Stanislas Guerini ouvre le chantier de l'attractivité de la fonction publique

Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, a annoncé officiellement, le 1er février à Nantes, le lancement de discussions avec les représentants des employeurs et des syndicats sur "l'accès, les carrières et les rémunérations" des agents publics. Avec dès à présent quelques pistes sur la table, comme la volonté d'élargir les possibilités de promotion. L'amélioration des conditions de travail des agents est également au menu, l'un des objectifs étant d'aider les agents aux plus faibles revenus à se loger.

Interpellé depuis des mois par les représentants des organisations syndicales et des employeurs publics sur les difficultés de recrutement dans la fonction publique, le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques a promis, ce 1er février, que le sujet de l'attractivité sera sa "première priorité" et "le grand chantier de cette année". "Nous devons mener une réforme d’ampleur centrée sur l’attractivité de la fonction publique", a déclaré Stanislas Guerini à l'occasion d'un déplacement à l'Institut régional d'administration (IRA) de Nantes.

Celui-ci l'a répété : "Il y a deux fois moins de candidats aux concours aujourd'hui qu'il y a dix ans." Métiers du soin, du numérique ou de la petite enfance : plus de 50.000 postes seraient vacants parmi les employeurs publics, selon une estimation publiée dans le journal Ouest-France. Ce constat "doit nous appeler à tout revoir de fond en comble", a jugé Stanislas Guerini, avant de détailler sa feuille de route.

"Récompenser l’engagement et la performance"

Très attendu par les agents et leurs représentants syndicaux sur la question des rémunérations, le ministre n'a pas tourné autour du pot : "c’est très difficile, a-t-il reconnu, de parler d’attractivité de la fonction publique quand un agent de catégorie C (…) va franchir des échelons sans augmentation de sa rémunération". Il a déclaré vouloir "remettre à plat" ce sujet et ce, "en réaffirmant le cadre statutaire de la fonction publique". Le chantier devra, selon lui, amener à "questionner les mécanismes qui nous permettent de récompenser l’engagement et la performance, individuels et collectifs". L'entourage du ministre avait donné à la presse quelques détails sur ce point dès la semaine dernière (voir notre article du 26 janvier 2023). La rémunération qui sert à "valoriser une qualification" doit principalement relever de la "rémunération principale", et s'il doit y avoir un système de primes, celles-ci ont vocation à "valoriser le travail de nuit, le mérite, les résultats de la performance…", indiquait la Rue de Grenelle.

Pour le moment, aucune enveloppe budgétaire n'est annoncée par le ministre pour financer les futures mesures. "On construira des budgets en fonction des projets, plutôt que de tailler au hasard", se contente de préciser son entourage.

En même temps que les rémunérations, le ministère de la Fonction publique abordera, avec les représentants des employeurs et des agents, les questions des carrières et des parcours professionnels. Le ministre l'a confirmé. En annonçant d'ores et déjà qu'il souhaitait un élargissement des perspectives de promotion des agents, avec "plus de marges de manœuvre pour leurs employeurs ou chefs d’équipe". Le sujet épineux des quotas, qui réduisent la capacité à promouvoir, avait été identifié, il y a un an, par le rapport Laurent-Icard sur l'attractivité de la fonction publique territoriale. "Il faut débloquer cette question des quotas de promotion", a estimé Stanislas Guerini.

Entrer dans la fonction publique par l'apprentissage

La formation professionnelle "doit être un levier d’accélérateur de carrières", a-t-il, en outre, indiqué. Sur ce sujet, la validation des acquis de l'expérience (VAE), qui permet à l'agent de faire reconnaître son expérience pour obtenir une certification professionnelle, devrait faire l'objet d'une attention particulière. Un proche du ministre souligne l'importance de "reprendre" ce sujet "resté un peu en friche dans la fonction publique", afin de le "valoriser".

La concertation sur les carrières et les rémunérations sera, enfin, élargie à la question de l'accès à la fonction publique. L'enjeu étant que les concours soient davantage conçus dans "une logique professionnalisante", selon les mots du ministre. Il s'agit aussi de faire de l'apprentissage "une réelle voie d’entrée" dans le secteur public. "Demain, un apprenti qui aura été formé dans une administration sera intégrable à la fonction publique à l’issue de son alternance", a précisé Stanislas Guerini. Sur le mentorat - une forme de soutien individuel pour des jeunes issus de territoires ruraux ou de quartiers populaires -, au sujet duquel il a fait plusieurs annonces la semaine dernière, il a déclaré vouloir "multiplier par trois" (de 2.500 à 7.500) le nombre des agents publics exerçant des fonctions de mentor. L'idée est d'attirer ainsi des jeunes de toutes origines à la fonction publique.

Aider les agents à se loger

Pour redorer "le quotidien des agents publics" – ce sujet fera l'objet d'un second axe de discussions – l'exécutif entend créer "un programme d’amélioration continue des conditions de travail des agents publics". Les trois versants (Etat, hôpitaux et collectivités) seront concernés. Ce programme sera bâti autour d’engagements que les employeurs prendront à l'égard de leurs agents dans de nombreux domaines : amélioration des pratiques managériales (avec notamment "une plus forte responsabilisation des agents de terrain" et la création d'un "droit à l'erreur des agents", sur le modèle du droit à l'erreur des usagers), réduction des "lourdeurs" que subissent les agents du fait de la gestion des ressources humaines, meilleur aménagement des espaces de travail, prévention de l'usure professionnelle, renforcement de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de la diversité sociale… Pour avancer sur ces questions, le ministre de la Fonction publique devrait s'appuyer sur des concertations locales donnant la parole notamment aux agents.

Le chantier comprendra aussi un volet sur le logement des agents publics, afin d'aider ceux qui ont de "faibles revenus" et qui "travaillent sur les métiers les plus en tension" à se loger. L'exécutif veut parvenir dans ce domaine à "des résultats effectifs dans les prochains mois". Deux pistes ont d'ores et déjà été annoncées : "la mobilisation du foncier de l’Etat pour pouvoir accélérer la construction de logements dédiés aux agents publics" (un point d'ailleurs évoqué le même jour par le ministre délégué en charge du logement, Olivier Klein) et la mise en place d'une plateforme qui permettra de mettre en commun l’ensemble des offres accessibles aux agents des trois versants.

Sur le très gros dossier concernant l'accès, les carrières et les rémunérations des agents, l'objectif de l'exécutif est de parvenir d'ici la fin du premier semestre 2023 à "un ensemble de propositions" sur les "points clés". Mais les discussions devraient être marquées – au moins durant les premières semaines – par des passes d'armes sur la réforme des retraites.