Archives

Eau/Energie - Gestion des impayés : des pratiques hétérogènes... parfois illégales

Certains services publics industriels et commerciaux tels que l'eau et l'assainissement, dont la gestion est assurée par les collectivités, connaissent des difficultés pour gérer le recouvrement des factures qui leur sont dues. En période de crise économique, ces impayés tendant à augmenter, cette problématique devient plus aiguë pour les gestionnaires publics.
Dans le cadre d'une question au gouvernement, Jean Louis Masson, sénateur de Moselle, s'est récemment interrogé sur la pratique de certains maires qui prennent, en toute illégalité, des arrêtés municipaux visant à interdire aux gestionnaires publics de pratiquer des coupures d'alimentation en eau ou électricité en cas d'impayés. Et le sénateur de demander, pour éviter des postures éventuellement démagogiques, que les communes dont les maires prennent de tels arrêtés se substituent aux usagers ne payant pas leurs factures.
La réponse du ministère de l'Intérieur est claire : cette possibilité n'est juridiquement pas fondée et les arrêtés d'interdiction correspondants sont, selon une jurisprudence constante, annulés par le juge administratif (cour administrative d'appel de Paris, 12 février 2008, 07PA02710). Le ministère rappelle également qu'un dispositif juridique de traitement des impayés existe et que les gestionnaires de services publics doivent s'y conformer. En sachant toutefois que ce dispositif a récemment connu des évolutions importantes.
En premier lieu, la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions a créé dans son article 136 un dispositif nommé "solidarité-eau". Ces dispositions, complétées par l'article 43 de la loi n°88-1088 du 1er décembre 1988 relative au Revenu minimum d'insertion, prévoyaient notamment la participation des distributeurs d'eau. Ceux-ci avaient la possibilité d'abandonner une partie de la facture due ou d'abonder un fonds spécial dédié à l'apurement de ces divers impayés.
Inefficaces parce qu'inutilement complexes, ces dispositions ont été revues par l'article 65 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui a transféré au Fonds de solidarité logement (FSL) le soin d'accorder des aides financières aux familles éprouvant des difficultés à régler leurs factures d'eau ou d'énergie. Mais, comme pour le dispositif précédent, le FSL se révèle incapable de répondre aux enjeux...
Un décret n°2008-780 du 13 août 2008 relatif à la procédure applicable en cas d'impayés est venu remettre à plat tout le dispositif et prévoit que le redevable doit régler la facture dans un délai de 14 jours après l'émission de la facture ou du délai de paiement qu'elle prévoit. A l'issue de ce terme, le gestionnaire adresse au consommateur un courrier l'informant qu'une absence de règlement dans les 15 jours suivant peut entraîner une suspension de la fourniture du service. Sans réaction, un second courrier informe l'usager de la date de restriction effective du service qui ne peut intervenir en moins de 20 jours. Les délais mentionnés sont accrus de 15 jours si le redevable bénéficie d'un tarif social ou s'il a reçu une aide du FSL.
En cas de dépôt d'un dossier de demande d'aides au FSL, le gestionnaire ne peut couper la fourniture du service dans les deux mois suivant le dépôt de ce dossier, afin de laisser le temps à l'organisme d'instruire la demande et de statuer. Par ailleurs, les coupures ne peuvent intervenir pour des ménages qui ont obtenu une aide du FSL dans les 12 mois précédent la date limite de paiement de la facture.
Enfin, si la restriction du service est opérée et que l'alimentation n'a pas été rétablie dans les trois jours suivants, le fournisseur est tenu d'informer les services sociaux du département ou de la commune pour qu'ils puissent intervenir et accompagner la famille en difficulté.

Finances territoriales