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Aménagement numérique du territoire - Hervé Maurey et Philippe Leroy déposent leur proposition de loi sur le très haut débit

Les sénateurs Hervé Maurey (Eure) et Philippe Leroy (Moselle) ont déposé le 17 novembre leur proposition de loi visant à "assurer l'aménagement numérique du territoire" (en téléchargement ci-contre - version provisoire susceptible de modifications mineures). Elle fait suite au rapport d'information sur la couverture numérique, déposé le 6 juillet 2011 au nom de la commission de l'économie du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat, et entend s'opposer à un risque de décrochage de notre pays sur le très haut débit. "La France est en passe de manquer le virage du numérique, et le retard qu'elle prend aujourd'hui risque de s'avérer rapidement irréversible", rappelait Hervé Maurey dès les premières lignes de son rapport. La France, en effet, est encore loin d'avoir atteint une situation optimale en matière de numérique. Des écarts demeurent entre les chiffres officiels et la réalité perçue et vécue par les usagers : la France atteint bien un taux de raccordement de 98,3% des foyers en ADSL, mais pour un seuil de prise en compte fixé à 512 Kbit/s, alors qu'à 8 Mbt/s, seuil d'éligibilité du triple play, il tombe à 50%. Aussi, à côté du très haut débit qui va profiter aux villes et au zones les plus urbanisées, se pose la question cruciale de la poursuite de la montée en débit des régions les plus défavorisées afin de réduire la fracture géographique.
"Le dispositif retenu par les pouvoirs publics ne semble pas pertinent", constatent les auteurs, "il repose sur les opérateurs privés, qui ne déploient que dans les zones rentables", c'est-à-dire les zones les plus denses, correspondant aux 148 communes identifiées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) en juin 2009. En ajoutant les 3.400 communes sur lesquelles des accords de mutualisation viennent d'être annoncés entre Orange et SFR, on obtient une couverture de 60% du territoire. Sur les 40% restants, c'est-à-dire les territoires ruraux et semi-ruraux, par définition les plus coûteux à desservir, il revient aux collectivités territoriales de prendre le relais, sans aucune assurance sur le concours de l'Etat, le Fonds d'aménagement numérique du territoire (Fant) créé par la loi du 17 décembre pour lutter contre la fracture numérique n'étant toujours pas alimenté.
Aussi, le texte défend un modèle plus équilibré entre le secteur public local et les opérateurs privés, institue un "haut débit pour tous", améliore la mesure de couverture en téléphonie mobile et veut rendre plus efficient le mode de déploiement du très haut débit.

Schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) : un outil d'engagement contractuel

Les SDTAN, outils de la planification numérique, sont censés apporter cohérence et rationnalité dans les plans de déploiement. Créés par la loi Pintat, ils sont censés être élaborés au moins par un département pour prétendre aux aides accordées au titre du Fant. Dans le texte, leur compétence s'étend à tous les aspects de la problématique numérique : THD, haut débit, téléphonie et liaisons satellitaires, de manière à traiter la montée en débit des territoires non concernés immédiatement par le THD (art. 1).
Ils deviennent aussi un outil d'engagement contractuel sur la couverture en très haut débit entre les collectivités territoriales et les opérateurs (art. 3), de manière à faciliter la détermination des constats de carence.

Téléphonie mobile : renforcer et mutualiser les dispositifs de couverture

La proposition de loi souhaite établir une meilleure couverture mobile tout en optimisant le nombre de points hauts (art. 4). Elle entend redéfinir les critères de couverture pour les technologies 2G et 3G (art. 5), une obligation de couverture des "zones grises" (art. 6) et la mutualisation des points hauts pour la 4G ainsi que la définition d'un seuil de couverture de la population (art. 7).

Haut débit un droit opposable

Sur la base d'un débit symétrique de 2 mbt/s en 2012 et de 8 mbt/s en 2015, un droit du haut débit pour tous, opposable, est instauré (art. 8). Dans les cas où le THD ne constitue pas une "porte de sortie par le haut" à court terme, la montée en débit sur tout type de réseau devient éligible au Fant, afin d'améliorer qualitativement la desserte des foyers ne bénéficiant que d'une connexion à faible débit (art. 9).

THD : les projets mixant zones rentables et non-rentable sont autorisés

Les projets intégrés des collectivités territoriales portant pour partie sur une zone non-rentable, pour partie sur une zone rentable, deviennent éligibles à des financements publics nationaux, à condition que ne soient subventionnées que les zones non-rentables de ces projets, conformément au droit communautaire (art. 10). Cet article permet aux collectivités locales de couvrir la totalité de leur territoire, d'effectuer une péréquation des coûts entre les zones plus ou moins denses et de réduire le montant des subventions nécessaires à la couverture des zones moins denses. Par ailleurs, l'Arcep se voit confier la charge de contrôler et de sanctionner le non-respect des engagements pris par les opérateurs (art. 12). En cas de carence dans les zones que les opérateurs devaient couvrir selon les prévisions contractuelles découlant des SDTAN, les collectivités locales ont la possibilité d'obtenir des financements publics nationaux (art. 11). Le statut d'opérateur de réseau leur est reconnu ainsi qu'à leurs groupements. Cette dernière disposition sécurise les projets portés par les collectivités territoriales et leur permet d'être associées aux travaux de l'Arcep (art. 14 modifiant l'article L 1425-1 du CGCT).

Mesures financières : activation du Fond d'aménagement numérique du territoire

L'alimentation du Fant jusqu'en 2025 s'appuie, d'une part, sur une contribution de solidarité numérique sur les abonnements internet et téléphonie mobile et, d'autre part, sur une taxe sur les téléviseurs et les consoles de jeu. Cette solution remplace l'idée initiale d'une dotation de l'Etat, qui se serait heurtée à une irrecevabilité financière.