Culture - Françoise Nyssen lance une stratégie du patrimoine sur la durée du quinquennat
Le 17 novembre, la ministre de la Culture a présenté la "Stratégie pluriannuelle en faveur du patrimoine", comme étant "un enjeu au cœur de notre identité". L'ambition affichée est de "donner un nouvel élan à la politique de l'Etat en matière de patrimoine", tout en veillant à "se donner le temps" pour mettre en œuvre les différents objectifs de la stratégie et pour "offrir de la visibilité aux acteurs". D'où la dimension pluriannuelle. Autre constante : la stratégie en faveur du patrimoine doit s'inscrire dans le cadre d'une politique culturelle tournée "vers la proximité", dont le patrimoine est l'un des "piliers".
Un Loto et une plateforme participative pour restaurer le patrimoine
En pratique, la stratégie identifie quatre "défis pour le patrimoine", qui sont autant d'axes structurant les diverses mesures retenues. Ces axes sur le patrimoine consistent respectivement à le restaurer, le valoriser, le transmettre et à faire avancer l'Europe.
Sur la restauration du patrimoine, Françoise Nyssen a rappelé plusieurs éléments déjà annoncés ou figurant dans le projet de loi de finances pour 2018 (voir notre article ci-dessous du 28 septembre 2017) : budget dédié à l'entretien et à la restauration du patrimoine porté l'an prochain à 326 millions d'euros (+5%), sanctuarisation de cette enveloppe pour la durée du quinquennat, création dès l'an prochain d'un fonds spécifique de 15 millions d'euros pour aider les petites communes à restaurer le patrimoine fragilisé...
Françoise Nyssen a également annoncé le "lancement dès aujourd'hui d'une plateforme participative pour permettre aux citoyens de signaler des monuments en péril". Cette plateforme accompagnera la mission d'identification du patrimoine immobilier en péril, que le chef de l'Etat a confiée à Stéphane Bern. La ministre de la Culture a d'ores et déjà retenu une proposition de ce dernier, en annonçant la création, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2017, d'un tirage spécial du Loto pour le patrimoine (voir notre article ci-dessous du 11 octobre 2017). En revanche, il n'a pas été question, pour l'instant, de l'éventuelle instauration d'un droit d'entrée dans certaines cathédrales pour les touristes (voir notre article ci-dessous du 14 novembre 2017).
La ministre prévoit aussi une "simplification des démarches des propriétaires de patrimoine protégé", mais sans apporter davantage de précisions à ce stade.
Une marque "Patrimoine de France" et une évolution du rôle des ABF
Le second axe - "valoriser le patrimoine" - regroupe trois mesures. Il s'agit tout d'abord d'accélérer la revitalisation des centres-ville anciens, pour lesquels le gouvernement vient de lancer une expérimentation dans 17 villes. Dans ce cadre, la restauration patrimoniale est appelée à jouer le rôle d'"un levier d'attractivité et de dynamisme économique".
Il s'agit aussi de donner davantage de lisibilité au patrimoine - notamment dans une optique d'attractivité touristique -, en créant une marque "Patrimoine de France". Celle-ci devrait "rassembler derrière une même bannière la multitude de labels qui identifient le patrimoine aujourd'hui".
Enfin, Françoise Nyssen affiche son intention de "faire évoluer le rôle des architectes des Bâtiments de France". Il s'agit en l'occurrence de "renforcer le conseil et la pédagogie en amont pour mieux répondre aux enjeux du développement durable et accélérer la délivrance des autorisations".
"Lutter contre ceux qui tentent de détourner le passé"
Le troisième axe concerne la transmission du patrimoine et regroupe diverses annonces ou orientations. Celles-ci concernent en particulier la promotion des métiers et des formations du patrimoine, par le biais de la création d'une plateforme numérique, ou encore, dans le cadre de la réforme annoncée de l'apprentissage, les moyens de lever les freins à l'apprentissage dans les métiers du patrimoine.
Il s'agit aussi de "sensibiliser nos enfants aux enjeux et à la diversité du patrimoine", avec l'intention affichée de "lutter contre ceux qui tentent de simplifier ou de détourner le passé". De façon plus classique, la ministre veut également développer des partenariats entre les écoles et les sites patrimoniaux à proximité pour favoriser les sorties et les activités culturelles des élèves.
Enfin, en termes d'accessibilité, les monuments et les sites devront poursuivre leurs investissements en direction des publics en situation de handicap, tandis que le ministère de la Culture lancera un appel à projets pour soutenir les initiatives en matière de réalité augmentée.
Le quatrième axe - faire avancer l'Europe - est plus aléatoire, dans la mesure où il ne dépend pas uniquement de la France. Françoise Nyssen a toutefois annoncé deux pistes : la création d'un "Grand Tour" du patrimoine, "pour inviter les citoyens français et européens à voyager sur des itinéraires communs", et le soutien au projet d'un "Erasmus de la culture". Celui-ci pourrait se traduire, dès 2018, par la proposition de lancement d'un projet-pilote autour des métiers du patrimoine.