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Emploi/Formation - Emplois d'avenir : risque-t-on de passer à côté de la cible prioritaire ?

"Le dispositif emplois d'avenir n'est pas une politique de l'emploi, c'est une politique de l'insertion des jeunes peu ou pas diplômés", a martelé Nathalie Hanet lors d'un colloque sur les emplois d'avenir organisé par Profession sport et loisirs – une fédération de 79 associations départementales faisant office de groupements d'employeurs pour quelque 14.000 adhérents –, mardi 23 mars à Paris (voir aussi ci-contre notre autre article de ce jour). Pourquoi cette mise au point ? Parce qu'avec seulement 12.000 contrats signés fin mars – alors que l'objectif de 100.000 signatures fin 2013 en exigerait deux fois plus –, la cible prioritaire fixée par le gouvernement peut faire débat. "Les jeunes pas ou peu diplômés, dont le CV ne passe pas la barre des recruteurs, sont aujourd'hui 500.000, c'est considérable, a insisté la conseillère technique auprès du ministre du Travail, chargée du déploiement des emplois d'avenir. C'est pourquoi François Hollande et Michel Sapin ont réitéré que nous ne changerons pas la cible du dispositif. Si nous cédons à la pression du chiffre, ce sont ces jeunes-là qui vont rester sur le carreau."

Un bon dispositif au mauvais moment ?

Preuve des difficultés à recruter des jeunes peu ou pas diplômés, trois des quatre jeunes en emploi d'avenir qui ont témoigné à l'issue de la conférence étaient déjà titulaires d'un diplôme dans le domaine du sport, et éligibles au dispositif car issus de zones de revitalisation rurale (ZRR). Si l'intérêt à faire appel à un jeune titulaire d'un diplôme pour prendre en main une association sportive paraît évident pour celle-ci, que peuvent en attendre les jeunes visés ? Tout d'abord une première expérience professionnelle dans le domaine qu'ils ont choisi. Ensuite la possibilité d'obtenir un diplôme plus valorisant économiquement, comme le brevet d'Etat activités physiques pour tous, véritable sésame dans un secteur du sport et des loisirs en croissance, y compris pour préparer le concours d'éducateur territorial des activités physiques et sportives (Etaps).
Ces exemples, s'ils n'ont pas valeur statistique, démontrent les limites du dispositif vis à vis de son public prioritaire : des jeunes non seulement pas ou peu diplômés, mais souvent sans repères et démotivés. A ce titre, la formation figure parmi les facteurs empêchant un plus large déploiement des emplois d'avenir. "Beaucoup de missions locales exigeaient que le plan de formation soit intégralement rédigé avant le recrutement, précise Nathalie Hanet. Ce n'est pas la meilleure idée qui soit, car les jeunes [visés par le dispositif] ont plutôt un mauvais souvenir de l'école. On se donne désormais trois mois pour que le plan de formation soit planifié."
D'autres obstacles ont été identifiés par les intervenants du colloque. "Les financements sont longs et compliqués à mobiliser", a ainsi confié Frédéric Bas, directeur emploi-formation de l'UCPA. Alors que pour Sébastien Darrigrand, délégué général de l'Usgeres (Union de syndicats et groupements d'employeurs représentatifs dans l'économie sociale), si c'est un "bon dispositif", il "n'arrive pas au bon moment, car il y a une crise du financement associatif". Or, selon le ministère du Travail, les contrats emplois d'avenir sont signés en priorité par des associations (43%), suivies par les collectivités locales (36%).

La réforme des rythmes scolaires au secours des emplois d'avenir ?

Nathalie Hanet a toutefois pointé quelques satisfactions pour le gouvernement. Dans le détail, plus de 60% des contrats en emplois d'avenir ont une durée de trois ans – le dispositif permettant une durée de un à trois ans – et 5% sont des CDI. A ce sujet, Nathalie Hanet a eu une sortie pour le moins iconoclaste lorsqu'elle a lancé : "Un CDI est presque moins engageant qu'un CDD, car cela se rompt beaucoup plus facilement. Face à des difficultés économiques, c'est quelquefois plus facile de motiver une rupture. Dans l'incertitude chronique dans laquelle évoluent les dirigeants associatifs, et j'en ai été, le pari en CDI est moins périlleux. Quand un financement s'interrompt au milieu d'un CDD, vous êtes chocolat." Par ailleurs, 95% des contrats signés le sont à temps plein. Autre chiffre encourageant : seuls 158 jeunes sont sortis du dispositif fin mars, dont la moitié à l'initiative de l'employeur.
Enfin, la réforme des rythmes scolaires pourrait donner un nouvel élan au dispositif à la rentrée prochaine. Nathalie Hanet souhaite en effet "apporter des réponses opérationnelles aux collectivités qui vont faire le choix de s'engager dans la réforme des rythmes scolaires dès cette année". Pour cela, une certaine souplesse devrait être de mise : "Le temps partiel n'est pas l'horreur absolue [sic] même si ce n'est pas notre souhait. Nous avons donné consigne aux opérateurs [missions locales, maisons de l'emploi, etc.] de signer des contrats de 30 à 35 heures par semaine pour les activités qui justifient un temps partiel." Le sport étant sur ce chapitre particulièrement concerné.