Décentralisation du logement : la délégation aux collectivités de l'Assemblée apporte sa pierre à l'édifice
À l’heure où le logement fait l’objet de toutes les inquiétudes, le rapport d’information issu des Rencontres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, présenté au Palais Bourbon le 11 octobre par le député David Valence (Renaissance, Vosges), fait valoir la pertinence d’une territorialisation des politiques publiques du logement.
Les Rencontres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation avaient eu lieu à l’Assemblée nationale le 29 juin afin d’auditionner les acteurs du logement autour des perspectives qu’offrirait une décentralisation de la politique du logement (lire notre article). Ce 11 octobre, l’heure était au bilan. David Valence, président de la délégation et député des Vosges, a présenté à l'Assemblée nationale le rapport d’information issu de ces échanges. "Les Rencontres ont été organisées en concevant la décentralisation non pas sous l’angle philosophique mais bien sous celui de l’efficacité, rappelle l’élu. Il s’agit de savoir si, pilotées au plus près des territoires, les politiques publiques menées en faveur du logement s’en trouveraient plus efficaces. Deux points se sont fait jour : déterminer quel pouvoir de décision pouvait être attribué à des échelons plus locaux, et savoir à quelle collectivité territoriale confier ces compétences, aujourd’hui exercées par l’État."
Décentraliser pour améliorer l’efficacité des politiques publiques
Portant sur la relance de l’offre de logements, la première table-ronde des Rencontres rassemblait des experts de l’Union sociale pour l’habitat (USH), du Groupe Action Logement, de la Fédération des promoteurs immobiliers de France, ainsi que Catherine Sabbah, copilote de l’un des groupes de travail du Conseil national de la refondation (CNR). Face à la panne de production de logements neufs, la délégation cible la "fragmentation" des pouvoirs entre l’État, disposant des principaux leviers fiscaux et réglementaires, et les collectivités qui exercent d’autres compétences, dont celle de délivrer les permis de construire.
"Nous le savons, la décision de construire est éminemment locale, affirme David Valence. Or, les normes qui s’y appliquent sont aujourd’hui définies par décret." Ainsi en est-il des deux principaux zonages A/B/C et 1/2/3, qui figent une répartition géographique autour de laquelle s’organisent la plupart des aides d’accès au logement et à l’investissement locatif. "Dans le rapport soumis aujourd’hui, j’estime qu’il convient de laisser aux élus plus d’initiatives en leur confiant le soin de moduler cette répartition en fonction des mutations économiques et sociales de leur territoire." Dans la même optique, le président de la délégation envisage une autorisation des collectivités concernées à expérimenter elles-mêmes la fusion des deux zonages.
Privilégier l’échelle de l’EPCI
Il apparaît par ailleurs que la qualification d’autorité organisatrice de l’habitat (désormais ouverte au intercommunalités depuis la loi 3DS) ne soit pas encore intégralement mise à profit. "Dans bien des cas, elle reste une coquille vide", déplore le député des Vosges. Une situation d’autant plus paradoxale que les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent déjà intervenir dans la fixation des documents d’urbanisme et des programmes locaux de l’habitat si les communes décident de leur en confier la compétence. "Il me paraît donc cohérent de doter les EPCI de nouvelles responsabilités en matière de logement, au premier rang desquelles figurerait la modulation des zonages précités." De l’avis du rapporteur, c’est donc bien l’échelle de l’EPCI qui serait à privilégier en matière de politique du logement.
Territorialiser pour mieux rénover
La notion de territorialisation s’est également invitée aux conclusions de la seconde table-ronde des Rencontres de la délégation, qui portait sur la production de logements neufs à partir de bâtiments existants par la voie de la rénovation. "Comment peut-on imaginer appliquer les mêmes efforts d’aide à la rénovation en Haute-Garonne – qui compte moins de 10% de logements diagnostiqués F et G – que dans le Cantal où cette proportion dépasse les 40% ?", interroge David Valence. Ce dernier mise ainsi sur l’intégration de l’ensemble du dispositif de soutien à la rénovation Ma Prime Rénov’ dans de possibles conventions de délégation aux EPCI ou à leurs groupements. Ceux-ci apparaitraient en outre les mieux positionnés pour optimiser la mise en œuvre d’une politique globale de rénovation. C'est d'ailleurs ce qu'ils réclament, comme l'a par exemple fait France urbaine lors de ses dernières Journées nationale.
"L’intercommunalité est la maille choisie par le gouvernement pour le déploiement des guichets France Rénov’ d’ici à 2025. Un tel choix des EPCI serait cohérent avec la qualification AOH compte tenu des imbrications fortes entre les sujets de construction et de rénovation", conclut le député, dont le rapport s'ajoute désormais à la liste des contributions sur lesquelles le gouvernement pourrait s'appuyer pour bâtir son "choc de décentralisation" des politiques du logement dont il est plus que jamais question (voir nos articles ci-dessous). La Première ministre elle-même pourrait d'ailleurs aborder le sujet ce vendredi 13 octobre lors de sa prise de parole à Orléans devant la Convention des Intercommunalités de France.