"On devra apporter des réponses aux questions de pouvoir d'achat", plaide Stanislas Guerini

Auditionné cette semaine par des parlementaires, Stanislas Guerini, le ministre chargé de la fonction publique, est revenu sur le sujet de la rémunération des agents publics, qui est au centre de ses discussions actuelles avec les syndicats et les employeurs territoriaux.

"On devra apporter des réponses [aux] questions de pouvoir d'achat" pour les agents publics, en particulier pour ceux qui touchent "les plus bas salaires", parce que "l'inflation reste très forte sur les produits de première nécessité", a déclaré, le 25 mai, Stanislas Guerini. Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques était auditionné sur le sujet de l'attractivité de la fonction publique territoriale par la délégation sénatoriale aux collectivités, présidée par la centriste Françoise Gatel. "C'est le premier sujet auquel on doit répondre", a estimé Stanislas Guerini, qui recevait cette semaine les uns après les autres les syndicats de la fonction publique pour discuter en particulier de la question de la rémunération des agents publics (voir notre article du 22 mai).

Le ministre ne s'est pas ouvertement prononcé pour ou contre un relèvement de la valeur du point d'indice, qui sert à calculer la rémunération des agents, et que réclament à cor et à cri les syndicats. "L'avantage [d'une hausse de la valeur] du point d'indice, c'est que ça réoxygène les grilles", a-t-il reconnu. En insistant, par ailleurs, sur "les limites" de cet exercice "un peu inégalitaire", qui conduit à augmenter davantage les traitements des agents les mieux rémunérés.

Après la hausse du minimum de traitement au 1er mai, 20% des agents de la fonction publique perçoivent un traitement égal à ce plancher, selon le ministre. Mais la proportion s'élève à 36% dans la fonction publique territoriale, du fait de la part élevée d'agents de catégorie C dans ses effectifs.

"Choc de marges de manœuvre pour les employeurs territoriaux"

Selon Stanislas Guerini, "un travail plus structurel sur la manière dont on rémunère" doit aussi faire l'objet des discussions que le ministère, les syndicats et les employeurs publics engageront dans le cadre de l'Agenda social de la fonction publique. Il s'agit de faire en sorte que les agents perçoivent un salaire plus élevé après chaque avancement d'échelon - en particulier en début de carrière.

Le but est, par ailleurs, de "dynamiser" les carrières des agents, en valorisant la "différenciation" des carrières. En clair, l'ancienneté ne devrait pas être, selon le ministre, le seul critère fondant les avancements. L'exercice de certains métiers, comme celui de secrétaire de mairie, pourrait ainsi offrir des évolutions de carrière plus rapides. Dans ce cadre, le ministre entend aussi engager un "choc de marges de manœuvre pour les employeurs territoriaux pour permettre plus de fluidité". "Je pense, en disant cela, à la question évidente des rigidités autour des quotas de promotions (…) qui nécessitent un assouplissement, et c'est l'engagement que j'ai pris auprès des employeurs territoriaux", a indiqué le ministre.

La fonction publique doit "récompenser la performance individuelle et collective", a-t-il aussi insisté. Stanislas Guerini avait été plus précis sur ce point, deux jours plus tôt, lors d'une audition par la commission des finances de l'Assemblée nationale. "Je souhaite qu'on puisse discuter (…) notamment de l'idée d'instaurer des plans d'intéressement dans la fonction publique, de faire de ces plans d'intéressement des objets de dialogue social dans les instances qui ont été mises en place à la suite des élections professionnelles", avait-il dit. Stanislas Guerini a par ailleurs suggéré que ces plans d'intéressement permettent de récompenser "des objectifs qui peuvent être, par exemple, liés à la transition écologique et à la réussite de notre action publique en matière de planification écologique".

Comité interministériel du logement des fonctionnaires

Toujours sur les questions liées à la paie des agents, le ministre a déclaré, lors de son audition devant les sénateurs, que "la cartographie de l'indemnité de résidence ne colle plus forcément à la réalité des faits". Il a estimé que "remettre complètement à plat" cet outil coûterait des "milliards d'euros".

S'exprimant sur l'amélioration des conditions de travail des agents publics - un axe de son plan pour renforcer l'attractivité de la fonction publique - Stanislas Guerini a annoncé qu'il organisera probablement en juin avec Gabriel Attal, ministre délégué chargé de l'immobilier de l'État, et Olivier Klein, ministre délégué au Logement, un "comité interministériel du logement des fonctionnaires". Alors que les acteurs publics interviennent aujourd'hui "en silos" dans ce domaine, le gouvernement entend faire progresser "la mutualisation de la gestion et du pilotage de l'offre". Il souhaite aussi s'attaquer aux "rigidités" qui "rendent difficile" l'accès des fonctionnaires au "logement social ou intermédiaire". Stanislas Guerini a souhaité que des logements soient réservés à certains fonctionnaires ("soignants", "policiers", personnels de la "petite enfance") qui ont besoin de résider près de leur lieu de travail. Pour "fabriquer du logement" et ainsi renforcer l'offre de logements aux fonctionnaires, "du foncier de l'État peut être mis à disposition, avec une contractualisation", a-t-il encore souligné.  

  • Geste salarial : "oui, mais", disent les employeurs territoriaux

Le geste que le gouvernement pourrait décider dans les semaines à venir pour revaloriser la rémunération des agents publics pourrait entraîner de lourdes conséquences financières. C'est ce qu'a souligné la coordination des employeurs territoriaux, pilotée par Philippe Laurent, maire de Sceaux, le 23 mai, lors d'une réunion avec Stanislas Guerini. Selon l'entourage du président du conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), les représentants des associations d'élus locaux présents ont estimé nécessaire la revalorisation salariale des agents publics, compte tenu du contexte de forte inflation. Ils se sont donc assez largement prononcés favorablement sur le sujet. Cette revalorisation pourrait fait l'objet d'une mise en œuvre "en fin d'année 2023", auraient toutefois plaidé certains élus locaux. D'autres auraient souhaité que la mesure salariale soit appliquée "en plusieurs fois".

Autre idée avancée par des élus locaux : celle d'"arrêter les à-coups". Il s'agit, au contraire, de "construire" sur ces sujets, avec le gouvernement, et d'"anticiper" les décisions, pour pouvoir "intégrer les hausses salariales dans les budgets locaux".

Un geste salarial tirerait à la hausse les dépenses des collectivités, lesquelles sont déjà sous pression du fait de l'explosion des prix, notamment s'agissant des dépenses énergétiques, ont pointé les élus. Pour lesquels "une réflexion sur les recettes des collectivités" sera nécessaire.  

T.B