En clôture du 84e congrès de l’USH, Valérie Létard prône une méthode "pragmatique et décidée"
Très chaleureusement accueillie au 84e congrès de l’USH pour sa première intervention publique en tant que ministre de plein exercice du Logement et de la Rénovation urbaine, Valérie Létard a promis aux acteurs d’un secteur du logement social en pleine crise son soutien et sa combativité. Mais elle n’a pris aucun engagement à la veille du discours de politique générale du Premier ministre. Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH, a rappelé quant à elle dans son discours de clôture les multiples urgences auxquelles doit faire face le mouvement HLM.
"L’heure doit être à la réconciliation des Français avec eux-mêmes ; le logement peut amener sa pierre à l’édifice", a souligné Emmanuelle Cosse lors de son discours de clôture du 84e congrès de l’Union sociale pour l’habitat ce jeudi 26 septembre à Montpellier.
Comme les intervenants tout au long des tables rondes qui se sont succédé durant ces trois jours de débats, la présidente sortante de l’USH s’est félicitée de disposer avec Valérie Létard d'un ministre de plein exercice. Avant de lui transmettre un "message collectif" à l’intention du nouveau gouvernement : "Chaque euro investi dans notre secteur revient doublé dans le budget de l’État", a souligné Emmanuelle Cosse.
Une équation aussitôt appliquée à "la ponction de la RLS (réduction de loyer de solidarité) qui, depuis 2018, ne fait qu’entraver notre capacité de production et diminuer notre activité". L’ancienne ministre et ancienne secrétaire nationale d’Europe Écologie Les Verts (EELV) a déploré "un prélèvement délétère pour notre secteur et à court terme pour les finances publiques" et demandé une nouvelle fois la suppression.
"La PEEC n’est pas une caisse dans laquelle on peut piocher"
Emmanuelle Cosse a dit à Valérie Létard "l’urgence de baisser le taux du Livret A" et a mis en garde la ministre contre toute tentation de toucher à la PEEC (participation des employeurs à l’effort de construction, ex 1% logement), "qui n’est pas une caisse dans laquelle on peut piocher sans vergogne". La présidente de l’USH a rappelé que la PEEC finançait à la fois les aides distribuées à tous les opérateurs de logement social et soutenait les politiques publiques, notamment le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).
Emmanuelle Cosse a également rappelé à la ministre du Logement que le mouvement social avait "immédiatement soutenu les objectifs de la loi Climat et Résilience". Elle a vivement regretté, en l’espèce, le gel décidé cet été par le gouvernement de plus de la moitié des crédits des fonds annoncés il y a un an en clôture du congrès de l’USH pour soutenir la rénovation thermique du parc social. Patrice Vergriete avait alors annoncé une enveloppe de 400 millions par an sur trois ans pour soutenir et accélérer la rénovation énergétique des bâtiments.
"Madame la ministre, nous avons besoin que l’État tienne sa parole pendant plus de six mois quand il demande à des acteurs de s’engager pour plusieurs décennies", a martelé Emmanuelle Cosse, qui a également demandé à la représentante du gouvernement "que les décrets sur la Seconde vie soient enfin signés par tous les ministères".
"Je n’ai pas de baguette magique"
"Le discours de politique générale est dans quelques jours, pour moi, c'est délicat d'intervenir. Vous savez que je ne peux rien annoncer", s'est excusée Valérie Létard en réponse, rapporte l’AFP. La ministre a indiqué qu’elle proposera "dans quelques jours", "après le discours de politique générale", une méthode "pragmatique et décidée" pour "répondre à l'urgence et préparer l'avenir".
La ministre du Logement et de la Rénovation urbaine a appelé à "de nouvelles façons de construire ensemble" des solutions pour répondre à la crise, sans taire la "réalité budgétaire" dans laquelle s'inscrira son action. Le gouvernement "portera" cette "reconnaissance du rôle du logement", a-t-elle assuré. "Ce ministère de plein exercice peut trouver plus d'outils, plus de solutions, plus de visibilité."
"J'ai passé vingt ans à vos côtés, au Sénat, à défendre le monde du logement et du logement social, dans toutes ses acceptions, parce que c'est une grande famille", avait fait valoir la ministre mercredi 25 septembre, lors du traditionnel cocktail donné par la Caisse des Dépôts dans le cadre du congrès de l’USH. "On a besoin que tous les maillons de la chaîne soient réunis pour pouvoir construire un avenir à nos concitoyens, du plus fragile au plus aisé, qui, d'ailleurs, peut contribuer aussi à ce développement."
"Je n'ai pas de baguette magique", avait également indiqué l’ancienne sénatrice, "mais c'est un devoir en tant que personne engagée, surtout quand on est attaché à un univers comme le vôtre, de prendre des risques".
Une résolution pour "réinvestir la question du logement"
Peu avant, la résolution de ce 84e congrès de l'USH avait été adoptée à l'unanimité moins deux voix. "En logeant plus de 11 millions de nos concitoyens, en permettant l’accession sociale à la propriété de 12.800 ménages aux revenus modestes, les organismes de logement social sont un maillon essentiel de la chaîne du logement en France hexagonale et en Outre-mer", rappelle en préambule cette résolution présentée aux congressistes par Marianne Louis, la directrice générale de l'USH.
Le texte souligne le "droit d’être logé à des conditions qui permettent à chacun de vivre dignement, à des conditions plus économiques que s'il devait se loger sur le marché libre". "Il faut produire plus de logements sociaux pour donner une réalité au droit au logement et cesser de stigmatiser le retraité ou le smicard qui a eu une petite augmentation et qui occuperait indûment, du fait de cette légère amélioration de ses conditions de ressources, un logement", fait également valoir l’USH, qui rappelle qu’il faut, dans beaucoup de territoires, "de 7 à 10 ans pour se voir attribuer un logement social". Alors que 2,7 millions de ménages sont en attente d’un logement social, le mouvement HLM "ne se résoudra jamais à l’inaction ; il répondra toujours présent pour faire vivre le droit au logement."
Ainsi, "la baisse tendancielle de la programmation de logements locatifs sociaux et la crise de l’accession sociale à la propriété sont la marque des choix et des arbitrages budgétaires des dernières années", considère l’USH. "En fragilisant l’ensemble du secteur du logement, en instaurant la RLS, en haussant la TVA sur le logement social et en gelant les crédits à la rénovation énergétique, l’État s’est privé de recettes fiscales. Il a en même temps fragilisé l’emploi et abîmé l’appareil de production." "Cette fragilisation fait peser sur les locataires le risque d’une détérioration de leur cadre de vie en réduisant la capacité d’entretien des organismes HLM et fait subir aux demandeurs un allongement de leur durée d’attente."
Le mouvement HLM appelle le nouveau gouvernement "à réinvestir la question du logement, et singulièrement du logement social, en considérant le rôle social, économique et environnemental qui est le sien : celui d’un investisseur de long terme, au service de l’intérêt général, que l’on soit locataire, demandeur d’un logement social ou accédant à la propriété. Et celui d’un acteur de l’intérêt général qui participe à la décarbonation, à la création d’emplois et à l’amélioration du pouvoir d’achat."
› L’Alliance pour le logement avance sept mesures pour relancer le secteur de la constructionAlors que se profile le projet de loi de finances 2025, l’Alliance pour le logement qui réunit - outre l'USH - les professionnels du bâtiment, de la promotion immobilière, les architectes ou encore les agents immobiliers, a elle aussi fait une série de propositions à l’adresse de la nouvelle ministre du Logement Valerie Létard. L’Alliance pour le logement a préconisé le 26 septembre dans le cadre du congrès de l'USH l’adoption de sept mesures dont la mise en œuvre pourrait être rapide afin d’engager la reprise du secteur de la construction dans son ensemble. La première d’entre elles est le rétablissement d’un PTZ universel, voire d’un prêt à taux bonifié sur le même principe ; les professionnels réclament également le prorogation du dispositif Pinel "dans sa version 2022 et rouvert à la maison neuve" ; ils appellent à un choc en matière de production de logements sociaux en supprimant la réduction de loyer de solidarité (RLS) ainsi qu’en maintenant le dispositif destiné aux bailleurs sociaux "dont le violent rabotage apparait incompréhensible compte tenu des besoins" ; ils réclament l’adoption d’une réglementation pour favoriser "la vente en l’état futur de rénovation" des logements les plus énergivores ; et, enfin, le glissement des étapes à venir de la RE2020 afin d’éviter un nouveau choc d’inflation. A l’appui de ces demandes, l’Alliance pour le logement souligne que "les retombées économiques (...) et fiscales" de telles mesures viendraient contrebalancer la dépense budgétaire consentie. En somme, les partenaires revendiquent "l’utilité sociale" de cet ensemble de mesures destiné à "recréer de la confiance". Guillaume Ducable, JGPmedia pour Localtis |