400 clients par semaine au magasin de producteurs de Grosmagny (90)

L’histoire commence en 2018, avec la mise en vente de l’ancien café-restaurant de Grosmagny, fermé depuis une dizaine d’années. « Quand le bâtiment a été mis en vente, témoigne le maire, Maurice Leguillon, la commune a voulu l’acheter par souci de protection et pour maîtriser ce qui se passait dans le centre bourg. Nous n’avions pas encore de projet pour ce bâtiment, ni les moyens d’investir, parce que nous étions en train de construire une nouvelle école et de réhabiliter la mairie. C’est l’Établissement public foncier du Doubs qui l’a acquis pour le compte de la commune, qui avait alors 10 ans pour le racheter. »

L’idée germe assez rapidement de faire revenir un commerce pour animer le centre bourg : d’abord un magasin de producteurs, puis à terme un café-restaurant surmonté d’un logement. « J’avais connaissance d’un magasin de produits locaux en Haute-Saône, poursuit le maire. Il est mis à disposition d’un groupement de producteurs par la communauté de communes à Saint-Loup-sur-Semouse, qui est un village plus petit que Grosmagny. Cela fait 10 ans que cela fonctionne chez eux. »

La commune s’adresse à la chambre d’agriculture, qui réalise une étude de marché et organise des réunions avec les producteurs locaux, de novembre 2018 à mars 2019. Une vingtaine d’agriculteurs se déclare intéressée, non seulement pour la création d’un magasin, mais aussi pour un atelier de découpe et de transformation de la viande.

Un soutien sans réserve de la préfecture

La mairie fait appel à un cabinet d’architectes. Muni de l’avant-projet architectural et de l’estimation budgétaire, Maurice Leguillon entame la tournée des financeurs fin 2019. « Le préfet s’est enthousiasmé pour notre projet et nous a promis de nous aider à trouver les financements nécessaires. Ce soutien de l’État est resté constant, avec trois préfets successifs sur les cinq ans de la gestation du projet. » La préfecture incite la commune à découper l’opération en tranches de travaux, pour obtenir des possibilités de financement supplémentaires. « Nous avons donc retravaillé le dossier avec notre maître d’œuvre pour faire d’abord le magasin et l’atelier, puis le restaurant et le logement. Pour finir, les plans ont été modifiés trois fois ! En dernier lieu, les services vétérinaires de Belfort nous ont fait réviser la partie laboratoire de découpe et transformation. »

Forte du soutien de la préfecture, la commune organise une conférence des financeurs en août 2020. Sont conviés la Banque des Territoires, le conseil départemental du Doubs, la région Bourgogne-Franche-Comté, le Parc des Ballons des Vosges, le Comité de massif des Vosges, la préfecture, la chambre d’agriculture, la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Belfort… « La région nous a promis un financement, sous réserve de confirmer la viabilité du projet par une étude de marché plus poussée. » L’année 2021 est donc consacrée à consolider le dossier pour obtenir les financements. La CCI fait réaliser une étude très complète, qui estime la clientèle suffisante, avec une zone de chalandise de 20 minutes de trajet.

Accompagnement de la CCI

À l’issue de l’étude, sept agriculteurs ainsi qu’un boucher charcutier, pressenti pour être le futur gérant, constituent l’association « Les producteurs d’à côté ». Celle-ci est accompagnée par la CCI en vue de préparer le fonctionnement du futur magasin et de l’atelier de transformation. « Pour la gérance, nous avons eu la chance de trouver une personne motivée et très qualifiée habitant le secteur, souligne le maire. Autrement, nous aurions fait un appel à candidatures via la CCI. » Le financement est finalement bouclé en 2021, avec 250 000 euros de la part de la région et 772 000 euros du Comité de massif des Vosges. Les 320 400 euros restant à la charge de la commune sont prêtés par la Banque des Territoires.

Une fréquentation au-delà des prévisions

Les travaux du magasin sont réalisés en 2022 et 2023. Le gérant et deux producteurs issus de l’association constituent une société commerciale et le magasin « Le Verdoyeux » ouvre en mars 2024. Sans être généraliste, il offre une belle diversité de produits locaux, élaborés dans un rayon de 50 kilomètres (viandes, légumes, miel, vin, bière, pain…) ainsi qu’une offre traiteur. Le premier mois, chaque semaine, 700 clients franchissent le seuil du magasin, qui compte quatre jours et demi d’ouverture. « Le gérant ne s’attendait pas à ça ! Pour ma part je ne trouve pas ça étonnant, avec 3 500 à 4 000 véhicules par jour sur la départementale à 150 mètres du magasin. Nous avons aussi beaucoup communiqué avec les médias locaux. » La fréquentation se stabilise ensuite à 400 clients par semaine. Fin 2024, l’activité de découpe et de mise en colis de viande démarre.

La commune poursuit la réhabilitation du bâtiment en 2024 et se prépare à rechercher une nouvelle gérance pour le futur café-restaurant, sur le même principe que le magasin. « Les clients du magasin nous le disent : ils veulent boire un café à côté ! Le projet a été long à monter, mais c’est une très bonne opération pour la commune. Elle a augmenté son patrimoine et perçoit des loyers, et le bourg se ranime », conclut le maire.