Archives

Territoires - Fonds européens : comment l'argent de l'Est profite à l'Ouest

L'Allemagne tire grandement parti de la mise en oeuvre de la politique régionale dans les pays d'Europe de l'Est, selon une étude commandée par le gouvernement polonais. La France profite aussi de cette aubaine, particulièrement dans le secteur de la construction.

Les textes européens sur la réforme de la politique régionale sont arrivés tard et les négociations démarrent péniblement, sous l’effet conjugué de la prise de fonction récente de certains gouvernements (Espagne, Finlande) ou d’élections qui vont avoir lieu, comme en France.
La présidence danoise de l'UE a, de son côté, fait le choix de se consacrer aux discussions budgétaires pour 2014-2020, laissant à la présidence chypriote le soin de s’occuper, à partir de juillet, des aspects déterminants de la réforme des fonds structurels.

Cure de minceur

Malgré cet agenda peu favorable, la Pologne continue de porter la voix des régions en Europe. De passage à Paris, la ministre Elżbieta Bieńkowska, en charge du développement régional, a dévoilé les principales conclusions d’une étude qui tente de désamorcer la polémique opposant les pays riches aux pays pauvres.
Les premiers, dont la contribution au budget de l’UE dépasse le montant des aides européennes qu’ils perçoivent, sont tentés d’infliger une cure de minceur au budget communautaire à partir de 2014. Le gouvernement français, qui donne sa préférence aux subventions agricoles, se dit prêt à rogner sur les fonds régionaux.
Même coûteuse, la mise en oeuvre de la politique de cohésion dans les pays de l’Est bénéficie indirectement aux pays de l’Ouest, conclut l’étude, qui a été menée pendant deux ans par l’Institut de recherches structurelles, installé à Varsovie, et l'entreprise Raytech. Chaque euro investi par la France au titre du financement de la politique régionale en Pologne, Hongrie, Slovaquie et République tchèque générerait des exportations supplémentaires pour le pays à hauteur de 20 centimes.
En Allemagne, le bénéfice est bien plus intéressant : l’Etat percevrait, sous forme d’exportations, plus du double du montant qu’il verse aux quatre pays de l’Est. Ces projections restent sujettes à caution car elles ont été réalisées sur la période 2004-2015 en se fondant sur l’hypothèse d’une consommation intégrale des fonds dans les trois prochaines années, ce qui n’est pas acquis.

"Aumône"

Les chantiers cofinancés par l’UE profitent en tout cas aux entreprises françaises du BTP, qui exécutent des ouvrages sur place. Entre 2004 et 2009, l’activité supplémentaire générée par la mise en oeuvre de la politique régionale dans les pays du groupe de Visegrad représente 5% des exportations françaises dans le secteur de la construction, expliquent les auteurs de l’étude.
Entre 2007 et 2013, les quatre anciens pays du bloc soviétique perçoivent 130 milliards d’euros au titre de la politique régionale, dont plus de la moitié au profit de la Pologne. Autant dire que l’enjeu financier est de taille dans ces pays, qui veulent une politique régionale forte mais sans pour autant obéir à une logique "d’aumône".
"Les régions riches ont aussi des besoins", fait remarquer Elżbieta Bieńkowska, qui s’étonne de la démarche entreprise par le gouvernement danois, actuellement en charge de la présidence tournante de l’UE. Lorsque Varsovie assumait cette fonction jusqu’en décembre, la stratégie polonaise consistait "à discuter d’abord des objectifs de la politique de cohésion" afin que le budget nécessaire à leur réalisation soit ensuite octroyé. Copenhague a choisi de faire l’inverse. "Une contradiction", selon elle.