Social - Des propositions de la défenseure des enfants pour améliorer la situation des enfants pauvres
Comme chaque automne, Dominique Versini, la défenseure des enfants, a présenté son double rapport annuel : le premier consacré à l'exposé des actions menées et le second dédié à l'examen approfondi d'une thématique particulière. Si l'exercice est traditionnel, son édition 2010 revêt en revanche un caractère particulier. En effet, si le projet de loi organique et le projet de loi relatifs au défenseur des droits, déjà examinés par le Sénat en première lecture en juin dernier, sont adoptés, le défenseur des enfants devrait se fondre dans cette nouvelle institution (voir nos articles ci-contre). Dans son éditorial, Dominique Versini ne manque d'ailleurs pas d'en appeler à la sagesse des parlementaires, "pour que, quel que soit le mode d'organisation choisi, la spécificité de la défense et de la promotion des droits des enfants [...] soit maintenue de façon visible pour permettre un accès direct par les enfants et conserver une équipe spécifiquement dédiée à leur cause".
Si le rapport d'activité n'apporte pas vraiment d'éléments nouveaux - la présentation du document ne facilite guère la mesure de l'activité de l'institution -, le rapport thématique se consacre à la "Précarité et protection des droits de l'enfant". Il ne s'agit d'ailleurs pas d'un rapport au sens traditionnel du terme, mais de la restitution d'un colloque sur ce thème, organisé les 30 septembre et 1er octobre derniers. Les quatre débats organisés pour l'occasion abordaient la question sous des angles différents : vie quotidienne, droit au logement, scolarité et ouverture européenne.
Le rapport estime que la France compte près de deux millions d'enfants en situation de pauvreté, autrement dit dont le foyer dispose de revenus inférieurs à 950 euros par mois. Contrairement à l'Insee ou à la Commission européenne - qui jugent que la situation est stable, voire en voie d'amélioration (voir notre article ci-contre du 27 février 2008) -, la défenseure des enfants pointe une dégradation, qui se lirait dans plusieurs facteurs : augmentation du nombre de grossesses d'adolescentes et d'IVG, baisse des performances à l'école... Le dispositif législatif et réglementaire de lutte contre la pauvreté a pourtant été nettement renforcé depuis une dizaine d'années, mais ses effets tardent à se concrétiser. Dominique Versini vise plus particulièrement le cas du logement. Elle relève aussi que "la volonté politique en matière de protection de l'enfance ne [...] paraît pas aussi forte que de voter des lois de plus en plus restrictives en matière de justice des mineurs".
Pour améliorer la situation, le rapport formule huit recommandations. Certaines d'entre elles restent de portée très générale : réaffirmer dans toutes les politiques publiques de lutte contre la précarité et l'exclusion l'objectif prioritaire de permettre l'accès de tous au droit commun, se doter d'un outil de lutte contre la discrimination pour origine sociale... D'autres sont en revanche assorties de propositions plus détaillées. C'est notamment le cas de la recommandation relative au logement, qui préconise en particulier de porter à 30% l'obligation de construction de logements sociaux dans tous les programmes de construction de plus de dix logements et de mobiliser une épargne solidaire pour réaliser des programmes de logements très sociaux. En matière de protection de l'enfance, le rapport préconise en particulier d'inciter les travailleurs sociaux à une démarche plus proactive vers les familles, de développer les contrats territoriaux ou encore de "construire un projet global défini réellement avec la famille et qui la mobilise, [de] le contractualiser et faire suivre son déroulement par un référent famille".
Jean-Noël Escudié / PCA