Emploi - Economie sociale : l'Udes présente ses priorités pour 2016 et défend la cause du patronat multiprofessionnel
Avant que les employeurs de l'économie sociale et solidaire (ESS) puissent pleinement peser dans le dialogue social, "il reste des étapes à franchir", souligne Hugues Vidor, le nouveau président de l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (Udes), élu le 20 novembre 2015. L'Udes est née suite à l'évolution des statuts de l'Usgeres (Union de syndicats et groupements d'employeurs représentatifs dans l'économie sociale), en juin 2013, afin de créer une union d'employeurs de l'ESS plus large, permettant d'accueillir d'autres syndicats d'employeurs de ce secteur. L'Udes a ainsi pu accueillir le Synéas (Syndicat des employeurs associatifs de l'action sociale et médicosociale), la Fegapei, la Croix-Rouge, Unicancer et, récemment, Familles rurales. L'Udes regroupe 27 groupements et syndicats d'employeurs (associations, mutuelles, coopératives) et 14 branches et secteurs professionnels. Avec plus de 70.000 entreprises, employant plus d'un million de salariés, l'Udes rassemble 80% des employeurs fédérés de l'ESS.
Hugues Vidor entend défendre "un modèle économique différent, humaniste et compétitif". Pour cela, "plusieurs priorités s'imposent". En premier lieu, a-t-il déclaré devant la presse, le 17 décembre, il est indispensable de "préserver les sources de financement de l'Udes, à commencer par les ressources qui lui sont allouées par le nouveau Fonds paritaire de financement du dialogue social". Hugues Vidor estime "insuffisants" les moyens qui sont accordés à l'Udes, et plus généralement au secteur multiprofessionnel (Udes, Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles/FNSEA, Union nationale des professions libérales/UNAPL). Actuellement, dit-il, "il y a un réel déséquilibre entre le financement prévu pour les organisations interprofessionnelles (80%) et celui alloué au niveau multiprofessionnel (20%)". L'Udes a bâti son budget 2016 sur la base de la somme totale qu'elle devrait percevoir au titre de l'année prochaine, soit 750.000 euros. Une partie (118.800 euros) est en provenance de l'Etat, et le reste provient des employeurs qui sont assujettis depuis cette année à une contribution égale à 0,016% de leur masse salariale pour financer les organisations syndicales et patronales. D'après le président de l'Udes, le changement de règles de financement du dialogue social issu de la loi sur la formation du 5 mars 2014, a fait "perdre à l'Udes 40.000 euros de recettes qui étaient issues de l'ex-préciput". Il s'agissait d'un pourcentage des sommes collectées par les Opca, les organismes paritaires collecteurs des fonds de la formation professionnelle, qui était reversé aux organisations signataires de l'accord constitutif de l'Opca.
Conquérir de nouveaux territoires d'expression
L'autre priorité de l'Udes pour s'affirmer dans le paysage politique et social consiste à "conquérir de nouveaux territoires d'expression". L'Union défendra ses positions dans toutes les instances nationales et régionales du dialogue social et de la concertation dont elle fait déjà partie : Cese (Conseil économique, social et environnemental) et bientôt Ceser, COE (Conseil d'orientation pour l'emploi), et Cnefop/Crefop (Conseil national/régional, de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles). Elle attend aussi avec impatience que Myriam El Khomri "tienne ses promesses" du 1er octobre dernier, lorsque, en conclusion de la convention nationale de l'Udes, elle a assuré que celle-ci intégrerait, avant la fin de l'année 2015, le Haut Conseil du dialogue social, le Conseil supérieur de la prud'homie, puis la CNNC (Commission nationale de la négociation collective). L'Udes aspire également à intégrer le réseau Anact/Aract (Agence nationale/régionale pour l'amélioration des conditions de travail), le COR (Conseil d'orientation des retraites), la Cnaf (Caisse nationale des allocations familiales) et la Cnav (Caisse nationale d'assurance vieillesse).
L'ESS jouit d'un dialogue social "fécond", souligne Hugues Vidor, qui précise que l'Udes et les syndicats ont déjà négocié sept accords. Un observatoire mène actuellement, au sein de l'Union, un travail d'analyse sur la dynamique de ses différentes branches, et le président n'exprime pas d'inquiétude particulière à propos de la décision du gouvernement de réduire de plus de la moitié le nombre de branches professionnelles en France. Pour l'Udes, la branche professionnelle doit être "le pivot des relations sociales". Elle est "la seule en capacité d'organiser un ordre public conventionnel très structurant", affirme Hugues Vidor. Pour progresser sur le sujet du rapprochement des branches, l'Udes propose d'"encourager au regroupement d'activités connexes répondant aux mêmes logiques métiers et d'activités" afin de "favoriser les complémentarités, passerelles et mobilités au service des entreprises et de la sécurisation des parcours professionnels".
Renforcer le poids du multiprofessionnel
Une autre priorité de l'Udes consiste à faire en sorte que la consultation obligatoire des organisations patronales multiprofessionnelles lors de la négociation d'un ANI (accord national interprofessionnel) soit renforcée. Elle propose de laisser la possibilité aux organisations patronales multiprofessionnelles de négocier dans les deux mois suivant la conclusion de l'ANI, les dispositions spécifiques à leurs secteurs d'activité, avant le travail parlementaire de transposition dans la loi.
En ce qui concerne l'implication de l'Udes dans l'agenda social 2016, Hugues Vidor envisage la création d'une "plateforme commune avec le Medef, à la rentrée de janvier, sur la politique de l'emploi". "Avec 10% de l'emploi en France, il n'est pas admissible que [l'Udes] ne participe pas au concert du patronat français sur les questions d'emploi et de formation", déclare le président.
A propos des discussions sur la création du CPA (compte personnel d'activité), l'Udes affirme ses objectifs : "Le CPA doit sécuriser et faciliter les mobilités professionnelles des individus, au profit d'un marché du travail et d'une économie plus réactive, et améliorer la conciliation des temps de vie." Le CPA devrait, au-delà des actifs, également concerner les bénévoles, les travailleurs en Esat (établissement et service d'aide par le travail), les stagiaires et les personnes en service civique. Enfin, l'Udes souhaite limiter, à horizon 2017, le périmètre du CPA au CPF (compte personnel de formation), au C3P (compte personnel de prévention de la pénibilité), et éventuellement au CET (compte épargne temps). "N'allons surtout pas à marche forcée sur ce dossier", estime Hugues Vidor. Il souhaite en outre que son organisation soit représentée au sein du groupe quadripartite sur le CPA (Etat, régions, patronat, syndicats) qui reprendra ses travaux au premier trimestre 2016.
Par ailleurs, l'Udes se déclare prête, grâce à son organisation territorialisée, à travailler au plus près des besoins des entreprises et des salariés de l'ESS situés dans les 13 nouvelles régions. Elle dispose d'une délégation territoriale par région mais elle s'est également engagée à développer le dialogue social territorial dans le cadre d'ERDS (espaces régionaux du dialogue social). L'Udes en a déjà créé deux, en Rhône-Alpes et en Bretagne. Elle souhaite en installer cinq en 2016 et huit en 2017. Une feuille de route a été adressée aux organisations syndicales concernées par la création de ces espaces de négociation afin qu'elles obtiennent un mandat au bon niveau (confédéral ou fédéral).