Saint-Dionisy soutient l’agriculture en circuits courts (30)
Pour conforter l'agriculture sur son territoire et lui offrir des débouchés, la petite commune de Saint-Dionisy a développé un projet original : elle met à disposition des terres agricoles, en signant avec l'agriculteur débutant un prêt à usage, gratuit sur 6 ans. L’agriculteur bénéficie en outre d'ateliers relais pour tester son activité et a accès à une boutique de producteurs. En fonctionnement depuis 2021, le dispositif associe dans un montage original la mairie, une société coopérative d’intérêt collectif et une association de producteurs.
Ouverte six jours sur sept, la Halte paysanne de Saint-Dionisy propose les produits agricoles d'une vingtaine de producteurs locaux. Parmi eux, Carole Nonat cultive ses légumes bios et élève des poules tout à côté, comme les paysans-boulangers Benoît et Hugues Cassan, qui font pousser leurs céréales à quelques centaines de mètres. Ces deux exploitations agricoles officient sur des terres mises à disposition gratuitement par une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) et utilisent des bâtiments relais de la mairie, en continuité de la boutique. Dans la petite commune située à 12 kilomètres de Nîmes, « ce lieu original est le résultat de plus de 10 ans de travail, un projet enclenché par mon prédécesseur », souligne Jean-Christophe Grégoire, l'actuel maire.
À Saint-Dionisy, la pression foncière est forte : « Entre les collines qui nous bordent et la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique du bassin du Rhony, la pratique agricole est très contrainte : chaque hectare compte », souligne le maire. Lorsqu'en 2010, l'ancien maire apprend qu'un agriculteur souhaite vendre près de 8 hectares au profit d'une brocante de plein air, il sollicite le vendeur pour lui demander de patienter afin qu'il trouve les moyens de faire aboutir un projet agricole sur le site. « La mairie avait déjà acquis un autre terrain et réfléchissait à un projet agricole local, mêlant production et vente. »
Un projet complet au service de l'agriculture
Avec le concours de l'Institut Agro de Montpellier et de la Chambre d'agriculture du Gard, la petite commune met alors sur pied son concept : des terres louées à des agriculteurs voulant se tester en bio, complétées de locaux agricoles et d'une boutique de producteurs locaux. Mais la petite commune n'a pas les moyens d'acheter les terrains, ni de financer l'ensemble de ces bâtiments. « Le tour de table financier a duré près de dix ans, c'est un projet qui peut paraître évident aujourd'hui, mais qui n'était pas si simple à mettre sur pied avant le Covid, » explique le maire.
« Au départ, nous avions sollicité une foncière agricole pour acquérir les terres », précise Michel Gabach, l'ancien maire et actuel président de la SCIC Bioo-Rhony. Mais la solution excluait la mairie du choix des agriculteurs à installer et de la gestion des locaux. La mairie a alors préféré se tourner vers le statut de SCIC, qui lui permet d'être actionnaire, aux côtés d'autres partenaires. La SCIC Bioo-Rhony est ainsi née en 2018 : elle associe la mairie, Nîmes Métropole, des particuliers (investisseurs militants), des exploitants agricoles ainsi que deux associations de consommateurs. En plus de l'acquisition des terrains, elle s'est chargée d'aménager les parcelles pour permettre leur exploitation : création de chemins, approvisionnement en eau, plantation de haies…
Des bâtiments sous forme d'ateliers relais
Côté bâti, la mairie souhaitait conserver la mainmise et a fait le tour des financeurs. Avec l'aide de la Région Occitanie et des fonds européens, elle a acté le principe d'ateliers relais pour les quatre hangars de 100 mètres carrés environ chacun. « Comme pour des ateliers relais artisanaux, nous louons pour une période de six ans, renouvelable une fois. L'idée, c'est de mettre le pied à l'étrier à des jeunes qui s'installent, avec un cahier des charges bio », explique le maire. En 2020, en partenariat avec la Chambre d'agriculture et la SCIC, la mairie a retenu les 4 premiers locataires des parcelles et des bâtiments : « Nous leur louons les bâtiments au prix modique d’un euro du mètre carré par mois, et les terres sont mises à disposition gratuitement par la SCIC, précise le maire. Ces prix modiques leur permettent de tester leur modèle économique, avant d'aller plus loin ». Trois des locataires vendent aujourd'hui leurs produits à la boutique voisine.
Une boutique autogérée
Car la dernière pièce du puzzle est la Halte paysanne, une boutique de producteurs locaux. « Associés dès le démarrage du projet, nous avons pu donner nos idées pour la conception de cette boutique, indique Florent Rousseau, président de l'association de producteurs Vaunage Terres Durables, créée pour l'occasion. Plusieurs d'entre nous vendaient déjà dans d'autres boutiques aux alentours. » La surface de la boutique a été agrandie, et l'association a mobilisé un financement participatif pour aménager l'intérieur. Dans la boutique autogérée ouverte en mars 2021, les 22 producteurs prennent leur tour de garde pour assurer la vente, deux demi-journées par mois. La mise en commun de 15 % de leur chiffre d'affaires leur permet de financer le loyer de 750 euros par mois et les charges.
Un projet à répliquer
« Même si nous avons déjà beaucoup de clients fidèles, on a encore besoin de se développer et de communiquer pour mieux se faire connaître, souligne Florent Rousseau. Une boutique de producteurs, il faut souvent dix ans pour qu'elle fonctionne à plein régime. » Du côté agriculteurs locataires de la SCIC, plusieurs ont déjà beaucoup investi : serres, arbres fruitiers… « Nous allons devoir réfléchir à comment les indemniser le jour où ils prendront leur envol vers leurs propres terres et seront remplacés par de nouveaux projets », souligne l'ancien maire Michel Gabach. En attendant cette étape à venir, Saint-Dionisy fait régulièrement visiter le projet à des collectivités intéressées. « Il mériterait vraiment d'essaimer », conclut l'actuel maire.
Le projet de Saint-Dyonisis et ses partenaires en quelques chiffres
- 774 000 euros : le coût de la construction de la boutique et des ateliers relais, subventionnés à 60 % (17,5 % État (Dotation d'équipement des territoires ruraux, dotation de soutien à l'investissement local), 13,7 % Union Européenne (fonds Leader, Feader), 9,8 % région Occitanie, 8,9 % département du Gard, 8,5 % Nîmes Métropole, 1,3 % syndicat d'éclairage public). La mairie a financé 14,6 % du projet sur fonds propres et emprunté 25,8 %. La location des bâtiments permet de rembourser les annuités d'emprunt.
- 116 000 euros : le coût d’achat et d'aménagement des terres agricoles par la SCIC Le Bioo-Rhony qui compte 27 associés.
- 22 producteurs permanents vendent à la Halte paysanne. L'association Vaunage Terres durables les regroupe, ils consacrent 15 % de leur chiffre d'affaires pour faire fonctionner la boutique. Après 3 ans d'existence, elle affiche un chiffre d'affaires total de 200 000 euros.
Commune de Saint-Dionisy
Nombre d'habitants :
SCIC Le Bioo-Rhony
Michel Gabach
Association Vaunage terres durables
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