TICE - Ecoles élémentaires : vers des ENT de circonscription ?
Le maillon faible en matière de technologie de l'information et de la communication dans l'enseignement (Tice) reste le primaire. Même si le plan Ecole numérique rurale (ENR) a bien lancé une dynamique d'équipement dans les petites communes, il a aussi créé en parallèle quelques frustrations et problèmes (voir nos articles ci-contre). Désormais se posent des questions de gouvernance pour répondre aux besoins en ressources et services numériques.
"Aujourd'hui, il y a une prise de conscience du terrain avec une augmentation des besoins et des demandes autour des espaces numériques de travail (ENT) en primaire", s'est réjoui Hervé Borredon, le président de l'éditeur Itop. En ouverture de ses troisièmes Netjournées, ce 30 mars à Sophia-Antipolis (06), le leader d'ENT clé en main à base de technologie Microsoft, a mis l'accent sur sa solution NetEcole. Sur les deux jours de la manifestation nationale (400 participants, 35 collectivités représentées), 15 ateliers sur 125 et 35 autres sessions d'usages et de formation ont été consacrés au primaire. L'occasion pour le conseiller Tice du recteur de l'académie de Nice, André Marcant, de réunir un groupe de travail sur la présentation d'une nouvelle approche : l'ENT de circonscription. "Maintenant que tous les collèges des Alpes-Maritimes et une dizaine d'autres dans le Var sont équipés d'un ENT, nous avons décidé d'étendre ce service numérique aux écoles de deux circonscriptions dans chacun des départements de l'académie", a lancé André Marcant. Concrètement, 127 écoles, soit environ 24.000 élèves, leurs parents et enseignants, devraient avoir accès, dès la rentrée des vacances de printemps, à l'ENT d'Itop sur les territoires de fonctionnement administratif des inspecteurs de l'Education nationale (IEN) à Grasse et Nice 2 (06), Garéoult et Toulon 2 (83). "Mais il faut faire un peu de poliTICE fiction, car l'ENT de circonscription nous ne savons pas ce que c'est et nous devons l'inventer", a reconnu Jean-Pierre Rouby, IEN de la circonscription de Grasse, spécialisé Tice et membre du groupe d'experts du ministère sur ce projet pilote.
36.000 communes
Pour mémoire, un ENT primaire de circonscription a déjà été expérimenté dans l'académie de Grenoble, à partir de la solution Collaba. "Au moment où il a fallu sortir du test et trouver des budgets pour le fonctionnement, personne n'a voulu payer, ni l'Education nationale, ni la commune", a admis l'IEN Tice. Cette absence d'engagement financier souligne les problèmes de gouvernance des projets Tice dans le primaire. Alors qu'il existe un "guichet unique" pour les lycées (la région), pour les collèges (le département), qui assure ce rôle pour les écoles d'une circonscription ? Ce découpage de l'Education nationale ne recoupe en effet pas la réalité territoriale des collectivités : il y a en général plusieurs communes de tailles diverses sur une circonscription tandis que les plus grandes collectivités locales sont parfois partagées en plusieurs circonscriptions. "La circonscription semble pourtant le niveau pertinent : il n'est pas imaginable de gérer, tant au niveau administratif que pédagogique, une multitude d'ENT différents avec autant d'interlocuteurs divers" a voulu convaincre Pierre Rouby. L'entrée prioritaire semble, pour lui, pédagogique : c'est la demande des enseignants. Ce nouveau test entrera d'ailleurs dans le cadre des appels à projets du plan numérique du ministre Luc Chatel. Ce dernier a promis 500 euros de ressources numériques par école lorsque l'académie et la collectivité répondent ensemble.
Les conseilleurs ne sont toujours pas les payeurs
Dans l'académie de Nice, l'expérience s'appuie, de manière originale, sur les conseils généraux. "Finalement, lorsque l'ENT sera en fonctionnement, nous pourrons toujours convaincre les élus locaux de passer au financement : l'ENT Itop revient à 7 euros par an et par élève, soit l'équivalent de deux repas à la cantine !", s'est exclamé Jean-Pierre Rouby. Ce modèle économique qui consiste à faire reposer sur les collectivités (probablement les communes à terme) un outil qui sert finalement à des ressources pédagogiques (compétence de l'Education nationale) pose question. D'autant qu'ailleurs – dans l'académie de Lyon, notamment – c'est la position inverse qui a été retenue. Ailleurs encore –avec le syndicat mixte Somme numérique- les collectivités qui financent se heurtent à des problèmes de communication avec les circonscriptions. "Les IEN ne savent même pas ce qui se passe en matière d'usage de l'ENT dans leurs écoles !". Décidément, la gouvernance des projets Tice dans le primaire ne semble guère dépasser les écueils pointés dès le lancement des premiers pilotes par les experts de la cellule mixte Education nationale et Caisse des Dépôts. Les écoles de chaque petit village Gaulois ne semblent pas encore prêtes à passer demain au tout numérique !