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Développement durable - Grenelle 2 : l'Assemblée nationale a bouclé l'examen du titre 1er relatif aux bâtiments et à l'urbanisme

Lors de la première séance du jeudi 6 mai 2010, les députés ont poursuivi l'examen du titre Ier consacré aux bâtiments et à l'urbanisme du projet de loi portant engagement national pour l'environnement. Ils ont par ailleurs achevé l'examen du volet dédié aux publicités et enseignes.

La veille, les députés avaient rejeté, à l'instar de la commission, un amendement des rapporteurs, pourtant soutenu par le gouvernement, portant article additionnel après l'article 9 bis et proposant que les communautés de communes et les communautés d'agglomération (hors Ile-de-France, Corse et départements d'outre-mer) deviennent compétentes pour l'élaboration du plan local d'urbanisme (PLU). La faculté pour les communes de renoncer à ce transfert sur le fondement d'une délibération contraire expresse d'un nombre significatif de communes était toutefois prévue. Le rapporteur Michel Piron, qui a défendu l'amendement, a souligné "qu'à l'heure actuelle, chaque conseil municipal réfléchit, comme il se doit, aux vocations de son territoire dans le cadre du PLU communal, et fait ses réserves foncières en ignorant, la plupart du temps, ce qui se fait chez les voisins. De ce fait, on aboutit souvent à des surréservations ou des surconsommations de foncier".

 

Des "micro-zones" dans les zones naturelles, agricoles ou forestières

Les députés ont adopté un amendement de Michel Piron à l'article 10 prévoyant que dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, le règlement des PLU puisse délimiter des "micro-zones" dans lesquelles des constructions peuvent être autorisées à la condition qu'elles ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages. Il s'agit de tenir compte de la jurisprudence récente du Conseil d'Etat (CE, 31 mars 2010, Commune de Chateauneuf-du-Rhône, n° 313762) qui en considérant que la rédaction du Code de l'urbanisme autorise clairement la délimitation de telles micro-zones dans les zones naturelles et forestières, mais non dans les zones agricoles, "compromet plusieurs milliers de PLU de communes qui avaient appliqué les consignes du gouvernement et la jurisprudence antérieure du Conseil d'Etat".
Le PLU n'a pas pour fonction d'assurer la préservation ou la remise en bon état des continuités écologiques mais, au contraire, d'identifier les espaces nécessaires à cette préservation ou à cette remise en bon état. Aussi un amendement prévoit-il que le préfet pourra retarder la date à laquelle l'acte approuvant le PLU deviendra exécutoire s'il estime que les dispositions de celui-ci ne prennent pas suffisamment en compte ces enjeux. En revanche, les députés ont rejeté un amendement s'opposant au pouvoir de substitution du préfet concernant la modification d'un PLU. La question de l'allongement de la période transitoire entre l'actuel régime des PLU et celui que s'apprête à instaurer le présent projet de loi est quant à elle renvoyée à un examen en commission mixte paritaire.
Les députés ont en outre adopté pléthore d'amendements rédactionnels ou de coordination à l'article 10. En revanche, ils ont rejeté un article additionnel limitant les recours contentieux engagés contre les permis de construire par l'impossibilité de déposer des recours invoquant une illégalité des arrêtés de lotir, du plan d'occupation des sols (POS) ou du PLU. De même qu'un amendement de l'opposition à l'article 11 ajoutant à la performance énergétique, la qualité architecturale et l'insertion au site parmi les critères permettant une augmentation de coefficient d'occupation des sols (COS).
Un amendement précisant, s'agissant du littoral, qu'à l'exception des activités agricoles et forestières, de pêche et de cultures marines, tout changement de destination des bâtiments existants doit être prohibé pour éviter toute transformation de ces bâtiments professionnels en résidences secondaires a également été rejeté.

Les députés du groupe SRC ne sont pas non plus parvenus à obtenir la suppression de l'article 12 prévoyant l'extension du pouvoir du préfet de région sur le schéma directeur de la région Ile-de-France (Sdrif). Pas plus qu'à obtenir la suppression de l'article 13 qui autorise un recours aux ordonnances pour réformer le Code de l'urbanisme. A l'origine beaucoup plus longue, la liste des ordonnances a été raccourcie par le Sénat. Toutefois, "s'agissant d'éléments aussi importants dans la vie des collectivités locales, en particulier les établissements publics fonciers et d'aménagement, le recours aux ordonnances n'est pas acceptable", a relevé le député Daniel Paul (groupe de la gauche démocrate et républicaine).

 

Statu quo sur la portée de l'avis de l'architecte des bâtiments de France

S'agissant de l'article 14, les députés ont refusé de revenir au droit préexistant en matière d'avis des architectes des bâtiments de France (avis conforme) sur les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), qui deviennent des aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine. Pour le rapporteur, Serge Grouard, il s'agit d'éviter "une conflictualité rémanente entre la protection pure et dure du patrimoine architectural et la prise en compte des préoccupations environnementales, ce qui induit une modification du rôle des architectes des bâtiments de France". En outre, "le travail effectué par la commission Tuot permet d'aboutir à une procédure équilibrée en cas de litige entre le maire et l'ABF".
Les députés ont ensuite adopté une série d'amendements rédactionnels à cet article émanant du rapporteur Michel Piron.
La loi de finances pour 2009 autorise, sous certaines conditions, la cession à l'euro symbolique aux communes des immeubles domaniaux reconnus inutiles par le ministre de la Défense dans le cadre des opérations de restructuration militaire. Les députés ont rejeté un amendement qui proposait d'étendre cette possibilité aux organismes de logement social. De même ont-ils refusé d'aligner, sur celui applicable aux entreprises, le régime applicable aux particuliers de fiscalité allégée en cas de vente à un organisme de logement social (exonération totale d'impôt sur la plus-value).
Par ailleurs, les députés ont adopté trois amendements, présentés par le député UMP Jean-Louis Léonard, concernant les résidences mobiles. Le premier entend faire cesser la pratique de la vente de petites parcelles de terrain dans les campings. Le second permet aux maires de saisir le juge en cas d'installation irrégulière. Le troisième prévoit une mise aux normes environnementales pour les terrains de camping anciens. Passé un délai de huit ans pour réaliser les travaux, le maire, à défaut le préfet, pourra ordonner la fermeture du camping jusqu'à sa mise aux normes.
Un amendement gouvernemental insère un article additionnel après l'article 15 destiné à accélérer le processus de régularisation des occupants sans titre de la zone des cinquante pas géométriques en Guadeloupe et en Martinique, en dehors des zones à risque et naturelles. Cette disposition prévoit également la possibilité d'engager des opérations de résorption de l'habitat insalubre (RHI) dans les zones les plus dégradées.

 

Précisions sur le régime des pré-enseignes dérogatoires

Les députés ont rejeté un amendement destiné à faire tomber sous le coup de la réglementation relative aux enseignes et aux publicités, les dispositifs publicitaires se trouvant à l'intérieur d'un bâtiment et visibles de l'extérieur. De même ont-ils rejeté les amendements permettant l'implantation de messages publicitaires dans l'emprise des zones commerciales, industrielles et artisanales. Ils ont également rejeté un amendement permettant de faire bénéficier les zones d'activité commerciale du même régime juridique d'autorisation que les aéroports et les gares ferroviaires et sur ce dernier point ont refusé un amendement revenant à une dérogation limitée en n'autorisant la publicité que dans les parties bâties et ouvertes au public de l'emprise des aéroports. Egalement rejeté l'amendement permettant aux EPCI compétents en matière d'environnement d'élaborer le règlement local de publicité. De même ont-ils refusé de supprimer l'alinéa 9 de l'article 15 quater qui impose aux élus locaux d'autoriser la publicité sur palissades de chantier dans le cadre d'un règlement local de publicité. La consultation obligatoire des afficheurs lors de l'élaboration de ce règlement a également été rejetée. Un amendement interdisant la publicité autour des écoles dans un rayon de cent mètres a lui aussi été rejeté. De même que celui visant à interdire la publicité animée sur écran. En revanche, tout système de mesure automatique de l'audience d'un dispositif publicitaire ou d'analyse de la typologie ou du comportement des personnes passant à proximité sera soumis à autorisation de la CNIL. Le régime des pré-enseignes dérogatoires est également précisé (généralisation du régime de déclaration, nature des activités qui pourront en faire l'objet). L'amendement défendu par le rapporteur Serge Poignant précise toutefois qu'un "remplacement systématique des pré-enseignes dérogatoires par des dispositifs relevant du régime de la "signalisation d'information locale" (SIL) s'avèrerait très souvent impossible".
L'article 15 quater impose désormais au juge de se prononcer sur l'ensemble des moyens présentés à l'occasion d'un recours contre un règlement local de publicité. Un amendement prévoit également un délai de deux ans pour la mise en conformité aux nouvelles prescriptions par la loi  Grenelle 2  des publicités, enseignes et préenseignes actuellement en place. Les alinéas 4 et 5 de l'article 15 quinquies permettant aux maires de déroger par arrêté à la réglementation nationale ont été supprimés. "Ce pouvoir exorbitant du maire conduit d'une part, à une grande iniquité entre les grands groupes, qui disposent de moyens de pression importants, et les commerçants locaux, et d'autre part, à un effet de surenchère entre communes voisines désirant voir s'implanter des activités économiques sur leur territoire", a relevé Lionel Tardy (UMP).
Les députés ont rejeté un article additionnel prévoyant de soumettre les autorisations d'installations de publicité et d'enseignes délivrées par le maire ou par le président de l'EPCI au contrôle de légalité du préfet. De même que celui précisant que la publicité sur des bâches (prévues à l'article 15 sexies) ne peut être entreprise qu'à l'occasion d'échafaudages montés pendant la durée d'un chantier, ainsi que celui permettant aux maires de s'exonérer de la saisine de la commission départementale compétente en matière de sites, lors de l'installation de dispositifs publicitaires liés à des manifestations événementielles.

 

Philie Marcangelo-Leos / Victoires-Editions