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Chômage - Emploi : ce que prépare Michel Sapin

Malgré un contexte budgétaire très serré, le ministre du Travail a assuré, le 25 juillet, que les crédits de la mission emploi seraient maintenus en 2013. Des crédits qui vont devoir notamment absorber le poids des deux mesures phares du gouvernement : les emplois d'avenir et les contrats de génération. Ce qui laisse présager des coupes claires dans les autres secteurs.

Le budget de l'emploi devrait être maintenu en 2013, a affirmé le ministre du Travail, Michel Sapin, lors de son audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale le 25 juillet 2012. Chaque ministère a reçu le 28 juin une lettre de cadrage de la part du Premier ministre, leur demandant de réduire globalement le montant de leurs dépenses de fonctionnement de 7% en 2013 par rapport à 2012, 4% en 2014 par rapport à 2013 et 4% en 2015 par rapport à 2014. Côté création d'emplois, des efforts de réduction de 2,5% sont demandés sur tous les secteurs sauf l'enseignement, la police, la gendarmerie et la justice.
Le ministère du Travail doit donc procéder aux mêmes efforts. Mais les chiffres du chômage étant très mauvais, le ministre a affirmé que le budget de l'emploi "aura les caractéristiques d'un budget prioritaire". Selon les derniers chiffres publiés le 25 juillet par le ministère, le chômage a encore augmenté le mois dernier pour atteindre 2,945 millions de personnes sans activité, soit 23.700 de plus qu'en mai (+0,8% sur un mois, +7,8% sur un an). Or les nouveaux outils que le gouvernement souhaite mettre en place, les emplois d'avenir les contrats de génération, ont un coût estimé respectivement à 2 milliards d'euros et entre 2 à 3 milliards d'euros par an. Le reste de la politique de l'emploi risque donc de subir des coupes.
"Le budget de l'emploi est un budget prioritaire. Il y aura donc en 2013 plus d'argent pour les emplois d'avenir et les contrats de génération que cette année, a assuré le ministre. Nous ferons en sorte que les autres crédits en dehors de la politique de l'emploi ne soient pas amputés au-delà du raisonnable pour permettre l'effort que mon ministère doit faire pour assurer un équilibrage financier." Ce vendredi, chaque ministre devait recevoir du Premier ministre sa lettre plafond sur les crédits qu'ils pourront dépenser. On en saura plus sur les économies visées.
Michel Sapin a précisé les modalités des deux nouveaux outils de la politique de l'emploi. Pour les emplois d'avenir, un texte de loi devrait intervenir très rapidement dès la rentrée parlementaire, "ce sera l'un des tout premiers textes examinés". L'objectif est de mettre en œuvre 100.000 emplois de ce type dès 2013, et 50.000 en 2014. Ils seront ciblés vers les jeunes les plus éloignés de l'emploi. "400.000 jeunes sont sans aucune qualification et sans emploi, ce sont des jeunes qui galèrent. Il faut arriver à en toucher entre 130.000 et 150.000", a indiqué Michel Sapin. Les emplois d'avenir auront une durée de trois ans et comprendront des formations et un accompagnement. Ils seront principalement créés dans le secteur non-marchand : les collectivités territoriales, les maisons de retraite, les hôpitaux, le secteur associatif et le secteur de l'économie sociale et solidaire.

Des contrats de génération par type d'entreprise et par secteur

Les contrats de génération seront quant à eux créés dans le secteur marchand, au sein des entreprises. Ils permettront à un jeune de trouver un emploi et à un senior de le conserver, avec un lien de tutorat entre les deux. Mais ces contrats auront des déclinaisons différentes en fonction des entreprises visées et de leur secteur d'activité. "On ne peut pas les mettre en œuvre de la même manière dans toutes les entreprises, chez un artisan ou une très grande entreprise. Il y aura nécessité d'une adaptation par secteur et entreprise", a signalé le ministre du Travail.
Cette adaptation se fera par le biais de négociations entre les partenaires sociaux qui aboutiront à un accord national interprofessionnel et des déclinaisons par branche. Un document d'orientation élaboré en septembre constituera le point de départ de ces négociations. L'objectif du gouvernement étant d'arriver à une application dès 2013, avec "une montée en puissance le plus rapidement possible". Le ministre est également revenu sur les contrats aidés, critiquant à nouveau la gestion du précédent gouvernement. "Au cours du premier semestre 2012, le précédent gouvernement a utilisé 250.000 de ces emplois aidés, dans un but évident. Mais il s'agit d'emplois d'une durée de trois mois en moyenne dont l'arrêt va alourdir les prochains chiffres du chômage", a précisé Michel Sapin. 340.000 emplois de ce type sont programmés pour 2012 et les deux tiers ont donc déjà été utilisés au cours des premiers mois de l'année. Le ministre souhaite retrouver l'équilibre en créant 80.000 de ces emplois supplémentaires, notamment dans les collectivités territoriales, avec des mesures d'accompagnement et de formation à la clé. Une circulaire de la DGFP (Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle) du 28 juin 2012 donne le détail des contrats ainsi programmés au second semestre, compte tenu de cette rallonge : 175.000 CAE du secteur non-marchand et 20.000 CIE du secteur marchand (voir circulaire ci-contre).
Quant au contrat d'autonomie créé pour les jeunes de banlieue, son sort n'est toujours pas tranché. "S'il venait à être supprimé, il serait remplacé par autre chose, car en dépit d'un bilan mitigé, il permet un repérage des jeunes qui ne sont pas inscrits dans les missions locales et leur propose un accompagnement", explique-t-on au cabinet de François Lamy. Le ministère délégué à la Ville compte aussi sur un "fléchage" important des emplois d'avenir vers les territoires prioritaires, alors que "le taux de chômage des jeunes des quartiers est de 42%" et que les contrats aidés ne les ciblent pas suffisamment. C'est en effet ce que vient de montrer la Cour des comptés dans son rapport "La politique de la ville, une décennie de réforme", publié le 17 juillet. "Les dispositifs de droit commun, ne ciblent pas suffisamment les quartiers prioritaires, dont le taux de chômage, en particulier celui des jeunes, est bien supérieur aux moyennes nationales, indique ainsi la Cour des comptes. La part des bénéficiaires de contrats aidés en zones urbaines sensibles a baissé entre 2006 et 2010, passant de 9,7% à 7,8% pour le secteur marchand et de 18,4% à 11,6% pour le secteur non-marchand."

Anticiper pour éviter la catastrophe

Lors de son audition, Michel Sapin a enfin abordé la question de l'automobile, estimant que l'urgence était la situation de PSA mais qu'il fallait aussi penser à anticiper. "Il faudrait éviter qu'on soit confronté à la catastrophe, il faut anticiper", a-t-il ainsi martelé, insistant sur la nécessité de mieux utiliser le chômage partiel et de modifier les procédures de licenciements. "D'un côté comme de l'autre, salariés et patronat, on nous dit que ça ne peut plus continuer comme ça. Il y a une voie pour la réforme qui se traduira par un projet de loi", a-t-il déclaré, confirmant les annonces déjà faites. Le 24 juillet, le vice-président du groupe PS à l'Assemblée, Thierry Mandon, avait dit qu'un texte de loi sur les licenciements abusifs serait présenté à la rentrée (voir ci-contre notre article du 24 juillet). Une proposition des députés du groupe GDR (Front de Gauche et progressistes) a déjà été déposée sur le sujet le 20 juillet.
Enfin, le ministre du Travail a insisté sur la nécessité de clarifier, unifier et rendre plus efficace la formation professionnelle. "Avec la même quantité d'argent, je crois que l'on peut faire beaucoup mieux, notamment par une territorialisation à travers le nouvel acte de décentralisation", a-t-il indiqué, sans donner plus de détails sur ce chantier. 

Emilie Zapalski

Les contrats de génération vont créer peu d'emplois selon l'OFCE
La signature de 500.000 contrats de génération ne permettra de créer qu'entre 48.000 et 99.000 emplois dans le secteur marchand pour un coût compris entre 0,06 et 0,22 point de PIB. C'est ce que concluent les économistes de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) qui ont passé au crible onze mesures du projet du quinquennat de François Hollande. "Si cette mesure vise à abaisser le coût du travail, engendrant un effet positif sur l'emploi, ce type de contrat reste largement exposé aux effets d'aubaine et de substitution", expliquent ainsi les économistes de l'OFCE.
Pour les emplois d'avenir, la sentence est un peu moins sévère. "Les emplois aidés du type 'emplois d'avenir' peuvent contribuer à faire baisser le chômage", estime ainsi l'institut. Mais l'impact de cette mesure sera quand même moins élevé que prévu. Elle permettra de créer 71.600 emplois en 2013, 35.700 en 2014 et zéro de 2015 à 2017, soit 107.300 emplois au total pour 150.000 emplois subventionnés et un coût annuel de 1,44 milliard d'euros en 2013, 3,31 milliards en 2014 et 3,45 milliards d'euros annuels de 2015 à 2017.
Pour les économistes de l'OFCE, les effets d'aubaine seront importants dans le secteur marchand mais assez faibles dans le secteur non-marchand où ces emplois d'avenir seront majoritairement créés. L'OFCE s'est aussi penché sur la défiscalisation des heures supplémentaires, estimant que le dispositif ne "dégradera par le marché du travail", avec 17.900 emplois créés ou sauvegardés. Il permettra en revanche de réduire le déficit de 5,2 milliards d'euros, soit 0,26 point de PIB en 2014.
E.Z.

 

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