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Ressources humaines - Economies sur les dépenses de personnel : attention, chantier sensible !

En maîtrisant leurs dépenses de personnel, les collectivités territoriales peuvent parvenir à des économies substantielles. Mais les mesures, qui risquent d'être impopulaires auprès des agents, ne s'improviseront pas. Les centres de gestion, qui mettaient ce 16 décembre ce thème à l'ordre du jour de leur seconde conférence nationale de l'emploi territorial, revendiquent leur expertise.

Après avoir procédé à des recrutements massifs dans les années 2000, les collectivités vont devoir, dans les années à venir, donner un sérieux coup de frein sur leurs effectifs, se sont accordés à dire le 16 décembre les participants à une table-ronde de la deuxième conférence nationale de l'emploi territorial organisée à Paris par la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG). La réduction de 11 milliards d'euros des dotations de l'Etat aux collectivités d'ici 2017 ne leur laisse guère d'autre choix.
Pour Catherine Di Folco, sénatrice et présidente du centre de gestion du Rhône, les dépenses de personnels, du fait qu'elles représentent souvent près de la moitié des dépenses de fonctionnement des communes, s'imposent comme une source majeure d'économies. "Si on sait mobiliser le levier des ressources humaines", il se révélera être "un trésor", a estimé Nicolas Lebas, maire de Faches-Thumesnil, ville de la métropole lilloise. Malgré l'ampleur des économies à trouver, "il y a quelques raisons d'espérer", a-t-il conclu. Cet ancien contrôleur de gestion dans le secteur privé devenu administrateur territorial s'est efforcé, après de nombreuses "palabres" avec les syndicats locaux, bien avant sa réélection en 2014, à relever le temps de travail annuel des agents de sa commune de 1.527 à 1.577 heures. Il compte poursuivre ce chantier pour parvenir à un temps de travail de 1.607 heures, conforme à la durée annuelle fixée par décret. Dans le rapport sur les finances locales qu'elle a remis en octobre 2013, la Cour des comptes a constaté que dans un certain nombre de collectivités, à l'instar de la ville du Nord, la durée du travail est inférieure à la norme, engendrant un coût pour la collectivité.

"Limiter les primes des agents"

L'édile se dit prêt aussi à tailler dans les effectifs. Sur le sujet, il a une idée assez précise : "La communauté éducative s'est habituée à des normes en matière d'Atsem qui sont très confortables", a-t-il dit par exemple. Catherine Di Folco est sur la même longueur d'ondes : "La loi ne nous a pas imposé de recruter une Atsem pour chaque classe, mais nous l'avons accepté quand nous en avions les moyens."
Les deux élus préconisent de ne pas remplacer une proportion des fonctionnaires partant en retraite. Nicolas Lebas s'attend à des réactions de mécontentement de la part des personnels des écoles. Il a d'ailleurs calculé que les personnes concernées n'en conserveront le souvenir que "durant six mois". Mieux vaut alors prendre les mesures impopulaires en début qu'en fin de mandat, fait-il remarquer. Sur ce conseil, c'est aussi en début de mandat que les élus locaux devraient limiter les primes des agents, autre "levier" mis en avant.
Les collectivités peuvent encore réduire le nombre des avancements qui ne sont pas obligatoires. Mais cette piste est-elle de nature à générer de franches économies ? Olivier Dussopt, député-maire d'Annonay et président de l'Association des petites villes de France, a estimé dans une interview vidéo diffusée au début de la journée qu'en matière de rémunération des personnels, "tout est décidé par l'Etat". L'affirmation semble en fait exagérée. La Cour des comptes a calculé en effet qu'en 2012, 40% de l'évolution des rémunérations des agents territoriaux dépendait de décisions législatives et réglementaires. Le reste étant donc lié à des décisions des employeurs locaux.
Autre piste mise en avant : la lutte contre l'absentéisme, qui aurait été expérimentée avec succès par le conseil général de la Charente. Après trois semaines d'arrêt pour maladie, les agents employés par ce département reçoivent un courrier les invitant à contacter leur service des ressources humaines. L'objectif est qu'ils bénéficient de l'aide de spécialistes en santé recrutés par le département, afin de favoriser une reprise anticipée du travail, comme l'indique Florent Farge, DRH de la collectivité. Un DRH qui s'aventure volontiers sur le terrain politique, en prônant le retour du jour de carence pour les arrêts maladie des fonctionnaires. Selon lui, la mesure est efficace lorsqu'elle est accompagnée de la mise en place d'outils de prévention.

Assouplir le statut des fonctionnaires ?

Des économies sur les dépenses de personnels seront possibles, à condition que les élus soient constants et stables dans la poursuite de cet objectif, a indiqué Laurence Chenkier, vice-présidente du syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales (SNDGCT). En outre, les économies n'apparaîtront pas forcément tout de suite, mais plutôt après quelques années, voire au terme du mandat, a estimé Catherine Di Folco.
L'une des raisons en est que le statut de la fonction publique est protecteur pour les personnels, a expliqué la sénatrice. Faut-il dès lors assouplir le statut, comme les élus de Villes de France l'ont souhaité dans un manifeste rendu public le 22 octobre ? (voir notre article ci-contre) "La liberté totale de gestion des maires n'entraînerait pas d'importantes économies", a répondu Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, dont l'interview vidéo a elle aussi été retransmise. Pour le maire de Sceaux, le statut présente aussi l'avantage de protéger les employeurs par rapport aux revendications des agents.
Les responsables des centres de gestion ont vanté un certain nombre d'atouts que possèdent leurs structures pour accompagner les collectivités dans la maîtrise de leurs effectifs. Certains centres de gestion, comme celui du Rhône, ont créé un service spécialisé dans la réorganisation des services. Plus souvent, ces établissements spécialisés dans la gestion des agents territoriaux sont compétents en matière de recrutement et de maintien dans l'emploi, ou encore en matière d'observation de l'emploi local.