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Intercommunalité - La proposition de loi Pélissard modifiée et allégée en commission

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté ce 25 janvier la proposition de loi Pélissard qui apporte des adaptations au chantier de la carte intercommunale. Surprise, plusieurs mesures attendues par les élus locaux ont été retoquées pour cause d'irrecevabilité financière.

Réunie le 25 janvier, la commission des lois de l'Assemblée nationale a procédé à la réécriture de la proposition de loi Pélissard "assouplissant la refonte de la carte intercommunale". L'article 1er du texte déposé début novembre par le député du Jura et président de l'Association des maires de France (AMF) reportait au 15 mars 2012 la date limite laissée aux préfets pour arrêter les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Dans le tiers des départements n'ayant pas de schéma au 1er janvier 2012, les préfets et les élus locaux auraient eu par conséquent deux mois et demi supplémentaires pour négocier la carte intercommunale. La commission des lois a finalement opté pour une autre solution. Elle a précisé les dispositions de la loi de réforme des collectivités territoriales relatives aux pouvoirs exceptionnels donnés aux préfets pour procéder à l'achèvement de la carte (articles 60 et 61). Dans les départements concernés, les préfets devront saisir la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) avant d'arrêter tout projet de modification de périmètre. Celle-ci pourra adopter des amendements à la majorité des deux tiers de ses membres. Les CDCI concernées retrouveront donc le pouvoir d'amendement qu'elles ont perdu, depuis trois semaines, en application de la loi de réforme des collectivités. Cette solution laisse vraisemblablement aux acteurs locaux un délai plus long, alors que la date du 15 mars 2012 pouvait paraître difficile à tenir dans certains départements où les blocages sont nombreux. Les préfets qui arrêteraient le périmètre de certains EPCI en ce début d'année sans recueillir l'avis de la CDCI se verraient contraints de consulter quand même la CDCI.

Des mandats supprimés avant leur terme ?

Une surprise est venue de la suppression des articles 3 et 4 de la proposition de loi. Contraires à l'article 40 de la Constitution qui interdit aux parlementaires de créer de nouvelles charges, ils n'ont pas été discutés. Or, les élus locaux attendaient beaucoup de ces mesures. L'article 3 devait permettre aux préfets de déroger au principe de réduction du nombre des syndicats, en leur donnant la possibilité de créer des syndicats en matière scolaire ou d'action sociale. L'enjeu est important lorsqu'une petite communauté exerçant l'une ou l'autre de ces compétences, voire les deux, est fusionnée avec une autre communauté, souvent plus grande, qui n'en assure pas l'exercice.
L'article 4 reportait à 2014 l'application des nouvelles règles de fixation du nombre et de la répartition des délégués au sein de l’assemblée communautaire. Sans ces modifications, de nombreux délégués de communautés devront renoncer à leurs fonctions avant leur terme. L'espoir des élus locaux repose désormais sur le gouvernement qui peut, au cours de la discussion en séance qui aura lieu le 9 février prochain, décider de réintroduire ces dispositions. Il y a d'ailleurs des chances qu'il le fasse, au moins pour la question de la poursuite des fonctions des délégués, qui ne suscite pas son opposition.
La commission a adopté trois amendements reprenant des dispositions de la proposition de loi Sueur sur l'intercommunalité adoptée par le Sénat, début novembre, en première lecture. L'un rend plus aisée la restitution partielle d'une compétence facultative après la fusion de plusieurs EPCI dont l'un au moins est à fiscalité propre. Un autre introduit des exceptions au principe de continuité territoriale au profit des communes enclavées dans un département différent (seules cinq enclaves seraient a priori concernées - ces enclaves et les communes correspondantes sont listées dans l'exposé sommaire de l'amendement, voir page 14 du document ci-joint). Un troisième porte sur le transfert par les maires des pouvoirs de police spéciale au président de l'EPCI. Avec ces amendements, les députés espèrent que le Sénat votera conforme la proposition de loi. Celle-ci ayant ainsi des chances d'être adoptée d'ici la fin de la législature qui interviendra fin février ou début mars.

Thomas Beurey / Projets publics

Pendant ce temps, Philippe Richert…

Pendant que la commission des lois se réunissait pour examiner la proposition de loi Pélissard, le ministre chargé des Collectivités intervenait en Conseil des ministres pour faire le point, justement, sur le volet intercommunal de la loi de réforme des collectivités. Les chiffres communiqués par Philippe Richert coïncident avec ceux communiqués cette dernière semaine par l'Assemblée des communautés de France (ADCF) ou encore par l'AMF (voir nos articles ci-contre). Il fait en effet état de 66 départements sur 99 ayant adopté leur schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI), schémas qui concerneraient ainsi "environ 40 millions d’habitants - soit 65% de la population nationale - et plus de 70% des communes". Le ministre indique en outre que "80% des amendements présentés par les élus dans les commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) ont été adoptés", y voyant le signe d'une "véritable coproduction" entre les préfets et les élus.
Avec les 66 schémas adoptés, le nombre de syndicats diminuerait de 20% et le nombre de communautés de communes de moins de 5.000 habitants de 73%. Dans les 33 autres départements, Philippe Richert assure, sans toutefois évoquer la proposition de loi Pélissard, que "la concertation avec les élus se poursuivra en 2012", que "l’absence de schéma ne fait pas obstacle à ce que des mesures de rationalisation soient engagées" et que "les CDCI seront alors consultées sur chaque projet avant qu’il soit soumis à l’avis des communes concernées, même si la loi n’a pas expressément prévu cette consultation."
La communication du ministre rappelle par ailleurs, s'agissant des autres pans de la loi, qu'une métropole a déjà vu le jour, celle de Nice-Côte d’Azur, et que l'on peut prévoir la création de 13 communes nouvelles et d’"au moins 8 pôles métropolitains".

C.M.