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Décentralisation - Education : les régions revendiquent plus de compétences stratégiques

Les régions doivent pouvoir piloter la chaîne orientation/formation/emploi : tel est le fil rouge des propositions de l'Association des régions de France en matière de décentralisation dans l'éducation. L'ARF milite pour "une décentralisation de stratégie plus que de gestion", avec des compétences nouvelles pour les régions et une clarification des compétences avec l'Etat, dans le cadre d'une gouvernance rénovée.

"Mieux reconnue et mieux formalisée, donc mieux organisée et plus efficace." C'est ainsi que François Bonneau, président de la commission éducation de l'Association des régions de France, résume la compétence Education pour les régions, telle que la rêve l'ARF dans son projet de "nouvel acte de décentralisation dans l'Education". Et cela, à budget public constant. La décentralisation n'étant "pas synonyme de dépense supplémentaire, mais de subsidiarité", a rappelé le président de la région Centre, lors d'une conférence de presse, jeudi 30 août. "La clarification des compétences ne se fera pas avec des moyens en évolution car la situation du pays ne le permet pas aujourd'hui", a-t-il insisté.

Un contrat avec chaque lycée

Dans cette perspective, les régions proposent de signer un "pacte éducatif" avec le rectorat. Il prendrait la forme, pour chaque lycée, d'un contrat tripartite entre le lycée concerné, la région et le rectorat (ou la Draaf pour les lycées agricoles). Ce contrat serait pluriannuel (par exemple trois ans) et fixerait des objectifs, des politiques partagées (orientation, formations, décrochage, numérique éducatif…) et les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir (humains, financiers, immobiliers…). Il serait établi à partir des schémas directeurs portés par les collectivités, en lien avec les autorités académiques.
Au passage, l'ARF suggère également de revoir la composition des conseils d'administration des lycées pour qu'elle augmente la représentation de la région et du monde socio-économique entre autres.

Une nouvelle gouvernance régionale


Chaque région signerait également un contrat pluriannuel avec le rectorat (ou la Draaf), définissant là encore objectifs et moyens quant aux politiques nécessitant une articulation des actions. Ce contrat pourrait aussi prévoir des expérimentations à mener localement.
Pour préparer les termes de ce contrat et pour chapeauter, d'une manière générale, la nouvelle gouvernance régionale, l 'ARF propose de créer un organe de pilotage qui rassemblerait le président du conseil régional, le recteur, le président du PRES (Pôle de recherche et d'enseignement supérieur) et le président du Conseil économique, social et environnemental régional (Ceser). Articulé aux instances de concertation existantes, il aurait pour objet "de construire, sur les territoires, une politique contractuelle et de suivre l'ensemble des politiques de formation articulant actions de l'Etat et de la région".
Au niveau de la gouvernance nationale, l'ARF aimerait voir reconfigurer le conseil territorial de l'Education nationale (CTEN) "afin que chaque niveau de collectivité ait la majorité pour les questions relevant des compétences qui lui (auront) été attribuées par la loi".
Pour leur part, les régions demandent des compétences sur trois grands champs : l'orientation et la lutte contre le décrochage ; la carte des formations ; le numérique éducatif.

Un service public régional d'orientation

Dans le cadre d'un "service public régional d'orientation (Spro)" qu'elles appellent de leurs vœux, les régions proposent d'être les chefs de file des politiques d'accueil, d'information, d'orientation et d'accompagnement (étant entendu que l'orientation en collège et en lycée resterait de la compétence de l'Education nationale). Pour François Bonneau, il n'est pas supportable que "de plus en plus de services privés se développent dans les agglomérations pour répondre à cette demande sociale d'accompagnement, au motif que le service public est éclaté sur la question de l'orientation".
Pour ce qui est du décrochage scolaire, les régions proposent d'être davantage parties prenantes des "plateformes de suivi et d'appui aux décrocheurs" mais aussi, en amont, d'être mieux associées à la prévention du phénomène et à l'identification des jeunes concernés. Il s'agit notamment, par ce biais, d'accorder aux jeunes "le droit à l'échec dans l'orientation", selon l'expression de François Bonneau.

Le droit au chapitre dans la définition des cartes des formations

Les régions entendent ni plus ni moins mettre en place un "service public régional de la formation tout au long de la vie". Sur ce sujet, elles élaboreraient également un plan régional à caractère prescriptif, en concertation avec les acteurs économiques et sociaux et les autorités académiques (recteurs, Draaf…) Tous les ans, les régions élaboreraient un projet de carte des formations initiales en apprentissage et des formations qualifiantes implantées dans les lycées, qu'elles transféreraient ensuite aux autorités académiques. Si celles-ci demeureraient chargées de fixer le périmètre de la carte scolaire des formations des lycées professionnels, technologiques et agricoles à la rentrée suivante, "elles ne pourraient décider sans l'avis obligatoire de la région", souhaite l'ARF.
Sur la question de la sectorisation, les régions souhaitent être associées à la définition des périmètres et critères de recrutement des lycées généraux, technologiques, professionnels et agricoles. Elles envisagent même que, à titre expérimental, des régions volontaires se voient confier cette compétence.
Enfin, des observatoires régionaux de l'évolution des effectifs scolaires et des flux d'orientation pourraient être créés en partenariat avec l'Etat. Ils permettraient de donner des éléments pour la nouvelle "procédure de dialogue" entre région et Etat qui se mettrait en place au niveau national (avant la répartition des postes entre les académies) et au niveau régional, pour définir l'offre en lycée et en apprentissage. "Aujourd'hui, ces deux instances peuvent prendre des décisions contradictoires", souligne François Bonneau.

Numérique éducatif : avec l'Etat

Une fois n'est pas coutume, les régions se proposent de prendre en charge la maintenance technique des équipements et réseaux informatiques pédagogiques, "sous réserve de compensation financière et de transfert des personnels existants", précise l'ARF. En contrepartie, elles entendent être "systématiquement" associées à la définition des grandes orientations et des expérimentations menées par l'Education nationale et à leur déclinaison sur le plan régional. Elles attendent de l'Etat qu'il impulse une politique "ambitieuse" sur le numérique éducatif, qu'il la décline en programmes, référentiels, examens, concours de recrutement des personnels… et qu'il investisse dans l'équipement, la formation et l'assistance pédagogique des enseignants.
Un sujet qui tient particulièrement à cœur à François Bonneau qui considère que "le numérique doit permettre de relever le défi de l'échec scolaire pour les jeunes et peut-être, pour certains d'entre eux, redonner de l'intérêt à leur formation".

Bassins de formation

La concertation sur la Refondation de l'Ecole, où "pour la première fois les collectivités ont été invitées à participer au débat", note François Bonneau, lui semble de bon augure. "Nous souhaitons que les rapports avec le ministère se déclinent entre la région et le recteur", a-t-il déclaré. Avec les autres niveaux de collectivités, il souhaiterait "aménager des réseaux éducation" à l'échelle de "bassins de formation". Des bassins de formation à géographie variable, tant les problématiques et les acteurs diffèrent entre les agglomérations et les territoires ruraux.
 

 

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