Couverture numérique - Grand emprunt et satellite : Nathalie Kosciusko-Morizet présente les enjeux
"Ne l'appelez plus grand emprunt mais investissements d'avenir", a nuancé la secrétaire d'Etat chargée de la prospective et du développement de l'Economie numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet, ce 29 juillet à Paris. Au cours d'un petit-déjeuner, l'association 3i3s (International Independant Institute for Space and Satellite Solutions) a réuni une quarantaine de grands (Thales, Eutelsat, Astra...) et plus petits acteurs (Vivéole, NordNet...) pour "mobiliser le secteur spatial qui a peu répondu aux concertations publiques en cours sur le volet numérique des investissements d'avenir", selon son président, Philippe Boissard.
Le satellite, pilier du numérique
"Le satellite est présent sur les deux piliers du numérique. Il est du côté des infrastructures et aussi du côté des services, des usages et des contenus", a d'abord souligné la secrétaire d'Etat. Concernant les infrastructures - auxquelles deux milliards d'euros sont consacrés dans le cadre de ces investissements d'avenir -, Nathalie Kosciusko-Morizet a rappelé les deux volets prévus pour le déploiement de la fibre optique en France : le volet A est destiné aux opérateurs sous forme de prêts ou prises de participation (à hauteur d'un milliard), tandis que le volet B est plutôt fléché vers les collectivités sous forme d'aide d'Etat (subvention publique) dans le cadre de partenariats avec les opérateurs (pour 750 millions). Quant au volet C, il concerne les autres technologies, donc le satellite, et la montée en débit des territoires. "C'est surtout sur ce dernier volet que se focalise la pression des élus territoriaux, ce qui pourrait conduire à augmenter l'enveloppe de 250 millions d'euros initialement prévue", a reconnu la secrétaire d'Etat. Un débat persiste, en effet, au sein du gouvernement sur l'usage de ces fonds. Certains voudraient financer un unique projet satellitaire (Megasat ?) qui permettrait de réserver de la bande passante pour des services publics et in fine l'accès de la population au haut débit sur tout le territoire. "Outre le fait que la puissance publique ne peut décider pour les collectivités, ce n'est pas la priorité des élus locaux", a commenté Nathalie Kosciusko-Morizet, également maire de Longjumeau (Essonne). D'autres au gouvernement plaident pour des projets plus modestes et multiples garantissant la montée en débit des zones rurales et isolées dans l'attente de l'arrivée de la fibre. "La décision n'est pas prise à ce jour et c'est le Premier ministre qui tranchera. Nous avons donc besoin de faire une consultation publique, lancée dès la rentrée de septembre, pour recenser les technologies alternatives disponibles et les comparer", a-t-elle annoncé. "D'ailleurs, si les appels à projets concernant les volets A et B sont prêts depuis quinze jours, ils ne seront également lancés qu'en septembre et non fin juillet, comme prévu. Ils doivent être validés en commission parlementaire et c'est un peu encombré actuellement", a révélé Nathalie Kosciusko-Morizet, pour dissiper les polémiques.
Une consultation publique en septembre
Concernant les usages, le satellite reste souvent cantonné à trois services principaux : la météorologie, les applications militaires et la télévision. Pourtant, la technologie spatiale peut être mobilisée sur certains des neuf axes définis pour les futurs appels à projets "usages du numérique", dotés de 2,5 milliards d'euros : télémédecine, e-éducation, ville numérique… "Ce que nous recherchons par la consultation publique et les appels à projets, c'est à associer au sein de consortiums des petites et des grandes entreprises autour de projets industriels afin de développer des services et garder des emplois en France et en Europe ", a répété la secrétaire d'Etat. Celle-ci a, au final, invité les acteurs du satellite à lancer une campagne de communication grand public, dans le contexte porteur du déploiement de la télévision numérique terrestre (TNT). "Le satellite souffre d'une mauvaise image dans l'opinion. Les élus sont très réticents au déploiement de grandes paraboles blanches sur les façades des immeubles, souvent associées au logement social et donc peu valorisantes. Dans les débats sur la TNT, j'ai été conduite à les convaincre que ce critère esthétique n'était plus pertinent. En revanche, il reste à combattre la représentation culturelle que le satellite est une technologie plus fragile que le filaire. Il faut lutter contre l'idée que le satellite c'est pour les ruraux, donc c'est un deuxième choix, alors que la fibre optique c'est pour les urbains, donc c'est mieux", a conclu Nathalie Kosciusko-Morizet. "Le satellite est fiable à 99,9%. D'ailleurs, il est utilisé en back-up pour les interventions chirurgicales", a réagi Philippe Boissard, semblant déjà répondre au conseil de la secrétaire d'Etat.
Luc Derriano / EVS