Une entreprise à but d’emploi fournit des légumes pour la restauration collective (35)
Dans l’agglomération redonnaise, l’entreprise à but d’emploi (EBE) Tezea porte une activité de légumerie répondant aux besoins de la restauration collective. Lancée en pleine crise sanitaire en 2020, la légumerie est devenue en quatre ans un maillon essentiel de l’alimentation durable du territoire.
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© ville de Pipriac
Entre Rennes et Nantes, les 31 communes de Redon agglomération sont réparties sur trois départements : l’Ille-et-Vilaine, le Morbihan et la Loire-Atlantique, et deux régions : la Bretagne et les Pays de la Loire. Le territoire enregistre le 3e plus fort taux de chômage de Bretagne, une importante disparition du secteur agricole et peu d’industries agroalimentaires. En revanche, le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS) est dynamique, avec 19 % des emplois. Tezea, une entreprise à but d’emploi (EBE), est d’ailleurs créée dès la première expérimentation des Territoires Zéro chômeur de longue durée en 2017. C’est aussi l’année où Redon agglomération lance son Programme agricole et alimentaire de territoire (PAAT) visant la production et la consommation responsables, et s’attaque au sujet de l’approvisionnement en circuit court des restaurants scolaires.
La difficile logistique en milieu rural
En quelques années, trois tentatives de plateforme entre producteurs locaux et restaurants scolaires échouent. L’approvisionnement des cantines se heurte aux frontières administratives, aux différences de labels ainsi qu’à la difficile logistique en milieu rural. « Un des enseignements est que l’intercommunalité n’est pas la bonne échelle pour porter de tels projets, explique Nicole Giraud, responsable du pôle agriculture, alimentation et ESS à Redon agglomération. L’agglomération doit apprendre à travailler dans chaque département en tenant compte des disparités locales, notamment le fait que la restauration soit gérée en régie ou déléguée. »
Répondre à un besoin non couvert
Une autre idée germe alors, celle de doter le territoire d’un outil de transformation de produits bruts, répondant mieux aux besoins de la restauration collective. Le portage est confié à Tezea. « Une EBE est là pour donner un emploi à des personnes privées de travail en répondant à des besoins non couverts sur un territoire », explique Nicole Giraud. « Les légumeries ont des difficultés à trouver leur stabilité économique à cause de la main-d'œuvre nécessaire et de faibles marges par rapport aux produits bruts, poursuit Serge Marhic, directeur de Tezea. L’EBE a comme finalité d’asseoir un modèle économique avec des activités utiles et non concurrentielles, en prouvant que cela ne coûte pas plus cher que l’allocation versée aux personnes privées d’emploi. »
Des légumes crus prêts à l’emploi
« La légumerie a été expérimentée pendant la crise sanitaire de 2020 dans un laboratoire loué dans une ferme, témoigne le directeur de Tezea. Le ralentissement de la restauration collective avait entraîné des surplus chez les maraîchers locaux. » La principale activité est le légume de 4e gamme (pomme de terre, carotte, courgette, oignon, potiron) et quelques fruits (pomme et fraise). Il s’agit d’un produit frais lavé, épluché, découpé et mis sous vide avec une date limite de consommation à 7 jours. « Il a été difficile d’évaluer les quantités de légumes disponibles auprès des maraîchers en agriculture biologique ou conventionnelle, poursuit le directeur de Tezea. Nous donnons la priorité aux petits volumes. Nous nous fournissons auprès d’une dizaine de maraîchers. » Très vite, la légumerie s’impose comme un maillon dans la chaîne alimentaire durable. « Tezea fait le lien entre les producteurs et les structures de restauration collective tout en créant de nouveaux débouchés pour les maraîchers locaux. Il est important de regarder l’EBE par le prisme de l’expérimentation zéro chômeur longue durée et donc de la création d’emplois. »
Polyvalence et souplesse permettent la montée en charge
En 2021, Redon agglomération obtient 80 000 euros pour pérenniser le projet de légumerie via le Plan relance des PAT, piloté par la Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Bretagne (Draaf). « Nous avons fait le choix d’installer la légumerie à côté de notre recyclerie à Pipriac, afin de mutualiser les effectifs, explique le directeur de Tezea. Notre force est la polyvalence des personnes employées, ce qui nous donne de la souplesse car on peut organiser leur temps de travail sur plusieurs activités. » Tezea gère en effet 33 activités : laverie, bois de chauffage, recyclerie… pour 60 personnes employées. Depuis septembre 2024, Tezea produit ses légumes prêts à l’emploi dans de nouveaux locaux équipés d’une ligne de production semi-industrielle sur plus de 250 m². La légumerie monte progressivement en charge, en passant d’un effectif de 8 à 12 personnes à fin 2025 et d’une production hebdomadaire d’une tonne sur trois jours à trois tonnes sur cinq jours. « Nous veillons à un développement lent et bien cadré. Il faut croître doucement pour asseoir le modèle au regard des moyens, des effectifs et des capacités d’investissement. »
Des selfs qui jouent le jeu de la transformation locale
La légumerie apporte de la souplesse aux structures de restauration qui peuvent concevoir leurs menus à 15 jours et passent leur commande au plus juste une semaine à l’avance. Elle approvisionne 25 structures sur la partie Ille-et-Vilaine de l’agglomération : cantines, restaurants d’entreprises, Ehpad, communes, hôpitaux… « Pour le moment, nos principaux débouchés sont les restaurants scolaires. Le département d’Ille-et-Vilaine impose aux collèges de se fournir auprès de notre légumerie pour assurer une part de produits bios et locaux dans ses menus. Mais nous ciblons toute la restauration collective, pas uniquement les cantines scolaires, afin de maintenir l’activité durant l’été. » En 2025, Tezea devrait équilibrer son modèle avec une production suffisante, même si les factures d’eau et d’électricité sont encore une incertitude et pèsent sur le budget.
Un autre modèle expérimenté pour les communes du Morbihan
Redon agglomération poursuit sa démarche d’accompagnement de la restauration scolaire vers une alimentation durable et locale. Pour les cantines du Morbihan, principalement en régie, une expérimentation est lancée depuis juin 2024 avec l’association La Palette paysanne, une plateforme portée par les paysans du Pays de Questembert.
Budget d’investissement de la légumerie
Total : 900 000 euros TTC
dont :
Tezea : 450 000 € (prêt)
Département Ille-et-Vilaine : 215 000 €
Agglomération de Redon : 130 000 € dont 80 000 € via la DRAAF
Région Bretagne : 30 000 €
Autofinancement : 155 000 €
Budget de fonctionnement
L’État (Fonds d’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée) et le Département versent à Tezea une aide à l’emploi entre 18 000 et 20 000 euros par Équivalent temps plein et par an
Redon Agglomération
Nombre d'habitants :
Nombre de communes :
Jean-Luc Levesque
Rémi Beslé
Nicole Giraud
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