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Environnement - Quand le Grenelle se territorialise

Les préfets viennent de recevoir une circulaire du ministère de l'Ecologie qui les invite à mettre en oeuvre la "territorialisation" du Grenelle de l'environnement. Ils sont notamment chargés de renforcer le partenariat entre les services de l'Etat et les collectivités pour faciliter l'application des nombreuses mesures issues du Grenelle.

Dans une circulaire aux préfets datée du 23 mars dernier, le ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire (Meeddat) détaille la "feuille de route" des services de l'Etat pour la territorialisation de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. "Vous avez une responsabilité particulièrement lourde dans ce processus", prévient le ministère, qui insiste sur l'importance de la "mobilisation des services de l'Etat pour la mise en oeuvre des principes et priorités du Grenelle, tant dans les domaines qui relèvent directement de la responsabilité et de la compétence de l'Etat que dans leurs actions d'impulsion vis-à-vis des acteurs des territoires, des collectivités territoriales, des entreprises et de l'ensemble des citoyens".

 

Comptes-rendus d'actions attendus entre le 15 juin et le 15 juillet

Avant le 15 juin, les préfets devront rendre compte au Meeddat de la mise en oeuvre de six actions concrètes : "lancement d'audits énergétiques sur une proportion notable de bâtiments publics de l'Etat ; identification d'au moins une opération par département pouvant faire l'objet rapidement d'un contrat de performance énergétique (CPE) ; signature d'une opération de réhabilitation thermique de bâtiments avec un organisme HLM ; lancement des travaux d'élaboration ou d'actualisation du profil environnemental de la région, si le dernier profil a été fait avant 2007 ; élaboration de premières propositions opérationnelles pour la déclinaison de la Stratégie nationale pour la biodiversité ; définition des zones naturelles d'intérêt écologique faunistique et floristique (Znieff) terrestres de deuxième génération et des Znieff marines".
Les préfets devront aussi rendre compte avant le 15 juillet de six autres actions : "croiser les enjeux identifiés dans le profil environnemental de la région et les engagements du Grenelle de l'environnement, identification, après concertation, des engagements les plus porteurs pour la région ; identification des territoires présentant des enjeux tels que l'Etat pourrait souhaiter élaborer, en association avec les collectivités, une directive territoriale d'aménagement et de développement durables ; création ou réunion du comité régional des agendas 21 ; réunion de l'instance retenue pour assurer la mise en oeuvre du Grenelle dans (la) région (du préfet) ; repérage des besoins de formation pour les professionnels du bâtiment et détermination des actions à mener pour y répondre ; identification des projets exemplaires et remarquables portés par les collectivités territoriales et représentant de bonnes pratiques vis-à-vis des engagements du Grenelle de l'environnement".

 

Nouveaux documents de planification

Les préfets sont aussi chargés de "lancer sans attendre les premières réflexions" sur les nouveaux documents de planification prévus dans les textes de loi sur le Grenelle : le schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie, le schéma régional de cohérence écologique et le plan départemental ou interdépartemental de gestion des déchets issus de chantiers du bâtiment ou des travaux publics. La circulaire cite également les futures directives territoriales d'aménagement et de développement durables (DTADD) qui devront être définies "sur des périmètres pertinents en association avec les collectivités territoriales", les nouveaux plans régionaux santé-environnement et la révision des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) qui doivent intégrer "dès à présent les objectifs du Grenelle".
En matière de police de l'environnement, le ministère souligne que "les engagements pris dans le cadre du Grenelle supposent que les autorités publiques, Etat et collectivités locales, veillent au respect des règles en vigueur". La circulaire rappelle que dans le cadre du projet de loi Grenelle 2 "le contrôle des constructions, et en particulier de leurs caractéristiques thermiques, doit être profondément revu". Pour les schémas de cohérence territoriale (Scot), Grenelle 2 va aussi élargir "le contrôle de légalité du préfet sur les documents d'urbanisme aux hypothèses de contradiction avec un projet d'intérêt général, de consommation excessive de l'espace et d'incompatibilité manifeste avec le plan local de l'habitat, l'organisation des transports urbains ou la protection ou le rétablissement des continuités écologiques".

 

Evaluation des contrats de projet Etat-région

S'agissant des conventions et incitations financières, le Meeddat rappelle que "les contrats de projet Etat-région et la déclinaison des aides européennes qui sont élaborées localement dans le cadre des orientations nationales doivent intégrer les priorités du Grenelle". Ainsi "l'examen à mi-parcours des contrats de projet doit être l'occasion de les évaluer et de les faire évoluer en prenant en compte des critères de développement durable, notamment les émissions de gaz à effet de serre". Le ministère indique qu'une circulaire de la Diact intégrant ces éléments sera prochainement adressée aux préfets pour la révision à mi-parcours des programmes opérationnels des fonds structurels européens. "Dans le cadre d'une contractualisation infra-régionale, les projets territoriaux de développement durable et les agendas 21 locaux pourront devenir de nouvelles références utilisées dans des supports contractuels, soit à travers l'aide à l'élaboration du projet (...), soit dans la mise en oeuvre d'actions adoptées par la collectivité territoriale dont l'impact est majeur pour la durabilité du territoire", précise encore la circulaire du Meeddat.
Pour organiser la concertation et coordonner les actions au niveau régional, les préfets ont le choix entre trois modalités : des comités régionaux "agendas 21", un comité régional de suivi du Grenelle sur le modèle de celui qui existe au niveau national ou '"une autre assemblée réunissant les cinq collèges du Grenelle [associations, élus locaux, syndicats, entreprises, Etats, NDLR] qui existe déjà ou qui a déjà été réunie" par certains. La solution retenue doit être transmise au ministère avant le 15 juillet.

 

Sujets à évoquer avec les collectivités

Vis-à-vis des collectivités territoriales, "le rôle des services de l'Etat peut prendre essentiellement deux formes : l'impulsion et la mise à disposition d'outils", souligne la circulaire qui liste les dossiers prioritaires à évoquer dans le cadre de la démarche Grenelle avec les différents niveaux territoriaux, sans oublier le thème transversal de l'éco-responsabilité des autorités publiques et les démarches d'agendas 21 locaux.
Avec les régions, il s'agit des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie, de la cohérence régionale des infrastructures de transport, des enjeux de la formation professionnelle dans le domaine du bâtiment, de la participation des associations aux comités économiques et sociaux régionaux (CESR), de la rénovation énergétique des lycées et des locaux d'enseignement professionnel. Avec les départements, les thèmes à mettre en avant sont les plans Climat territoriaux, la cohérence des infrastructures de transport, la programmation de la prévention, de la valorisation et du traitement des déchets, la lutte contre la précarité énergétique des ménages, la rénovation thermique des collèges, des établissements sociaux et des services départementaux d'incendie et de secours.
Avec les communes et leurs groupements, les sujets à évoquer sont les plans Climat territoriaux et leur cohérence avec les agendas 21 locaux quand ils existent, les orientations en matière d'urbanisme "pour parvenir à des villes plus durables", la programmation et le financement additionnel des rénovations du parc HLM de leur territoire, les obligations de traitement des eaux usées. La circulaire invite aussi les préfets à faire "un travail spécifique d'explication et de préparation des esprits" sur le thème de la trame verte et bleue. De même, dans le domaine des déchets, "le nombre et la diversité des engagements et mesures (...) impliqueront un travail d'explication dans la durée et d'animation de la mise en oeuvre". Le Meeddat rappelle que les services de l'Etat en région peuvent d'ores et déjà fournir des informations, voire aider à former les personnels des collectivités en s'appuyant notamment sur l'Ademe, sur les centres techniques de l'équipement, le centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (Certu) et les services construction publiques des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) et des directions départementales de l'équipement et de l'agriculture (DDEA). 
La circulaire précise enfin que le secrétaire d'Etat à l'Aménagement du territoire, Hubert Falco, se rendra dans les différentes régions dans les prochains mois "afin de faire connaître les actions menées sur le terrain et les progrès des politiques du Grenelle".

 

Anne Lenormand