Développement des outre-mer : la Scet préconise de laisser la main aux exécutifs locaux

Alors que se tient ce mardi un comité interministériel des outre-mer, le groupe Scet (filiale de la Caisse des Dépôts) propose, dans un livre blanc, une nouvelle façon de concevoir leur développement, réalisé à partir de l'analyse d'expériences de pays aux caractéristiques similaires. Il s'agit d'appuyer les territoires d'outre-mer dans l'écriture de leur feuille de route mais de les laisser décider et accélérer les chantiers où les écarts avec la métropole sont les plus importants. 

Une nouvelle façon de concevoir l'aide au développement pour l'outre-mer dont le modèle n'a pas évolué depuis soixante ans. C'est ce que propose le groupe Scet, filiale de la Caisse des Dépôts et de la Banque des Territoires, dans un livre blanc publié le 11 juillet 2023, alors qu'un comité interministériel des outre-mer se tient le 18 juillet. Car si l'effort budgétaire de l'État envers ces territoires est important (27,3 milliards d'euros en 2021, sans compter les prestations sociales et autres sources de financement public, en hausse de 11% par rapport à 2020), les écarts avec la France métropolitaine persistent. Deux territoires ultramarins ont un indice de développement humain inférieur à 0,7 (soit le niveau du Maroc) et huit ont un IDH inférieur à 0,8 (niveau du Costa Rica), quand celui de la France métropolitaine est à 0,883.

Alors pour trouver de nouvelles idées, la Scet est allé piocher dans les expériences réussies à l'international, et notamment issues de huit pays : Bélize, Costa Rica, Croatie, Ethiopie, Ile-Maurice, Malaisie, Maroc et Rwanda. "Il s'agit de sortir du cadre du tout franco-français et de trouver des solutions dans des pays qui ont les mêmes caractéristiques", a expliqué Christophe Lasnier, directeur du conseil du groupe Scet, lors de la présentation du livre blanc le 11 juillet dans le cadre d'un atelier de la Banque des Territoires.

"Pas de travail possible sans un exécutif qui prenne le sujet à bras le corps"

Parmi les traits communs des stratégies territoriales développées par ces pays : une ambition claire et quantifiée, portée par des exécutifs engagés et convaincus de ce qu'ils font, un nombre restreint de secteurs économiques visés (deux à cinq), soit historiques soit émergents, une approche territoriale (maille régionale) et, depuis 2010, une meilleure intégration des enjeux de développement durable, de préservation de la biodiversité, d'énergie propre et d'accès à l'eau et à l'alimentation. "Il n'y a pas de travail possible sans exécutif qui prenne le sujet à bras-le-corps", a assuré Christophe Lasnier.

À partir de ces exemples et d'une analyse très détaillée des atouts et faiblesses de chaque territoire ultramarin, la Scet avance quatre propositions au premier rang desquelles la nécessité de laisser aux territoires l'intégralité des décisions liées à leur priorité de développement. "C'est aux exécutifs de faire leur choix", a affirmé Christophe Lasnier. Les acteurs publics nationaux sont quant à eux uniquement positionnés en appui (apport de financements, d'expertise technique, d'outillage). Ils renoncent à leur rôle de prescripteur ou de pilote et se mettent au service de la vision décidée localement.

"La stratégie de développement doit permettre d'identifier et de cibler des filières économiques choisies, puis de concentrer les investissements et les projets à fort effet levier", poursuit le document qui montre que l'un des facteurs clés de succès des exemples internationaux étudiés repose sur une feuille de route claire, précise et partagée.

Une "task force" sous l'autorité des collectivités

Pour les aider dans ce travail, une "task force" territoriale pourrait être constituée, véritable bras armé sous l'autorité des collectivités, à même de construire le cadre et les orientations stratégiques, de le partager et de lancer la dynamique. "On sait très bien qu'aujourd'hui il faut aider les exécutifs pour écrire et porter leur feuille de route, car ils n'ont pas toujours les compétences et ressources pour le faire", a expliqué Christophe Lasnier.

Cette task force serait composée d'experts en développement économique, en structuration de politiques publiques, cadre règlementaire, investissement… Une équipe pluridisciplinaire qui interviendrait sur une durée limitée. Et "au démarrage d'un projet de développement ambitieux, une subvention de l'État sera certainement indispensable pour financer le déploiement de cette task force", assurent les auteurs du livre blanc.

Enfin, dernier point : rehausser les standards de développement pour "miser pleinement sur la notion de 'qualité de vie à la française' ". Il s'agit particulièrement d'accélérer les chantiers où les écarts avec la métropole sont les plus grands : dans le domaine de l'éducation et de la santé notamment, mais aussi de l'autonomie alimentaire et des infrastructures.

Bien sûr les propositions n'ont pas vocation à être appliquées de la même manière mais selon le statut du territoire concerné, précise le document.