Fonction publique : Stanislas Guerini précise sa feuille de route et se prononce pour des négociations
Le ministre chargé de la Fonction publique, Stanislas Guerini, vient de détailler aux organisations syndicales le copieux menu des discussions qu'il va engager ce mois-ci sur l'attractivité de la fonction publique, la protection sociale complémentaire, ou encore l'exercice du droit syndical. Dans un courrier que Localtis a pu consulter, il annonce vouloir ouvrir des négociations avec les représentants des personnels et des employeurs, pour aboutir à des accords collectifs sur certains thèmes prévus dans ces chantiers.
Alors qu'au mois dernier l'Assemblée nationale débattait du très contesté projet de réforme des retraites, le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques peaufinait l'Agenda social de la fonction publique pour 2023. Les derniers réglages ont été portés, vient-il d'annoncer dans un courrier aux responsables des organisations syndicales du secteur public. Dans ce document que Localtis a pu consulter, Stanislas Guerini confirme les annonces qu'il avait faites il y a un mois à Nantes concernant l'ouverture de "quatre chantiers prioritaires".
Promesse de campagne du président Emmanuel Macron, l'ouverture de discussions sur les rémunérations figure bien au menu des échanges que le ministre et ses services auront cette année avec les représentants des syndicats et des employeurs publics. Ainsi que l'avait indiqué dès la fin du mois de janvier l'entourage du ministre (notre article du 26 janvier), l'objet de la concertation est élargi aux questions de l'accès à la fonction publique et des parcours des agents. La notion de "carrières" a finalement été ajoutée à l'intitulé de ce grand axe de concertation, pour répondre à une demande des organisations syndicales. "Notre volonté" est de "dynamiser les parcours tout en restant dans le cadre statutaire de la fonction publique", explique le ministre. Le chantier sera décliné en neuf thématiques au total.
"Diversification des profils"
Dans le détail, la question de l'accès donnera lieu à des discussions sur "la redéfinition des voies d'accès et de leurs finalités". A savoir la "meilleure identification des viviers", la "diversification des profils", l'"accès des apprentis à la fonction publique", ou encore la "place des contractuels". La "simplification des concours et des procédures de recrutement" sera un autre sujet important dans ce cadre, avec en ligne de mire notamment les concours sur titres et la professionnalisation du contenu des épreuves. Le ministre a aussi mis à l'ordre du jour "la refonte des conditions d'accès dans les corps et cadres d'emplois". Un des objectifs étant de mieux prendre en compte l'expérience et les qualifications.
Le thème "parcours et carrières" donnera lieu à des discussions très vastes : la "dynamisation des parcours et des mobilités" (avec entre autres l'"organisation des filières et univers métiers", les "mobilités au sein et entre univers professionnels", les "mobilités inter-versants", les "promotions et avancements", la validation des acquis de l'expérience, les "reconversions" et les "deuxièmes parties de carrière"), la "meilleure corrélation de la formation avec la carrière" (avec par exemple la "prise en compte de la formation dans la progression de la carrière" et "les formations validant l'acquisition de compétences pour l'accès à de nouveaux métiers"), et, enfin, le "développement de l'accompagnement individuel" via divers outils ("revue de compétences, conseil en carrière, entretiens professionnels, dispositifs d'accompagnement personnalisé, tutorat et mentorat").
Pouvoir d'achat et évolution salariale
En détaillant le menu des discussions sur les rémunérations, le ministre affiche ses priorités. D'abord, la "dynamisation" et la "lisibilité du système de rémunération". Il s'agira pour les protagonistes de se pencher sur la "structure" et la "hiérarchie des rémunérations", le "pouvoir d'achat notamment pour les bas salaires", l'"évolution salariale tout au long de la carrière", la "valorisation des montées en qualification et en responsabilité", ainsi que la "refonte des avantages familiaux" (supplément familial de traitement). Le ministre entend aussi répondre aux "enjeux spécifiques d'attractivité selon les métiers et les territoires" ("zones de vie chère, métiers rares ou tendus, sujétions particulières dont le travail de nuit"). Comme il l'avait annoncé dès l'été dernier, il veut, enfin, mieux récompenser "l'engagement individuel et collectif" des agents, en particulier via la "part variable" de la rémunération et l'intéressement collectif.
L'entourage de Stanislas Guerini indiquait, fin janvier, que l'objectif est de parvenir d'ici la fin du premier semestre 2023 à "un ensemble de propositions" sur les "points clés" liés au chantier sur "l'accès, les parcours, les carrières et les rémunérations".
De même que cette concertation, celle qui concerne l'amélioration des conditions de travail des agents vise à renforcer l'attractivité de la fonction publique. Le ministre entend bâtir une liste de thèmes sur lesquels les employeurs publics seront appelés à prendre des engagements. Le dispositif sera baptisé "Fonction publique +". Stanislas Guerini affiche la couleur, en détaillant les thèmes retenus pour les discussions : "évolution des pratiques managériales", "amélioration des conditions de vie et santé au travail", "adaptation de l'environnement et de l'équipement de travail", "renforcement de l'égalité professionnelle et de la responsabilité sociétale", "facilitation du logement" des agents publics. Un dernier item aura trait à la gestion des ressources humaines, avec pour volonté d'orienter celles-ci vers "l'accompagnement des agents" et donc la "simplification des procédures".
Egalité professionnelle
En parallèle des discussions sur les deux chantiers déjà cités, le ministre compte poursuivre les échanges avec les représentants des personnels et des employeurs sur "le sens et les valeurs du service public" et "le déploiement d'actions autour de la marque employeur". Pour rappel, le gouvernement de Jean Castex avait dépassé le stade de la réflexion sur le sujet, en dévoilant en février 2022 une marque employeur des services publics, baptisée "Choisir le service public".
Deux autres chantiers figurent sur la feuille de route du ministre. Le premier, qui a trait à "l'exercice du dialogue social" devrait être très tôt abordé. Le second qui porte sur la protection sociale complémentaire des agents des trois versants, a lui déjà donné lieu à des discussions, et a même débouché sur un accord dans la fonction publique d'Etat.
Peu avant la journée internationale des droits des femmes (le 8 mars), Stanislas Guerini assure que l'égalité professionnelle sera "un enjeu prioritaire commun aux différents chantiers".
Négociations
Le ministre était jusque-là plutôt favorable à l'ouverture de négociations permettant d'aboutir à un ou des accords collectifs. Mais rien n'était décidé. Cette fois, il l'annonce : "les thèmes abordés dans ces chantiers" pourront "donner lieu à des négociations". Concrètement, la direction générale de l'administration et de la fonction publique rencontrera les représentants syndicaux "au cours du mois de mars", afin de déterminer avec eux les thématiques sur lesquelles seraient menées ces négociations. Celles qui ne seront pas retenues feront l'objet de simples concertations.
Les discussions sur les "principaux chantiers" seront ouvertes "d'ici la fin mars". Initialement, le ministre avait souhaité organiser une première réunion à la mi-février. Visiblement, Stanislas Guerini entend éviter que le différend sur les retraites ne parasite les discussions sur l'Agenda social.