêle, la croissance démographique nécessitant la création de place de crèches, le vieillissement de la population, les nouvelles normes en matière de restauration scolaire, le "zéro phytosanitaire" qui exige davantage d'agents pour l'entretien des espaces verts, la demande sociale croissante liée au chômage, le transfert de la délivrance des passeports… Sans compter tous les cas où l'Etat lui-même incite les collectivités à recruter, qu'il s'agisse de contrats aidés ou, par exemple, de policiers municipaux.
Le maire de Lons-le-Saulnier insiste aussi sur un autre point, "la tendance à la remunicipalisation" de certains services publics locaux, qui accroît mathématiquement les effectifs. Il cite à ce titre le cas de sa ville, qui a fait le choix de garder en régie la gestion de l'eau et la restauration, laquelle représente à elle seule 60 emplois. Les effectifs d'une commune dépendant donc des choix faits entre régie et délégation de service public (dans le cas d'une DSP, les personnels ne sont évidemment pas comptabilisés), "l'approche quantitative n'est pas pertinente", conclut-il.
Proposition de loi sur l'intercommunalité : "Il faut que l'urgence soit déclarée"
Enfin, toujours sur cette question des effectifs, Jacques Pélissard rappelle que la mutualisation des services entre communes et intercommunalités est finalement assez nouvelle, la loi du 13 août 2004 ayant certes ouvert une large brèche mais seule la loi de réforme des collectivités de décembre 2010 a apporté la sécurité juridique nécessaire à cette pratique, seule à même d'enrayer les "doublons" si souvent décriés.
S'agissant d'intercommunalité, l'actualité du président de l'AMF est évidemment aussi celle de sa proposition de loi "assouplissant la refonte de la carte intercommunale" adoptée le 25 janvier par la commission des lois de l'Assemblée et attendue en séance le 9 février (voir ci-contre notre article du 25 janvier). "Pour que le texte passe avant la fin de la législature, il faut que l'urgence soit déclarée", ce qui n'est pas encore le cas, a-t-il indiqué, précisant que la demande a évidemment été formulée. Interrogé sur les deux articles retoqués en commission pour cause d'irrecevabilité financière, et qui ne pourraient de ce fait être réintroduits en séance que par voie d'amendement gouvernemental, Jacques Pélissard, en contact à ce sujet avec le ministre en charge des Collectivités, a fait savoir que les choses semblaient en partie en bonne voie. Plus précisément, la réinjection de l'article 4 sur les délégués des assemblées communautaires serait quasi "assurée". En revanche, celle de l'article 3 sur la création de syndicats en matière scolaire ou d'action sociale ne serait "pas encore tranchée". Enfin, en contact avec le président de la commission des lois du Sénat, Jean-Pierre Sueur, auteur d'une précédente proposition de loi – non adoptée – sur la réforme intercommunale, le président de l'AMF pense pouvoir miser sur un vote conforme des sénateurs. Une condition, là encore, pour que le texte puisse être adopté avant la fin de la législature début mars.