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Enfance - Protection de l'enfance : le défenseur des droits pourra saisir le président du conseil général

La commission des lois du Sénat a adopté le 19 mai le texte amendé du projet de loi organique et du projet de loi relatifs au défenseur des droits. Ces deux textes seront examinés en séance publique les 3 et 4 juin prochains. Le défenseur des droits a vocation à remplacer, avec des moyens élargis, plusieurs autorités de même type, dont le défenseur des enfants, ce qui n'a pas manqué de susciter une polémique (voir notre article ci-contre du 16 septembre 2009).
Une première conséquence - qui avait déjà été annoncée par le gouvernement en réponse à cette polémique (voir notre article ci-contre du 23 septembre 2009) - a pris la forme d'un amendement adopté par la commission des lois, qui consiste à placer trois adjoints spécialisés auprès du défenseur des droits. L'article 11A (nouveau) du projet de loi organique prévoit ainsi que le défenseur nomme, après avis de la commission compétente de chaque assemblée, des adjoints placés sous son autorité. L'un d'entre eux sera "chargé de la défense et de la promotion des droits de l'enfant", ce qui revient à recréer le défenseur des enfants. Celui-ci sera également le vice-président du collège chargé de la défense et de la promotion des droits de l'enfant (qui était déjà prévu dans la rédaction initiale du gouvernement). Les deux autres adjoints seront respectivement chargés de la déontologie dans le domaine de la sécurité et de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l'égalité (ce troisième collège ne figurait pas dans le texte initial et aurait pour conséquence de faire disparaître la Halde).
La commission des lois a également adopté trois autres amendements, qui doivent renforcer la prise en compte des droits de l'enfant dans cette nouvelle institution. Le premier prévoit que le défenseur des droits "est chargé de défendre et promouvoir les droits de l'enfant consacrés par la loi ou par un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France" (article 4). Ce rappel, qui ne figurait pas dans le texte initial, aligne la mission du défenseur des droits sur celle du défenseur des enfants. Ce même amendement a également pour effet de charger expressément le défenseur des droits d'une mission de promotion des droits de l'enfant (et pas seulement de protection). En d'autres termes, celui-ci reprendra le travail de sensibilisation et de pédagogie, qui représente une part importante de l'activité du défenseur des enfants (par exemple à travers les actions en milieu scolaire). Cette mission est d'ailleurs explicitement confirmée par le second amendement, qui crée un article 26 bis (nouveau) prévoyant que "le Défenseur des droits mène des actions de communication et d'information propres à assurer la promotion des droits de l'enfant et de l'égalité".
Enfin, le troisième amendement, qui crée un article 26 ter, concerne très directement les départements. Il prévoit en effet que "le défenseur des droits peut saisir les autorités locales compétentes de tout élément susceptible de justifier une intervention du service en charge de l'aide sociale à l'enfance". Même si cette possibilité de saisine du procureur de la République ou du président du conseil général - selon l'urgence des situations concernées - était déjà de droit, comme pour tout citoyen, cette inscription dans la loi organique inscrit encore davantage le défenseur des droits dans le champ de la protection de l'enfance.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : projet de loi organique et projet de loi relatifs au défenseur des droits (examinés en première lecture au Sénat les 3 et 4 juin 2010). 

Craintes de disparition de la Halde

Une trentaine d'organisations ont exprimé le 21 mai leur inquiétude sur le rattachement de la Halde au futur défenseur des droits, voté au Sénat. Elles réclament le maintien des statuts actuels de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. "Le rapport Gélard [rapporteur au projet de loi créant un défenseur des droits et des libertés] concède donc sans ménagement la remise en cause de l'impartialité d'une autorité indépendante", observent les associations. Et de se demander: "Quel intérêt a le législateur de diluer plusieurs organisations dans une même entité? Quelles améliorations réelles sont attendues avec cette réforme? S'agit-il d'envisager l'invisibilité des discriminations au sein du Défenseur des droits? Pourquoi le défenseur des droits dispose-t-il d'un pouvoir supérieur par rapport à celui de la Halde?" Le communiqué, signé notamment par la Ligue des droits de l'homme, SOS Racisme, la CGT, la CFDT, le syndicat de la magistrature…, ajoute : "Nos organisations et associations demandent au gouvernement de montrer sa détermination à faire progresser la lutte contre toutes les discriminations" et "exigent" que la Halde ne soit pas "intégrée et diluée au sein du défenseur des droits". De son côté, Jeannette Bougrab, la nouvelle présidente de la Halde, a fait savoir que cette éventuelle fusion "serait un recul".
C.F.