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Culture - Gestion des réserves et des dépôts : le taux de récolement ne dépasse pas 35% dans les musées territoriaux

Un rapport de la mission d'information de la commission des affaires culturelles et de l'éducation consacré à la gestion des réserves et des dépôts des musées de France vient d'être rendu public. Il fait le bilan du premier récolement décennal prévu par la loi du 4 janvier 2002. Le taux moyen de récolement n'est que de 35% pour les musées territoriaux, soit 82% des musées en France.

L'Assemblée nationale publie le rapport de la mission d'information de la commission des affaires culturelles et de l'éducation consacré à la gestion des réserves et des dépôts des musées de France. Au nombre de 1.220, ces musées sont gérés à 82% par des collectivités territoriales. Figurent aussi dans la liste tous les grands musées nationaux.
Pas moins de quatre co-rapporteurs se sont penchés sur une question qui se situe dans le prolongement de la commission de récolement des dépôts d'oeuvres d'art, présidée par Jean-Pierre Bady, conseiller-maître honoraire à la Cour des comptes (voir nos articles ci-contre du 19 juin 2007 et du 6 février 2009). Le rapport d'information aborde toutefois un champ plus large et couvre de nombreux aspects de la gestion des réserves et des dépôts des musées.

Bilan décevant pour le premier récolement décennal des musées de France

La mission d'information a été lancée il y a plus d'un an (voir notre article ci-contre du 13 novembre 2013) et a procédé à de nombreux déplacements et auditions. Ses conclusions sont pour le moins mitigées. Côté positif, la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France a "mis en place les instruments d'une meilleure gestion des collections". Mais la mise en œuvre effective n'a que partiellement suivi la mise en place du cadre juridique.
Ainsi, le bilan du premier récolement décennal des collections des musées de France se révèle décevant : "Dès les premiers mois des travaux de la mission, il était acquis que, malgré une accélération en fin de période, l'objectif d'achèvement du premier récolement général des collections en juin 2014 ne serait pas tenu et que l'obligation, pourtant fixée par la loi, ne serait pas respectée." En octobre 2014 - soit douze ans après le vote de la loi -, le taux moyen de récolement (pourcentage des œuvres ayant fait l'objet d'un récolement) était de 40%, dont 35% dans les musées territoriaux et 54% dans les musées nationaux relevant du ministère de la Culture. La mission d'information en tire, entre autres, la conclusion qu'il est nécessaire d'instaurer un "encadrement stratégique" des musées nationaux, mais aussi un "contrôle renforcé sur les autres musées de France", autrement dit ceux des collectivités.

Des difficultés récurrentes dans la gestion des réserves

Au-delà de la question du récolement, le rapport dresse un état des lieux de la situation des réserves des musées de France. Même si les situations sont très différentes d'un établissement à l'autre, le rapport pointe de nombreuses difficultés récurrentes : exiguïté des réserves, conditions de sécurité insuffisantes, précarité juridique des réserves situées dans des bâtiments pris en location, mauvaises conditions de conservation... Les rapporteurs explorent donc des pistes comme la mutualisation des réserves, tout en ne cachant pas qu'il s'agit là d'"un sujet controversé au sein des musées nationaux".
D'autres préconisations visent à moderniser la gestion des réserves des musées de France, mais aussi à trancher - sans qu'une solution se dégage nettement du rapport - la question d'un centre de conservation commun aux musées nationaux parisiens menacés par une crue centennale. Cette question se pose avec acuité après l'abandon, en septembre 2012, du projet d'un Centre de conservation, de recherche et de restauration des musées nationaux à Cergy-Pontoise (Val d'Oise).

Une circulation des œuvres à dynamiser

La troisième partie du rapport aborde une question qui est plutôt réservée aux grands musées nationaux : celle des œuvres à l'origine douteuses dans les collections des musées. La formulation vise surtout les spoliations opérées à l'encontre des Juifs durant l'Occupation.
Enfin, la dernière partie du rapport traite de la circulation des collections publiques, un sujet déjà abordé - sous un angle critique - par la Cour des comptes (voir notre article ci-contre du 31 mars 2011). La mission d'information porte, elle aussi, un regard mitigé sur le sujet, conséquence des contraintes de toutes sortes qui pèsent aujourd'hui sur la circulation des œuvres.
Elle suggère notamment de clarifier le régime juridique des dépôts, d'encourager le recours à la procédure des prêts de longue durée par l'Etat pour des "œuvres significatives" de ses collections (ce qui se fait, par exemple, pour le Louvre Lens), mais aussi de faire de la commission de récolement des dépôts d'œuvres d'art - à ne pas confondre avec la commission précédemment citée - une instance nationale de coordination et de pilotage d'une politique cohérente des dépôts. Cette commission deviendrait pour l'occasion un "Haut Conseil des dépôts d'œuvres d'art".