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Incendie de Lubrizol : une instruction du gouvernement rappelle les directives de sécurité pour les sites Seveso

A la suite de l'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen, le gouvernement a publié ce 4 octobre une instruction aux préfets et aux services déconcentrés qui précise les "premiers points de vigilance" sur lesquels les exploitants de sites Seveso doivent être sensibilisés.

A la suite de l'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen, au cours duquel plus de 5.000 tonnes de produits chimiques ont brûlé, le gouvernement a adressé une instruction aux préfets et aux services déconcentrés précisant les "premiers points de vigilance" sur lesquels ils doivent sensibiliser les exploitants des sites Seveso, afin de s'assurer de "leur bonne préparation en cas de survenue d'un accident sur leur site".
Dans ce texte daté du 2 octobre et publié ce vendredi, la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne demande d'abord aux services de l'Etat de "rappeler aux exploitants d'établissement Seveso seuil haut et seuil bas leur pleine responsabilité sur la conformité de leurs installations au regard des engagements pris dans leur étude de dangers" ainsi que les "moyens de prévention et de protection relatifs aux incidents majeurs". Ils doivent en outre inviter les exploitants à "prêter une attention particulière au caractère opérationnel des mesures de prévention, limitation et protection d'un accident, et notamment d'un incendie", y compris hors période de forte activité, l'incendie de Lubrizol s'étant déclaré au milieu de la nuit.

"Partage de la connaissance des risques accidentels"

Alors que la diffusion de la liste des produits brûlés dans l'incendie de l'usine Lubrizol a été jugée trop lente, l'instruction insiste sur "l'importance du partage de la connaissance des risques accidentels". "L'étude de dangers prenant en compte les quantités maximales de produits, substances et mélanges susceptibles d'être présents dans les établissements, il est nécessaire que les exploitants disposent en temps réel d'une connaissance de la nature et des quantités de produits présents aux différents emplacements de leur site, souligne-t-elle. En cas d'accident, cette information actualisée doit pouvoir être fournie sans délai aux équipes d'intervention et à l'inspection des installations classées".
Le texte indique enfin qu'"une fois que l'enchaînement des circonstances de l'accident de Lubrizol aura pu être analysé", les services du ministère "seront susceptibles de demander à l'inspection des installations classées de conduire des vérifications des points ciblés de maîtrise des risques sur des familles d'installations Seveso". La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, avait annoncé mercredi que le gouvernement allait demander "à l'ensemble des dirigeants des sites Seveso d'effectuer des contrôles de sécurité".
 

Lubrizol : un système d'alerte défaillant

Parmi les nombreux couacs qui entourent la gestion de l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen figure le dispositif d’alerte de la population mis en œuvre ce 27 septembre. Le Système d’alerte et d’information des populations (SAIP) "ne semble pas avoir suffi dans les premières heures", déplore  en effet le Sénat, dans un communiqué du 4 octobre. "Par mesure de précaution, les sirènes n’ont retenti que 5 heures après le début de l’incendie", précise-t-il. Outre le déclenchement tardif des sirènes, des messages ont aussi été diffusés sur les réseaux sociaux, comme prévu par le SAIP. Mais il faudrait s’appuyer "sur une technologie de diffusion de messages sur l’ensemble des téléphones mobiles présents sur une zone d’alerte", estime le sénateur Jean-Pierre Vogel (LR, Sarthe), rapporteur spécial des crédits du programme "Sécurité civile" du projet de loi de finances pour 2020.

Après les attentats de 2015, le ministère de l’Intérieur avait décidé, à l’occasion de l’Euro 2016, de lancer une application smartphone pour les crises majeures (attentats, incendies, catastrophes naturelles…). Mais l’expérience aura été de courte durée : en 2018, le gouvernement décide d’y mettre fin pour recourir aux réseaux sociaux. Le dispositif avait en effet un gros défaut : il ne fonctionnait que si l’utilisateur avait au préalable téléchargé une application. Mais surtout, il avait montré de sévères lacunes : il s’était déclenché trois heures après les attentats de Nice en 2016, n’avait pas réagi lors de la prise d’otages de Trèbes en mars 2018, et avait même alerté d’un faux attentat fin 2017 alors qu’il ne s’agissait que d’un exercice...

Dans un rapport de 2017 critiquant un réseau de sirènes devenu "totalement obsolète" et le coût de cette application smartphone, le sénateur Jean-Pierre Vogel avait plaidé pour un système de téléphonie mobile plus efficace reposant sur une technologie de diffusion cellulaire (Cell Broadcoast) ou sur des SMS géolocalisés. "L’envoi d’un message par téléphone au plus tôt, comme l’ont d’ailleurs fait certaines communes, aurait permis une alerte plus efficace, plus immédiate et mieux ciblée", assure la Chambre haute.
MIchel Tendil / Localtis