Cantine scolaire - De la bonne éducation alimentaire
Obésité, véganisme, interdits religieux, intolérances alimentaires, allergies réelles ou fantasmées, gâchis alimentaire… les cantines scolaires doivent tout prendre en compte. Un rapport interministériel fait le point et met en lumière des initiatives exemplaires en faveur de la bonne éducation alimentaire de la jeunesse. Il en appelle à des partenariats renforcés "entre tous les acteurs, aussi bien politiques que professionnels, pédagogiques ou associatifs".
"L'éducation alimentaire de la jeunesse est porteuse d’enjeux majeurs qui ne se résument pas à la protection de la santé publique. Il s’agit aussi de citoyenneté, de cohésion sociale, de développement durable et de plaisir", estiment les inspections générales de l'Education nationale et le CGAAER (conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, ministère de l'agriculture et de l'alimentation). Leur rapport vient d'être publié.
Les auteurs évoquent "la volonté de coopération interministérielle", mais "pour les acteurs de terrain, les responsabilités de chaque ministère n’apparaissent pas clairement" alors que "le pays fait face à des pathologies chroniques d’origine alimentaire".
Ils soulignent que "la restauration hors foyer et le grignotage se développent", mais aussi que "des interdits spirituels, qu’ils soient religieux ou autres (véganisme par exemple), sont aussi plus souvent revendiqués". Ils ajoutent que "de plus en plus de personnes – jusqu’à 30 % – se disent intolérantes ou allergiques au plan alimentaire, alors que le chiffre véritable est sensiblement plus faible (3,4 % selon le corps médical)".
Les auteurs du rapport en appellent à "une impulsion forte (...) à un haut niveau de l’État", à une définition claire de la gouvernance et à des partenariats très étroits "entre tous les acteurs, aussi bien politiques que professionnels, pédagogiques ou associatifs, à tous les niveaux, national, régional ou de proximité".
Des initiatives qui font le lien entre alimentation et agriculture locale
Plusieurs opérations menées dans les établissements scolaires sont mises en valeur dans le rapport.
C'est le cas d'"Un fruit pour la récré", un programme européen pour lequel, en 2015-2016, "la France était l’avant-dernier pays en consommation des crédits avec 80 % de budget non consommé". Les auteurs citent "divers problèmes", liés aux "sources d’approvisionnement (familles ou producteurs locaux)", à la lourdeur des procédures de financement et à "la question du grignotage s’il est consommé à la récréation du matin"
Les "classes du goût", proposées dans les écoles élémentaires et mises en œuvre dans le cadre de partenariats.
"Plaisir à la cantine" qui vise le second degré "et a pour objectif de rétablir le lien entre producteurs, transformateurs, personnels de cuisine et mangeurs" et qui connaît "un succès grandissant", même si "elle nécessite un investissement important des équipes éducatives et de restauration".
"La Semaine du goût" (marque déposée) "met en avant les terroirs, les produits locaux et les artisans".
Par ailleurs, "l’organisation d’un accueil petit-déjeuner avant le démarrage des cours a donné lieu à de nombreuses initiatives appréciées, notamment en collège". Le petit-déjeuner et la collation du goûter "participent fortement à l’équilibre alimentaire, notamment en diminuant le grignotage". Le dispositif est aujourd'hui encouragé et financé par le ministère de l'Éducation nationale dans les écoles (voir notre article 23 avril 2019)
Bars à salades et bars à soupes pour limiter le gaspillage alimentaire
Les auteurs soulignent que "l’implication de l’élève en tant qu’acteur est essentielle" et que la cohérence entre tous les acteurs "doit être perceptible par les élèves". Ils ont pu constater que "les personnels de restauration scolaire, surtout lorsque les plats sont cuisinés sur place, sont de plus en plus attentifs aux comportements des élèves (...), attentifs à ceux qui ne prennent pas un repas équilibré, initiant des échanges avec les jeunes pour les inciter à goûter, à équilibrer leur repas, à ne pas prendre plus que le nécessaire pour éviter le gaspillage, etc.".
Ils ont également "pu constater des initiatives originales", le développement de "bars à salades" et de "bars à soupe" qui "contribuent à limiter le gaspillage alimentaire, les élèves pouvant se resservir autant qu’ils le veulent" ou "l’introduction progressive de nouveaux aliments", avec de très petites portions "pour goûter", puis la semaine suivante en plus grande quantité. Mais "la mission regrette qu’il y ait encore très peu de projets intercatégoriels au sein des EPLE (Ndlr : collèges et lycées), projets associant notamment enseignants et personnels de restauration".
Peu de projets associent enseignants et personnels de restauration
Les auteurs soulignent "l’importance des CESC (comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté)", mais aux niveaux académique et départemental, ils ne sont pas toujours "réellement opérationnels", ils sont mal identifiés par les Draaf (directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt) tandis que, "sur de nombreux territoires, la collaboration effective entre les personnels enseignants et d’inspection et les personnels de santé n’est pas réellement approfondie".
Les enjeux sont de taille, la France compte environ 13 millions d’élèves, la fréquentation de la restauration scolaire a augmenté ces dernières années, mais "la fréquentation de la restauration scolaire est beaucoup plus faible dans les écoles et établissements relevant de l’éducation prioritaire (...). Une politique active de prise en charge du coût par les collectivités territoriales, partielle ou totale, pour les élèves les plus défavorisés, peut augmenter la fréquentation", mais celles-ci "interviennent inégalement" et "la gratuité demandée pour les budgets familiaux les plus réduits n’est pas encore la règle".