Culture - Edouard Philippe confie à trois députés une mission sur l'évolution des métiers d'art et du patrimoine
Céramistes, mozaïstes, bijoutiers, restaurateurs, ébénistes, brodeurs, plumassiers... ces métiers d'art, qui s'appuient sur des savoir-faire complexes parfois très anciens, sont-ils des métiers d'avenir ? Trois députés sont missionnés par le Premier ministre pour réfléchir à la préservation et au développement des métiers d'art et du patrimoine vivant. Parmi eux, Philippe Huppé (Hérault), également président de l'association nationale Ville et Métiers d'art.
Pas moins de trois députés pour mener une réflexion sur l'évolution des métiers d'art et des métiers du patrimoine : trois décrets du 11 juin 2018, signés par Edouard Philippe, chargent en effet trois parlementaires (LREM) d'une mission temporaire "ayant pour objet la formulation de propositions permettant de préserver et de développer en France les métiers d'art et du patrimoine vivant".
Il s'agit en l'occurrence de Gilles Le Gendre (Paris), Raphaël Gérard (Charente-Maritime) et Philippe Huppé (Hérault), également président de l'association nationale Ville et Métiers d'art.
Une pierre dans le jardin des régions ?
Conformément aux règles régissant les parlementaires en mission, les trois députés ont six mois, au plus, pour "repenser la gouvernance des métiers d'art" et "mener une réflexion sur l'apprentissage de ces métiers rares", a indiqué Philippe Huppé à l'AFP. "Il faudrait voir si c'est possible que l'Etat ait un interlocuteur privilégié [...]. Il y a beaucoup d'interlocuteurs qui ont chacun une politique différente, donc à un moment, il faut peut-être recentraliser tout ça."
Une affirmation qui ressemble à une pierre dans le jardin des régions, d'autant qu'une récente cartographie des formations aux métiers d'art, établie par l'Institut supérieur des métiers (ISM), mettait en évidence une nette inégalité de l'offre selon les régions (voir notre article ci-dessous du 10 mai 2016). Elle montrait également que l'apprentissage n'est plus la voie royale pour maîtriser des savoir-faire souvent ancestraux.
Pour mener à bien leur mission, les trois parlementaires comptent auditionner, "dans toute la France, les professionnels et les institutionnels", comme l'Institut national des métiers d'art ou les Ateliers d'art de France.
Une composante de la "Stratégie pluriannuelle en faveur du patrimoine"
Cette mission confiée aux trois députés s'inscrit dans le prolongement de la "Stratégie pluriannuelle en faveur du patrimoine" présentée par Françoise Nyssen le 17 novembre dernier (voir notre article ci-dessous du même jour). La ministre de la Culture expliquait alors que le troisième axe de sa stratégie, consacré à la transmission du patrimoine, consisterait notamment à promouvoir les métiers et les formations du patrimoine, par le biais de la création d'une plateforme numérique, ou encore, dans le cadre de la réforme annoncée de l'apprentissage, à lever les freins à l'apprentissage dans les métiers du patrimoine. De même, le projet d'un "Erasmus de la culture" pourrait se traduire par la proposition de lancement d'un projet-pilote autour des métiers du patrimoine.
Les métiers d'art ont déjà bénéficié d'une avancée importante en 2016, avec la publication, au Journal officiel du 31 janvier 2016, d'un arrêté fixant une nouvelle liste des métiers d'art, regroupant 198 métiers et 83 spécialités, soit un total de 281 activités (voir notre article ci-dessous du 10 février 2016). La publication de cet arrêté résultait de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (loi ACTPE). Cette nouvelle liste ajoute 39 métiers et 39 spécialités à la précédente - qui remontait à 2003 - et réorganise l'ensemble des métiers d'art en 16 grands domaines, dans une logique de filière économique.
A l'époque, Ateliers d'art de France - l'organisation professionnelle des métiers d'art -, qualifiait cet arrêté d'"avancée historique indéniable" et d'"étape clé dans la structuration et la reconnaissance de notre secteur".
Références : trois décrets du 11 juin 2018 chargeant un député d'une mission temporaire (Journal officiel du 12 juin 2018).