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Environnement - Faut-il de nouveaux "artisans du Grenelle" ?

Deux ans jour pour jour après la sortie d'une première circulaire, le ministère de l'Ecologie enjoint à nouveau aux préfets d'accélérer le mouvement de "territorialisation" du Grenelle. Un nouveau réseau d'"artisans du Grenelle" doit notamment émerger.

Dans un courrier en date du 23 mars dernier qui s'adresse aux préfets de région et de département, la ministre de l'Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet précise l'objectif de "territorialisation" du Grenelle de l'environnement. Elle y souligne que pour atteindre les engagements fixés par les lois Grenelle, les acteurs locaux doivent se saisir des "opportunités" que représentent les outils juridiques créés et les appels à projets lancés, afin de "les transformer en réalisations et que celles-ci soient visibles pour nos concitoyens".
Elle invite ainsi les préfets, "tout en tenant compte des spécificités de [leur] région ou de [leur] département", à agir en priorité sur la mise en oeuvre des schémas et plans territoriaux prévus par le Grenelle, notamment les schémas régionaux climat-air-énergie (Srcae), pour lesquels un décret d'application est sur le point d’être signé. La lettre de la ministre insiste aussi sur la nécessité d’une "prise en compte des besoins de formation" liés à la transition vers une économie plus verte et d’un "accompagnement dynamique" du secteur du bâtiment en pleine mutation. "Si ce n’est pas déjà fait", ajoute le ministère, il est temps pour les régions de former un comité de suivi du Grenelle qui se réunira deux fois par an.

Des "artisans du Grenelle"

Avec l’appui des services déconcentrés, de nouveaux réseaux d’acteurs doivent émerger. Constitués dans chaque département d’une dizaine de personnalités issues du monde associatif, des entreprises ou des collectivités, qui seraient à l’initiative d’"actions visibles" et donc à même de diffuser leurs enseignements, ces groupes devront commencer à être esquissés dès la mi-avril par les préfets. La mesure n’a pas manqué de faire grincer des dents les syndicats. "Cette recherche d’intervenants extérieurs et de nouveaux 'artisans du Grenelle', qui intervient alors que les effectifs des services de l’Etat en département auront en six ans fondu de deux tiers d’ici 2013, est tout bonnement une opération de communication et ne fait que renforcer le transfert des missions publiques vers le secteur privé", juge-t-on à Force ouvrière. 

Une concrétisation variable

Depuis la première circulaire dite de "territorialisation" publiée le 23 mars 2009, qui restait évidemment très générale, nul doute qu’il y a eu des avancées. "Les territoires se saisissent des thématiques du Grenelle et les inscrivent dans toutes les dimensions du développement durable", résume ce nouveau courrier aux préfets. Un constat étayé par le retour de terrain dont le ministère bénéficie suite au questionnaire adressé en juin dernier à une vingtaine de préfets de région. Chantier par chantier, la synthèse de leurs réponses qui se trouve annexée au présent courrier met en avant la diversité des formes de suivi du Grenelle prises en région, soit par le biais d’une conférence annuelle, soit par d’autres comités dédiés, parfois liés au comité Agenda 21, voire au comité économique et social comme cela est envisagé en région Nord-Pas-de-Calais. Quant aux profils environnementaux des régions, ils se généralisent et la dynamique des agendas 21 reste bien ancrée. Côté bâti, le rythme de réhabilitation thermique des logements sociaux reste "inférieur à celui prévu par la loi Grenelle 1", sauf en Lorraine. Dans le domaine des transports, notons que les chartes de réduction du CO2 passées avec les transporteurs routiers sont un outil apprécié des régions et, côté énergies renouvelables, qu’elles ont anticipé pour certaines la réalisation des Srcae par la réalisation de diverses études et des réflexions sur la gouvernance à mettre en place.
Les services régionaux s’impliquent par ailleurs sur le volet environnemental des outils et documents d’urbanisme dont traite le Grenelle (schémas de cohérence territoriale et plans locaux d'urbanisme) et le travail sur l’économie d’espace dans les formes d’aménagement est un axe qu’ils retiennent plus particulièrement, chaque région ayant dans le domaine ses propres pratiques, via des référentiels ou en impliquant les élus et agriculteurs. D’une région à l’autre, les modes d’actions sont souvent les mêmes en matière de préservation de la biodiversité - protection des captages, création d’aires protégées ou de zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff) - mais des spécificités sont propres à certaines d'entre elles : en Aquitaine, par exemple, la préfecture de région s'illustre en appuyant la dynamique de sauvergarde et d’acquisition des zones humides. Quant aux schémas de cohérence écologique, s'ils préexistaient sous d’autres formes dans certaines régions (Alsace, Ile-de-France, Rhône-Alpes), ils sont lancés, en cours de lancement (Poitou-Charentes, Midi-Pyrénées) ou ailleurs en phase de préfiguration. Les stades d’avancement sont également variables dans les domaines de la gestion des déchets et de la prévention des risques.