Social : hormis les jeunes, la lutte contre l'exclusion parent pauvre du plan de relance ?
Au lendemain de la présentation du plan de relance, des questions apparaissent sur les mesures en faveur des publics les plus précaires et la place de la lutte contre l'exclusion. La Fondation Abbé-Pierre et le collectif Alerte s'émeuvent que peu de crédits ou mesures soient fléchés vers ces publics. D'autres dispositions pourraient toutefois figurer dans le prochain PLFSS.
Au lendemain de la présentation du plan de relance par le Premier ministre (voir notre article ci-dessous du 3 septembre 2020), des questions apparaissent sur les mesures en faveur des publics les plus précaires et la place de la lutte contre l'exclusion. La cohésion est pourtant présentée comme l'une des trois priorités du plan de relance, avec l'écologie et la compétitivité. Dans un communiqué du 3 septembre, la Fondation Abbé-Pierre voit ainsi dans le plan "une occasion manquée de lutter contre la pauvreté".
800 millions sur 100 milliards
Le décompte est toutefois relativement complexe, puisque tout dépend de la définition plus ou moins large que l'on donne à la lutte contre l'exclusion et à l'insertion. Le volet "Cohésion" du plan regroupe en effet des mesures très diverses : mise en œuvre du Ségur de la Santé (mesures déjà actées et financées via la loi organique et la loi ordinaire relatives à la dette sociale et à l'autonomie), ensemble d'actions en direction des jeunes (formation sur les secteurs porteurs, aide à l'embauche des moins de 26 ans, 300.000 parcours d'accompagnement supplémentaires vers l'emploi...), mesures de sauvegarde de l'emploi (dont le maintien de l'activité partielle de longue durée), formation professionnelle...
Pour la Fondation Abbé-Pierre, "sur 100 milliards d'euros en deux ans, seuls 800 millions sont dédiés au soutien aux personnes précaires, essentiellement sous forme d'une hausse de 100 euros de l'allocation de rentrée scolaire déjà versée, d'un complément sur l'aide alimentaire et de 100 millions d'euros pour aider le secteur de l'hébergement" (en réalité, il s'agit de 200 millions d'euros, destinés, dans le volet "Logement" du plan, à la création de places d'hébergement et à la rénovation et l'humanisation de certains CHRS).
De façon plus large, la Fondation estime que "depuis le début de la crise, les plus pauvres ont, à chaque fois, été aidés tardivement et a minima, qu'il s'agisse de la prime exceptionnelle de 150 euros, de l'aide aux étudiants précaires ou de la prime d'Action logement". Elle rappelle aussi des mesures, programmées pour le 1er janvier 2021, qui pourraient impacter négativement les plus modestes, comme la réforme de l'assurance-chômage ou la contemporanéisation des APL (aides personnelles au logement).
En attendant le PLFSS
Même réaction du côté du collectif Alerte, qui rassemble une trentaine de grandes associations de lutte contre l'exclusion (dont la Fondation). Dans un communiqué du 3 septembre, celui-ci estime en effet que "les plus précaires [sont] une fois de plus ignorés". Avec seulement 1% des 100 milliards du plan, le collectif juge que "le gouvernement, à travers le plan de relance économique qu'il vient de présenter, n'a une nouvelle fois pas pris la mesure de la réalité vécue par 9 millions de nos concitoyens, dont 3 millions d'enfants". Il "rappelle donc de nouveau l'urgence de développer des politiques ambitieuses afin d'éradiquer structurellement la pauvreté dans notre pays".
Lors de la présentation du plan de relance, le Premier ministre a toutefois expliqué, qu'en matière de "lutte contre la précarité", la "traduction" passera surtout par le PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale) et, dans une moindre mesure, par le PLF (projet de loi de finances). Deux textes qui doivent être présentés d'ici la fin du mois de septembre. Les associations gardent donc la porte entrouverte, en expliquant que "le collectif Alerte a entendu la stratégie du gouvernement de faire de la lutte contre la précarité une 'action constante' et attend de voir, comme annoncé, les traductions de cette volonté dans la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale à venir".