Déontologie - Elus / agents : le rapport Nadal recommande plus de contrôles et de transparence
Un an après la mise en place de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), son président, Jean-Louis Nadal estime qu'il est "pressant" de parachever les mesures visant au respect de la probité par les responsables publics et à la transparence. Le président de la République l'avait missionné sur ces questions, le 1er octobre dernier après l'affaire Thomas Thévenoud, écarté du gouvernement pour non-paiement de ses impôts. Le procureur général honoraire de la Cour de cassation a donc remis, le 7 janvier, vingt propositions pour "renouer la confiance publique". Plusieurs concernent directement les élus et les agents publics locaux.
L'ancien haut magistrat est partisan d'étendre aux fonctionnaires les principes déontologiques prévus par les lois sur la transparence de la vie publique. Certes, le projet de loi sur la déontologie des fonctionnaires, que l'Assemblée nationale devrait examiner en 2015, répond plutôt bien à ce souci. Mais, la diffusion d'une véritable culture déontologique dans la fonction publique ne pourra passer que par la mise en place de dispositifs de proximité, souligne-t-il. Aussi, prône-t-il la désignation de déontologues, notamment dans les collectivités territoriales les plus grandes. Ils seraient les interlocuteurs à la fois des agents et des élus. Dans ces fonctions, pourraient être choisis par exemple des cadres arrivant en fin de carrière. Ils fourniraient des conseils et mettraient en place des formations. Leurs avis pourraient être rendus publics, sous forme anonyme. Les services administratifs locaux et les assemblées élues locales auraient tout intérêt aussi à se doter de chartes de déontologie, assure le rapport.
Opération transparence dans les marchés publics
Pour associer les citoyens au contrôle des responsables publics et les informer, ce dernier recommande de publier sous forme de données libres d'usage et de droits les principales ressources ayant trait à "l'exemplarité des responsables publics". Parmi elles, le rapport fait notamment figurer les informations relatives à l'ensemble de la commande publique et aux délégations de service public. L'habilitation que l'article 57 du projet de loi Macron pour la croissance accorde au gouvernement pour procéder par ordonnance à la simplification de la commande publique pourrait permettre d'aller dans ce sens, indique le rapport.
La politique d'"open data" devrait aussi viser les comptes détaillés des partis politiques et ceux des campagnes des candidats aux élections, de même que le budget des collectivités locales, estime Jean-Louis Nadal. Selon lui, l'amélioration de la transparence devrait aussi concerner le financement des campagnes électorales. A cet égard, les mécanismes de contrôle mis en oeuvre "ne permettent pas, dans certains cas, d'éviter des contournements importants".
Destitution des élus ayant commis de graves délits
"Dans leur immense majorité, les responsables publics s'attachent à respecter les lois de la République", tient à souligner le président de la HATVP. En considérant que ceux-ci pâtissent des élus, très minoritaires, qui à l'inverse enfreignent les règles. Le rapport recommande donc de renforcer la sévérité des sanctions concernant les "manquements à l'exemplarité".
Dans ce sens, il propose de modifier la définition du délit de favoritisme, le but étant double. D'une part, il s'agirait d'exclure de son champ "les actes accomplis de bonne foi ou relevant d'une simple erreur ou omission". Il s'agirait par ailleurs d'y inclure les contrats de partenariats public-privé, qui ne sont pas aujourd'hui concernés. Le rapport suggère par ailleurs de modifier la Constitution pour permettre de rendre automatiquement inéligibles, par la loi, les élus condamnés pour des crimes ou de graves délits. Surtout, il recommande d'ouvrir aux assemblées locales "la possibilité de destituer certains de leurs membres en cas de manquement grave à l'exemplarité". Concrètement, elles pourraient proposer à une majorité qualifiée la suspension, voire la destitution, de tels élus.
Le rapport suggère encore de rendre la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) compétente pour les ordonnateurs locaux, alors que ceux-ci ne sont aujourd'hui pas soumis au contrôle de cette instance. Déjà proposée par le passé, cette idée se heurte à de nombreux opposants.